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L'article provient de Le Journal de Montréal
Voyages

Surtourisme qui dérange: devrons-nous bientôt arrêter de voyager?

Des touristes dans un parc de Barcelone, en Espagne.
Des touristes dans un parc de Barcelone, en Espagne. MEGA/WENN
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Photo portrait de Sarah-Florence  Benjamin

Sarah-Florence Benjamin

2025-07-10T19:07:46Z
2025-07-12T01:00:00Z
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À Venise, à Barcelone ou ailleurs dans le monde, de plus en plus de résidents se plaignent du surtourisme. On s’entend: les humains ne vont pas tous s’arrêter de voyager demain. C’est quoi, alors, les solutions? On en jase avec Luc Renaud, expert en tourisme.

Dans une chronique sur le tourisme publiée cette semaine dans Le Journal, Richard Martineau se désole des «bien-pensants qui trouvent qu’il y a trop de gens qui voyagent».

Sauf que le surtourisme – ou tourisme de haute intensité pour utiliser un terme plus exact –, ce n’est pas qu’il y a trop de gens qui voyagent, c’est qu’il y a trop de gens qui voyagent aux mêmes endroits en même temps.

Selon les données de la startup française Murmuration, 80% des voyageurs se concentrent dans seulement 10% des destinations touristiques du monde.

Des effets concrets sur les habitants

Dans son texte, Richard Martineau reconnaît que «c’est chiant de se retrouver au beau milieu d’un troupeau de touristes, quand on va à Florence».

Il ignore toutefois les conséquences concrètes du tourisme sur les habitants de ces régions prisées des voyageurs.

Ce sont eux qui subissent le bruit, la dégradation des infrastructures, la hausse du prix des loyers, les problèmes de pénurie d’eau.

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Le professeur associé en études urbaines et touristiques de l’UQAM Luc Renaud donne aussi l’exemple d’un petit café au coin de la rue où on aurait l’habitude de s’arrêter. S’il devient populaire auprès des touristes, vous devrez faire la file et attendre longtemps pour votre café.

«Les gens rapportent une perte de qualité de vie», résume-t-il.

«Les touristes dépensent de l’argent, mais à qui il va, cet argent? Les gens qui font de l’argent grâce à l’industrie du tourisme n’habitent pas dans le cœur de la ville. Le patron ne vit pas dans son usine», se désole-t-il.

Solutions à deux vitesses

Des villes commencent à adopter des mesures pour limiter ces impacts: contrôle ou interdiction des locations de type AirBnB, taxes pour les touristes, limite du nombre de visiteurs.

C’est le cas de Venise, qui a introduit une taxe pour les touristes qui ne séjournent pas en ville ou de Prague où le prix des attractions touristiques les plus populaires augmente durant la haute saison.

AFP
AFP

Ces solutions plus systémiques peuvent avoir un effet bénéfique sur les habitants, mais aussi l’effet pervers de bloquer l’accès seulement aux voyageurs les moins nantis, prévient Luc Renaud.

«À New York, on a éliminé les AirBnB, mais le prix des hôtels explose parce que l’offre baisse. Ça ramène des logements pour les habitants, mais il y a autant de touristes à New York. Ceux qui ne peuvent pas se le payer dorment ailleurs, au New Jersey par exemple», explique-t-il.

«Pour enlever la pression [du surtourisme], il faut des mesures qui touchent tout le monde également, riches et pauvres», insiste le professeur.

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Une ville pourrait, par exemple, limiter le nombre de billets d’entrée et les attribuer par tirage au sort, pour éviter une surenchère.

Lorsque de telles mesures engendrent des profits, comme avec une taxe touristique, l’argent devrait être redistribué aux habitants les moins fortunés, affirme Luc Renaud.

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Voyager autrement

La vraie solution au surtourisme passe toutefois par l’éducation et par une remise en question de notre vision du voyage, croit Luc Renaud. Voyager beaucoup a longtemps été vu comme un but à atteindre dans notre société, selon lui.

«Il faut diminuer sa mobilité, partir moins souvent et plus longtemps, voyager hors saison, voyager moins loin. Ce n’est pas donné à tout le monde cependant», dit-il.

Il recommande aussi de voyager localement ou vers des destinations peu visitées.

Luc Renaud pense que les mentalités sont en train de changer.

«Les voyages, c’est cool, mais trop de voyages, c’est moins cool», résume-t-il.

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