Santé Québec sabre dans un service en matière d’agression sexuelle
L’agence dit que cela n’aura «aucun impact» sur les services aux victimes, alors que des organismes affirment le contraire


Olivier Faucher
Les victimes d’agression sexuelle font les frais de récentes compressions de Santé Québec, s’inquiètent des organismes.
«En fin de compte, ce sont les victimes qui vont être pénalisées», angoisse Deborah Trent, directrice du Centre pour les victimes d’agression sexuelle de Montréal (CVASM).
Ce dernier a annoncé, le 26 juin dernier, qu’il fermait son «service-conseil» à partir du 29 août prochain en raison de compressions budgétaires de Santé Québec.
Ce service offert depuis 2019 comptait quatre employés. Il s’occupait notamment de la formation continue et des réponses téléphoniques aux questions techniques du personnel des quelque 80 centres désignés qui accueillent et soignent les victimes d’agression sexuelle.
Son budget annuel? 300 000$.
Détails techniques cruciaux
«On forme les intervenants qui aident les victimes [de violence sexuelle] parce que ce n’est pas une intervention qui est facile. Si on veut que ce soit bien fait, ils ont besoin d’être soutenus», explique Deborah Trent, directrice du CVASM, en entrevue avec Le Journal.
Le service était notamment utile pour le personnel peu expérimenté ou en région, puisqu’il y a «beaucoup de roulement» dans les centres désignés, et pour l’aspect médicolégal de ces interventions qui peut s’avérer particulièrement complexe, poursuit Mme Trent.
Depuis 2022, il a répondu à 368 demandes de soutien.
«Si la victime souhaite porter plainte, il faut bien faire les choses pour ne pas avoir de problèmes en cour. J’ai fait tel prélèvement, est-ce que je l’ai fait de la bonne façon? Le personnel pouvait nous le demander», fait valoir Mme Trent.
Le Regroupement québécois des centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (RQCALACS) renchérit de son côté que l’annonce des coupes «compromet plusieurs aspects importants dans le parcours des survivantes» en plus de «fragiliser» le système qui prend en charge les victimes.
L’agence Santé Québec a de son côté indiqué qu’elle serait en mesure d’offrir elle-même le service-conseil du CVASM.
«Santé Québec a le personnel et l’expertise nécessaires [...] Les changements n’entraînent absolument aucun impact sur les services offerts aux victimes d’agression sexuelle», a martelé sa porte-parole, Marie-Eve Despatie-Gagnon.
«Si tu dilues ça dans une grosse machine [comme Santé Québec]... j’espère que ça va bien aller», répond Mme Trent.
Mauvaise nouvelle à Laval
Les nouvelles pour les victimes ne sont guères mieux à Laval, où le Centre de prévention et d’intervention pour victimes d’agression sexuelle (CPIVAS), seul organisme offrant du soutien aux survivants d’agression sexuelle dans cette ville, a annoncé fin juin devoir fermer sa liste d’attente pour les adultes qui s’inscrivent à ses services.
Celle-ci était rendue à deux ans tellement l’organisme est débordé. Il reçoit un financement insuffisant pour répondre à la demande qui a augmenté de 10% en cinq ans, selon sa directrice générale, Monique Villeneuve.
«C’est notre 40e anniversaire cette année et on n’avait jamais vécu ça. Cliniquement, c’est à l’intérieur d’une année qu’il faut être en mesure d’offrir un service, donc déjà de faire attendre deux ans, c’est inacceptable», déplore-t-elle.
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