Signes religieux interdits à plus d’employés scolaires: des bris de service à prévoir dans les écoles
«Ça va prendre du courage, il faut arrêter d’avoir peur», plaide le ministre Bernard Drainville

Geneviève Lajoie
Interdire à davantage de personnel scolaire de porter des signes religieux aggravera la pénurie de main-d’œuvre et pourrait engendrer des bris de service dans les écoles, prévient le milieu de l’éducation.
«Quand on parle de Montréal, ça peut vouloir impliquer de fermer des services de garde au complet, étant donné que les personnes portent des signes religieux», souligne Frédéric Brun, le président de la Fédération des employées et employés de services publics affiliés à la CSN.
Après les profs, Bernard Drainville songe à interdire à d’autres employés scolaires d’afficher leur foi, a révélé notre Bureau parlementaire.
C’est ce que recommandent les enquêteurs du ministère de l’Éducation, qui ont constaté de nombreux manquements à la laïcité dans 17 écoles à travers le Québec. Dans leur rapport, ils pointent les éducatrices en service de garde, les aides à la classe, de même que les intervenants comme les psychoéducateurs ou les orthophonistes, qui sont en contact quotidien avec les enfants et qui exercent eux aussi une forme d’autorité sur les élèves.
«Je ne suis pas un raciste, moi»
En entrevue à QUB radio vendredi, le ministre de l’Éducation s’est montré déterminé à resserrer les règles. «Ça va prendre du courage, il faut arrêter d’avoir peur, a-t-il martelé. Il faut se tenir debout pour nos valeurs. On veut une école laïque à l’abri des pressions religieuses, car on veut protéger les enfants!»
Il promet de ne pas se laisser décourager par ceux qui vont l'accuser de tous les noms, comme ce fut le cas par le passé lorsqu'il portait le dossier de la Charte des valeurs québécoises au Parti Québécois. «Je ne suis pas un raciste, moi», a insisté Bernard Drainville.
Vague de départs
Mais pour Frédéric Brun, qui représente du personnel de soutien en milieu scolaire, élargir l'interdiction des signes religieux risque d’écarter des personnes qualifiées et dévouées dont le réseau scolaire a cruellement besoin.
«Ces personnes-là ont des études universitaires qui ne sont pas reconnues ici au Québec, plaide-t-il. On ne peut pas lever le nez sur l'expertise qu'ils peuvent amener et le support qu’ils apportent dans nos écoles.»
Les directions d’école s’attendent aussi à une vague de départ si le gouvernement Legault proscrit les symboles religieux aux éducatrices et à d’autres membres du personnel scolaire.
«On est en faveur de l'élargissement, affirme Nicolas Prévost, président de la Fédération québécoise des directions d’établissement d’enseignement. Les élèves ne font pas toujours la différence entre ce qui est en autorité ou pas. Je pense qu'il y a une certaine cohérence à avoir au niveau de l'ensemble du personnel dans les établissements scolaires.»
Mais il est toutefois convaincu que des gens vont décider de quitter le réseau si le ministre Drainville passe à l’acte, notamment dans les services de garde, déjà durement touchés par la pénurie de personnel.
Pas à des fins politiques
À la CSQ, on se dit d’emblée en faveur de la laïcité, mais on signale que les 17 établissements problématiques ne reflètent pas l’ensemble du réseau. Ce que craint le président Éric Gingras, c’est que ce rapport serve à des fins politiques.
«Le gouvernement a des problèmes, il cherche à faire des gains, dit-il. Nous, ce qu’on veut voir, c’est de s’assurer que si on fait ces changements-là, que ce soit pour les bonnes raisons et pas pour des raisons politiques.»
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