SAAQclic: la comparaison avec l’Ontario fait peur
Incompétents ou malhonnêtes? Voilà la question!


Mario Dumont
Notre gouvernement aime bien les comparaisons avec l’Ontario. Cela se tient, c’est une province voisine et comparable, quoique plus grosse et plus riche. Vous imaginez bien que là-bas aussi il est désormais possible de payer son permis de conduire en ligne. Comme nous, ils ont investi pour mettre en ligne les services.
C’est le prof de gestion Gilles Levasseur qui m’a mis la puce à l’oreille sur les coûts de la transformation numérique en Ontario. Nous avions tous compris que SAAQclic nous a coûté nettement trop cher, mais il est toujours utile de pouvoir se faire une idée plus précise à partir de comparables.
J’ai donc fouillé dans la transformation numérique chez le voisin. J’ai même pris connaissance du rapport du vérificateur général ontarien concernant l’opération. Réglons une chose: il y a eu des problèmes là-bas aussi: ces chambardements technologiques sont complexes. Mais leurs problèmes portent plus le nom de pépins que l’appellation fiasco.
Commençons par le commencement, les permis et les immatriculations des Ontariens relèvent d’une organisation nommée Service Ontario. On y gère aussi les permis de chasse et de pêche, les changements d’adresse, les naissances et les décès, la carte santé et même certains registres immobiliers. En résumé, la gamme des services couverts est bien plus large que pour la SAAQ.
L’Ontario a misé sur une stratégie de transformation numérique clairement plus graduelle, implantant petit à petit, en quelques années, des services en ligne. La SAAQ a plutôt choisi d’opter pour le «Grand coup». On ferme les bureaux pendant trois semaines, puis on redémarre la machine entièrement avec le nouveau système. Vous connaissez la suite...
Combien $$$
Le plus ahurissant, ce sont quand même les coûts. Je me permets de faire le rappel douloureux: la transformation numérique SAAQclic avait été annoncée à presque 500 millions, c’était déjà énorme. Or, avec les dépassements de coûts de plus de 100%, la facture a grimpé au-delà du milliard.
Tenez-vous bien, la transformation numérique de Service Ontario a coûté 100 millions sur une période à peu près équivalente à une dizaine d’années. C’est dix fois moins. Peut-être faudrait-il inclure certaines dépenses connexes pour arriver à une équivalence. Disons que la réforme ontarienne aura coûté sept ou huit fois moins cher! Terrible!
Attention, la facture de la transformation numérique ontarienne est moindre, mais elle couvre une gamme de services nettement plus large et pour une population plus importante. L’Ontario compte sept millions de personnes de plus que le Québec.
Incompétents ou malhonnêtes?
Voilà qui rend encore plus intéressant de comprendre ce qui a entraîné le dérapage à la SAAQ. Avons-nous été victimes d’incompétence? Avons-nous été victimes d’abus au profit de l’enrichissement personnel de certains? Ou, pourquoi pas, aurions-nous été victimes d’un amer mélange des deux?
La ministre Guilbault constatait que le lien de confiance des citoyens de la SAAQ était rompu. C’est encore pire lorsqu’on fait des comparatifs aussi gênants.