Steve Bannon, la benne à ordures


Luc Laliberté
Le sulfureux Steve Bannon change son fusil d’épaule et témoignera devant la commission chargée de faire la lumière sur l’assaut du 6 janvier 2021. Cette annonce survient au moment où Donald Trump le dédouane officiellement dans une lettre relayée par le New York Times.
Propagandiste populiste d’extrême droite
Pour ceux qui l’auraient oublié, Bannon a une feuille de route bien garnie et sa vie pourrait faire l’objet d’un roman noir. L’homme a servi dans la marine américaine, il a joué aux investisseurs, tâté du cinéma à Hollywood, avant de contribuer à développer Breitbart News, un organe de propagande de l’alt-right.
Si la plateforme se présente comme un média pro-vérité, contrepoids au virage progressiste de certains grands médias, elle véhicule aussi des idées d’extrême droite. On verse parfois dans la désinformation et on relaye sciemment les propos de nationalistes blancs ou de néonazis.
Les rêves les plus fous de Bannon se matérialisent en 2015, lorsque Donald Trump descend l’escalier roulant de la Trump Tower. Bannon aurait alors comparé la scène au film de propagande nazie de Leni Riefenstahl, Le triomphe de la volonté. Trump devenait Hitler.
Après avoir participé activement à la campagne électorale, Steve Bannon entrera à la Maison-Blanche en compagnie de son protégé. Son passage y sera de courte durée, puisque Donald Trump l’écarte après qu’il a accepté de collaborer au livre Fire and Fury, de Michael Wolff.
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Il semble que le patron lui ait par la suite pardonné son égarement, car il lui accordera une grâce présidentielle tout juste avant de quitter ses fonctions. Bannon était accusé d’avoir détourné des fonds, encaissant de manière frauduleuse plus d’un million de dollars.
Il faut avoir tous ces faits en tête pour comprendre la soudaine volonté de coopération de l’ancien conseiller. Ça, et le fait qu’en refusant de coopérer, il s’exposait à deux années de prison et à une amende salée.
Émissaire de Trump?
Fidèle à Trump, il serait étonnant que Bannon l’incrimine. Il choisira bien les questions auxquelles il souhaite répondre et pourra toujours invoquer le cinquième amendement pour ne pas s’incriminer.
Ce n’est pas un hasard si Bannon témoigne au moment où l’ancien président donne sa «permission». La trame narrative des audiences est fixée par les démocrates et deux adversaires politiques républicains. Avec la présence de Bannon, Trump espère reprendre un peu l’initiative.
Le témoignage de Bannon sera-t-il suffisant pour avoir une influence sur les perceptions? Ce qu’on lui reproche – preuves à l’appui – est grave. Nous savons qu’il a participé à une réunion de proches du président dans les heures précédant l’assaut du 6 janvier et qu’il promettait que nous assisterions à un «déchaînement des enfers».
Encore une fois, je vous invite à demeurer à l’écoute. Rien n’est banal avec Steve Bannon, et ses desseins sont sombres. La possibilité qu’il y ait des coups fourrés est réelle et, au-delà du spectacle, il faudra une fois de plus s’en tenir aux faits.