Thomas Vallières a failli tout arrêter
La quatrième saison d’«Indéfendable» sera diffusée cet automne à TVA. Les trois premières saisons sont disponibles sur illico+.
Patrick Delisle-Crevier
Après avoir roulé sa bosse pendant des années, l’acteur a été révélé au grand public grâce à la série Indéfendable, dans laquelle il campe le gentil et séduisant enquêteur Alec Diaz. Le dernier épisode de la saison est cependant venu brouiller les cartes: et si le policier était corrompu? On en discute avec son interprète, qui nous parle aussi de ses ambitions personnelles et professionnelles.
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Thomas, comment as-tu appris que ton personnage dans Indéfendable allait passer du côté obscur?
Je l’ai su quand j’étais dans la chaise de maquillage et de coiffure sur le plateau de la série. Une personne m’a confié qu’il allait se passer quelque chose de gros avec mon personnage. J’étais donc déjà au courant quand j’ai lu le texte quelques jours avant le tournage. J’ai compris qu’il y aurait tout un revirement pour Diaz. Ç’a été un petit choc.
On aurait pourtant donné le bon Dieu sans confession à ton personnage...
Oui, en effet. C’est pour cette raison que ç’a été un grand mélange d’émotions pour moi. Quand notre personnage devient un vilain, on se dit qu’il y aura inévitablement une fin plus rapide pour notre personnage, puisque ce n’est pas une histoire qui pourra durer ad vitam æternam. En tant que comédien, je me suis dit que le décompte était commencé pour Diaz. Comme ce n’est pas le premier méchant que je joue, je me suis demandé si je dégageais ça malgré moi, si c’était mon casting. Mais j’étais surtout content parce que les rôles de vilains sont souvent les plus agréables à jouer. En fait, tout est possible avec un tel personnage. Pour le moment, je sais que je serai là au début de la saison et qu’il va y avoir des rebondissements. Qui sait? j’aurai peut-être à jouer la dualité, soit le bon policier et le ripou. Ça pourrait être fort intéressant.
Tu fais ce métier depuis de nombreuses années, mais on a l’impression de te découvrir réellement avec ce personnage...
Oui, ça représente vraiment une grosse étape pour moi, surtout que j'ai décroché ce rôle à un moment de ma vie où j’étais à un cheveu de tout arrêter pour faire autre chose. Je fais ce métier depuis 15 ans et je me sentais à la croisée des chemins. Je mettais beaucoup d’énergie à passer des auditions sans jamais avoir de retour. La valorisation professionnelle n’était pas là. Alors quand j'ai reçu un appel de mon agent pour m'annoncer que mon petit rôle de Diaz allait être davantage développé et qu’il prendrait de l’importance dans la série, ç’a vraiment été rédempteur. Je suis extrêmement reconnaissant qu'on m'ait confié ce rôle. Je suis fiancé, et ma blonde et moi parlons en ce moment de fonder une famille. Nous voulons nous installer, et l’insécurité que je vis face à mon métier devient parfois intenable. Comme ma blonde fait un tout autre métier, ça équilibre les choses dans notre couple et ça me garde les deux pieds sur terre. C’est facile de se perdre dans ce métier.

Est-ce important pour toi d’avoir des enfants?
Tellement! Je viens d’un clan où les valeurs familiales sont importantes, même si ma famille est éclatée, puisque mon père vit aux États-Unis, ma sœur, en Irlande, et mon frère, à Hawaï. On est un peu éparpillés, et ça m’attriste. Maintenant que ma sœur et mon frère ont des enfants, je trouve ça difficile d’être si loin d’eux. Je suis né à Edmonton, on a ensuite déménagé à Ottawa, puis on est allés vivre à Seattle. Mes parents ont divorcé quand j’avais six ans. Ma mère et moi sommes venus au Québec. Ma blonde et moi sommes ensemble depuis quatre ans et nous voulons vraiment avoir des enfants. Mais on a décidé de se donner un an pour régler et bâtir certaines choses avant de nous lancer.
