Sondage sur la réforme du mode de scrutin: «pas une priorité pour nous», répond Québec


Patrick Bellerose
François Legault reste de marbre devant la volonté d’une majorité de Québécois de réformer le mode de scrutin.
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Un sondage Léger-Le Journal révélait jeudi que 53% de la population souhaite revoir le système électoral afin de corriger ses distorsions, particulièrement flagrantes lors des élections du 3 octobre dernier.
En effet, avec 41% des voix, la Coalition Avenir Québec (CAQ) a raflé 90 des 125 sièges. Dans l’opposition, le Parti libéral du Québec (PLQ) avec 21 sièges, Québec solidaire (QS) avec 11 et le Parti Québécois (PQ) avec 3 ont obtenu des scores bien différents, bien qu'ils aient obtenu chacun plus ou moins 15% des votes. Le Parti conservateur du Québec (PCQ), lui, n’a fait élire aucun député avec 13% des suffrages exprimés.
Mais comme il l’avait fait la semaine dernière, le premier ministre Legault ferme la porte à tout débat.
«Nous n’avons pas l’intention de relancer la discussion sur le mode de scrutin, comme on l’a affirmé à maintes reprises en campagne électorale. Avec les défis qui nous attendent, notamment en santé, ce n’est pas une priorité pour nous», affirme son porte-parole dans une déclaration écrite.
La CAQ s’était pourtant engagée, en 2018, à adopter un mode de scrutin proportionnel mixte compensatoire si elle était portée au pouvoir. «On ne fera pas comme Justin Trudeau», avait même promis François Legault, en référence à la réforme annoncée, puis abandonnée, par le premier ministre du Canada.
Une fois au pouvoir, le gouvernement Legault a bel et bien déposé un projet de loi en ce sens. Mais il a ensuite invoqué la pandémie pour expliquer sa décision de ne pas le faire adopter.
Chef de la CAQ ou PM?
Le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, fait remarquer que le sondage fait état de 20% d’indécis (seulement 27% sont fermement contre). Les appuis après une répartition des indécis «est encore beaucoup plus élevé», argumente-t-il.
«C’est non équivoque. Les Québécois veulent changer de système démocratique. Et ils sont surtout inquiets de la distorsion, de l’écart entre les votes exprimés et les sièges au Parlement», dit Paul St-Pierre Plamondon.
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En effet, le sondage démontre aussi que 61% des répondants croient que l’écart entre le nombre de voix et le nombre de sièges dans le système actuel est «un problème».
Chez Québec solidaire, on observe que «les Québécois sont insatisfaits de leur mode de scrutin». «Il faut continuer à travailler sur ce dossier-là, ne pas essayer de l’enterrer comme on l’a fait trop de fois dans le passé, dit le député Alexandre Leduc. Malheureusement, le PQ l’avait fait, M. Charest aussi. C’est quelque chose qui doit dépasser les clivages partisans.»
«M. Legault se targue d’être pragmatique, souligne-t-il. Une personne pragmatique, devant un tel sondage, se dirait qu’il doit écouter les Québécois et les Québécoises. Un pragmatique, devant une telle distorsion du mode de scrutin, doit aussi réviser sa position.»
Au cours de la campagne électorale, la cheffe du PLQ, Dominique Anglade, s’était dite ouverte à discuter d’une réforme du mode de scrutin sans toutefois s’y engager, alors que sa formation y était formellement opposée jusqu’à récemment. Jeudi, son parti a accusé le premier ministre d’avoir «renié» sa promesse lors du dernier mandat.
Réforme parlementaire
Malgré son refus de réformer le mode de scrutin, le cabinet du premier ministre souligne que François Legault demeure ouvert «à faire une réforme parlementaire afin de mieux valoriser le rôle des députés de l’Assemblée nationale». «On avait d’ailleurs présenté un projet de réforme en ce sens», rappelle son porte-parole.
Le document de 70 pages déposé par le ministre Simon Jolin-Barrette proposait notamment de modifier le déroulement des commissions parlementaires afin que le ministre ne soit plus obligé de participer à l’ensemble des discussions sur un projet de loi.
Mais Paul St-Pierre Plamondon impose deux conditions à une telle réforme parlementaire. Dans un premier temps, elle devra inclure des discussions sur la reconnaissance des groupes parlementaires qui ont fait élire moins de 12 députés. La proposition de M. Jolin-Barrette prévoit déjà abaisser ce plancher à huit élus.
Ensuite, le chef péquiste affirme qu’une telle révision des travaux parlementaires doit absolument inclure une «discussion» sur la réforme du mode de scrutin. Mais devant le refus de François Legault, l’impasse pourrait donc perdurer encore longtemps.
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