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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

Drame à Laval: surmonter l’impensable

Photo Agence QMI, Joël Lemay
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Photo portrait de Dre Christine Grou

Dre Christine Grou

2023-02-18T05:00:00Z
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Ce terrible drame à Laval a percuté chacun de nous, et ce, de différentes façons: on n’a qu’à penser aux enfants témoins de la scène, aux éducatrices, aux premiers répondants et aux parents des victimes, qui ont été directement affectés par cette tragédie.

Empathie

Les Québécois ont retenu leur souffle, rivés à leurs écrans. Cette tristesse que nous ressentions, et que nous ressentons encore aujourd’hui, est attribuable à notre empathie, à notre capacité de nous mettre à la place de l’autre, d’autant que cet événement est survenu tout près de nous. 

La mobilisation de tous pour entourer les Lavallois et apaiser leur peine est remarquable. Ce soutien devra toutefois se poursuivre dans le temps : certaines personnes auront besoin d’aide dans les semaines, voire dans les mois après cet événement, et ce, de diverses façons. 

Processus de deuil

La perte d’un enfant est ce qu’un parent peut traverser de plus douloureux. Le deuil peut nécessiter un long processus de guérison, surtout lors de la mort d’un enfant. Ceux-ci passeront du choc à une profonde et insupportable peine, qui évoluera vers un processus de reconstruction, mais toutes ces étapes prendront du temps. Plusieurs facteurs détermineront la durée et la nature de ce processus chez une personne, dont ses ressources psychologiques, la solidité de son réseau affectif et social, ainsi que l’accessibilité aux services psychologiques, s’ils sont requis.

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Différentes réactions

Si l’on a beaucoup entendu parler du terme «trauma collectif», personne ne réagira de la même façon devant ce drame. Pour une majorité, les symptômes de choc et de stress aigu diminueront progressivement, tandis qu’une petite proportion de gens pourrait développer un syndrome de stress post-traumatique. Ce trouble est notamment caractérisé par des réactions intenses et éprouvantes dont l’hypervigilance et l’insomnie, des cauchemars et reviviscences d’images traumatiques, des comportements d’évitement, et qui persistent au-delà de quatre semaines. Une personne peut également développer ces réactions dans les semaines ou les mois après l’événement.  

  • Écoutez l'entrevue de Benoit Dutrizac avec Hamdi Ben Chaabane, présent sur la scène du drame à Laval sur QUB radio :

Comment en parler aux enfants?

Dans un tel contexte, les enfants se tournent inévitablement vers leurs parents pour obtenir des réponses, ces derniers étant la référence sécuritaire des enfants en bas âge. 

Plutôt que de les bombarder de détails ou de transmettre – sans le vouloir – nos propres inquiétudes, nous avons tout intérêt à les écouter d’abord, à les laisser formuler leurs questions, et ensuite leur répondre avec des mots et des images qu’ils peuvent comprendre, mais sans les surcharger de détails. Le cerveau des enfants est encore en pleine construction: il est préférable de ne pas aller au-delà de ce qu’un enfant de trois, cinq ou sept ans arrivera à formuler ou à concevoir. 

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Les enfants sont capables de se créer des scénarios féeriques ou encore terrifiants, puisque leur rapport à la réalité est en développement. Je suis bien d’accord avec le fait qu’il ne faille pas éviter toute peine ou deuil aux enfants. Mais ne les laissons pas non plus broyer un noir trop obscur et nourrir leur terreur. Rappelons que si l’événement tragique de Laval a autant marqué les esprits, c’est aussi pour son caractère tristement spectaculaire et singulier. 

Quête de sens

Un événement aussi dramatique (et en partie parce qu’il est le fruit d’un comportement humain incompréhensible) entraîne son lot de questions. Notre cerveau cherche à «faire du sens», à comprendre comment une telle tragédie peut survenir, et c’est tout à fait normal. Pour nous rassurer, pour trouver un sens, pour tenter de reprendre le contrôle en pareille situation, nous cherchons tous une explication. 

Les psychologues sont d’ailleurs souvent appelés en renfort dans les médias lors de tels événements. Ils ne peuvent que tenter de contribuer à expliquer, à rassurer les gens sur leurs réactions et leur quête de sens qui sont tout à fait légitimes, et les mettre en garde contre des conclusions hâtives et potentiellement dommageables.

Se reconstruire après le deuil

En terminant, je souhaitais profiter de l’espace qui m’est offert ici pour exprimer ma profonde sympathie envers tous parents éprouvés depuis ce fatidique 6 février. En tant que mère, je suis de tout cœur avec vous. Je souhaite que vous puissiez trouver tout le soutien et tout le réconfort dont vous avez besoin. Ce drame a profondément marqué votre vie, la reconstruction demandera du temps. Je vous souhaite tout le courage nécessaire à ce long chemin.

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