Passes-tu beaucoup d’auditions?
J’en passe tellement! Pendant longtemps, j’étais dévasté de ne pas être choisi, mais j’ai heureusement changé mon rapport à tout ça. Depuis mon retour de Londres, j’ai dû passer environ 600 auditions. C’est beaucoup, mais je suis reconnaissant, car quand tu peux passer des auditions, c’est parce qu’il y a de l’intérêt pour toi. En revanche, ça devient difficile de toujours repartir à zéro quand ça ne fonctionne pas. Maintenant, je réalise que je ne dois pas garder un sentiment de rejet quand ça arrive. Je dois plutôt aborder les auditions comme une chance qu'on me donne de pouvoir éventuellement travailler. Alors, je dois m’amuser dans tout ça.
As-tu eu à faire autre chose pour gagner ta vie?
Je fais parfois de la rédaction de contenu et de la traduction, notamment pour Sid Lee et Harry Rosen. Je ne viens pas d’une famille artistique. Je suis une personne très curieuse de nature et je m’intéresse à beaucoup de choses, pas seulement au jeu. Comme il me fallait un plan B, j’ai fait mon baccalauréat en développement international. J’ai aussi fait une maîtrise en théâtre classique. Mon rêve, c’était d’étudier à la London Academy of Music and Dramatic Art. J’ai tout laissé pour étudier à cette école de Londres.
Pourquoi n’as-tu pas essayé de faire carrière en Europe par la suite?
Parce que la vie à Londres coûte excessivement cher! Je n’avais plus un sou et je vivais dans une véritable auberge espagnole, où nous étions huit dans le même appartement. À mon retour, j’ai dormi sur le canapé de ma mère à Montréal pendant six mois, parce que je ne savais pas ce que je voulais faire. Mon but était de retourner en Europe; à Montréal, on aurait dit que je n’assumais pas pleinement qui j’étais. Puis, la pandémie est arrivée, et ça a changé mes plans. Je suis fier de faire carrière ici, où je baigne dans ma culture et ma langue. J’aimerais travailler ailleurs, mais ma base, ma maison, c’est le Québec. Je vais toujours y revenir.
Est-ce que les gens te parlent de ton personnage?
Un peu moins dans la grande ville, mais beaucoup en région. Depuis la fin de la saison, il arrive que les gens me disent «Ripou! Ripou!» dans la rue. Je ne connaissais pas ce mot, mais je l’ai beaucoup entendu depuis.
Est-ce que tout ça te réconcilie avec le métier?
Oui et non. Au début de ma carrière, j’ai eu un beau rôle dans la série Tactik. Je pensais que c’était le début de quelque chose pour moi, mais il ne s’est finalement rien passé après. Il y a donc toujours une partie de moi qui ne s’emporte pas trop. Je suis une personne anxieuse, alors je profite pleinement de tout ça, mais sans me faire d’illusions. Je développe aussi des projets: Marianne Verville, Claudia Bouvette et moi avons proposé une série à Télé-Québec. C’est une comédie qui mettra à l’avant-plan les codes policiers. J’ai aussi un projet de film avec mon amie Eve Lemieux.
À quoi ressemble ta vie quand tu ne tournes pas?
Je fais de la musique: je joue du saxophone et de la basse. J’aimerais avoir un groupe un jour. Je lis et j’écris beaucoup. Je joue aussi au tennis. J’aime bouger et être actif. J’ai une vie sociale; c’est important pour moi. Je suis un extraverti à tendance introverti: j’ai besoin des deux! Ma famille est très importante pour moi et je suis très proche de ma mère et de ma grand-mère. J’aime aussi voyager.
En terminant, Thomas, si je te donnais la chance de choisir ton prochain rôle, quel serait ton choix?
J’aimerais jouer dans une comédie. Je pense que j’ai un bon timing comique et j’aimerais montrer ce que je suis capable de faire. On pense souvent à moi pour des rôles de jeunes premiers ou de tueurs en série, mais j’aimerais vraiment explorer mon côté comique.