Si Manon Massé n'existait pas, il faudrait l'inventer


Josée Legault
Manon Massé annonce qu’elle tirera bientôt sa révérence comme porte-parole féminine de Québec solidaire. Heureusement pour les électeurs de Sainte-Marie–Saint-Jacques, elle demeure néanmoins leur fougueuse députée.
Au parc Lafontaine, émue et flanquée de son co-porte-parole Gabriel Nadeau-Dubois et de l’ex-députée Françoise David, elle a fait appel à la relève féminine progressiste pour lui succéder au poste de co-porte-parole.
Cet appel n’est pas fortuit. Depuis le scrutin du 3 octobre, QS vit un certain essoufflement. À 11 élus, sa récolte était décevante. Pour un parti dont l’ambition était de tasser les libéraux à l’opposition officielle, ça se comprend.
En mars, la victoire du candidat vedette Guillaume Cliche-Rivard à l’élection partielle dans Saint-Henri–Sainte-Anne est venue rassurer les solidaires. En voyant le Parti Québécois et son mini-caucus de trois élus poursuivre sa montée dans les sondages, l’inquiétude est toutefois revenue.
D’où, en partie, ce nouveau chapitre qu’espère ouvrir QS en renouvelant la moitié de son duo de co-porte-parole. Or, la perte à venir de Manon Massé dans ce poste crucial, qu’elle occupe depuis six ans, n’est pas à prendre à la légère.
Une femme vraie
Députée depuis 2014, Mme Massé est tout d’abord un des principaux piliers de QS. Cette femme de cœur et de tête est une humaniste. Une vraie. En toutes choses, le mot « authentique » lui va comme un gant.
Avec brio et humilité, elle a même su montrer qu’une femme peut exister et briller dans l’espace public sans fortune personnelle, talons hauts, tailleurs Chanel, maquillage, cheveux teints ou botox.
Parce qu’elle est vraie en tout, elle s’est gagné le respect de nombreux Québécois. Qu’ils soient de gauche, de droite ou de centre.
Manon Massé dit que de porter les deux chapeaux de co-porte-parole et de députée, «c’est pas de la tarte». Et on la croit. Il n’en reste pas moins qu’elle incarne ce qu’il y a de meilleur en politique active.
Son progressisme est profond et sincère. Son intelligence est aiguisée. Son humour est naturel. Sa capacité à savoir comment «connecter» avec les citoyens, tous les citoyens, est exceptionnelle.
Nombreux combats
Parmi ses nombreux combats, ceux qu’elle mène contre les rénovictions et pour, en fait, tous les grands oubliés des décideurs politiques commandent le respect.
Ce qui explique pourquoi, sur le plan politique et personnel, pour reprendre sa propre expression, elle forme avec GND un «duo d’enfer».
Au PQ, le duo laisse toutefois derrière lui de bien mauvais souvenirs. En 2017, le projet de convergence avorté brutalement par QS avait fait très mal.
Restera à voir si face à un PQ maintenant en remontée, le renouveau souhaité à QS par l’arrivée éventuelle d’une nouvelle co-porte-parole féminine réussira ou non à lui redonner du tonus.
La seule certitude est que pour les trois prochaines années, s’il veut tenter de s’imposer comme la « vraie » opposition à la CAQ, le parti des Françoise David et Amir Khadir aura beaucoup de pain sur la planche.
Sans compter qu’au congrès de la CAQ, François Legault s’est plu à détrôner Gabriel Nadeau-Dubois au profit du chef péquiste Paul St-Pierre Plamondon, qu’il a couronné à son tour comme son nouvel adversaire principal.
Cela dit, la réalité pour QS est que dans son rôle de co-porte-parole, Manon Massé est un personnage politique qui s’annonce fort difficile à remplacer.