Rudy Giuliani, l'ancien «maire de l'Amérique» pourrait tomber avec Trump
Agence France-Presse
Il s'est fait un nom à New York il y a 40 ans comme procureur antimafia avant de devenir le «maire de l'Amérique» pour sa gestion du 11-Septembre 2001: Rudy Giuliani, tombé depuis en disgrâce, risque d'être emporté dans le procès qui menace son mentor Donald Trump.
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La procureure de Géorgie Fani Willis, qui a inculpé lundi l'ancien président des États-Unis et 18 autres personnes, dont Rudy Giuliani, les poursuit en vertu d'une législation dite «RICO» («Racketeering Influenced and Corrupt Practices»).
Un texte contre la délinquance en bande organisée généralement utilisé contre la mafia et les gangs.
Procureur fédéral à New York dans les années 1980, Rudy Giuliani, avait gagné respectabilité et popularité en étant le premier magistrat à s'en prendre aux célébrissimes cinq grandes familles mafieuses d'origine italienne de la mégapole.
Et en se servant à l'époque de la même législation pour les faire tomber.
Mais Rudy Giuliani était aussi, il y a 20 ans, encore réputé aux États-Unis et en Europe comme le «maire de l'Amérique»: l'édile résilient qui avait su rassurer, protéger et redresser New York, mise à genoux par les attentats du 11-Septembre 2001, qui ont fait quelque 3.000 morts.
Maire jusqu'à fin 2001 de la Grosse Pomme, qui l'a vu naître il y a 79 ans dans une famille italo-américaine, il avait soigné son image d'homme à poigne et conservateur en faisant dégringoler les chiffres de la délinquance et des homicides.
Ses détracteurs dans la presse dans les années 2000, certains ayant travaillé avec lui, l'accusent d'aimer surtout les caméras, les provocations et les polémiques.
Il essuie un premier échec politique en 2008 lors d'une campagne malheureuse pour les primaires républicaines.
Quinze ans après, politicien décrédibilisé, avocat suspendu du barreau de New York -- et peut-être bientôt de Washington -- Giuliani est aujourd'hui accusé par la justice américaine d'avoir aidé Donald Trump à tenter d'inverser le résultat en Géorgie de l'élection présidentielle de novembre 2020.
Des années en prison?
S'il est reconnu coupable, celui qui fêtera ses 80 ans le 28 mai 2024 encourt des années de prison.
«Il s'agit simplement d'un nouveau chapitre d'un livre de mensonges dans le but de piéger le président Donald Trump et quiconque voulant s'en prendre au régime en place», s'est défendu cet avocat à la voix chuintante sur le réseau social X, anciennement Twitter.
Dès la victoire de Joe Biden en novembre 2020, Rudy Giuliani, conseil juridique personnel et soutien indéfectible de Donald Trump, avait été l'un des premiers à affirmer que l'élection du milliardaire républicain lui avait été «volée», au prix de rocambolesques théories du complot.
Lors d'une conférence de presse surréaliste fin novembre 2020 sur un stationnement de banlieue entouré d'un crématorium et d'un sex-shop, il avait affirmé sans aucune preuve que Joe Biden avait échafaudé un «plan centralisé» de fraude électorale massive. Une manœuvre qui aurait permis au démocrate de s'arroger des votes destinés à Donald Trump.
Les images avaient fait le tour du monde: il transpirait à grosses gouttes, au point que la teinture de ses cheveux coulait le long de ses tempes.
Quatre ans auparavant, lors de la campagne présidentielle de 2016, Rudy Giuliani avait relayé des allégations de Donald Trump selon lesquelles le président sortant Barack Obama aurait été un fondateur de l'organisation État islamique.
Il avait aussi défendu son mentor lors de la sortie dans la presse d'un enregistrement ancien dans lequel le républicain, président de 2017 à 2021, se vantait de pouvoir «attraper les femmes par la chatte».
Revenu aux côtés du président Trump en 2017, il s'illustre par des déclarations souvent contradictoires et des gaffes dans l'enquête d'un procureur spécial, Robert Mueller, travaillant sur des interférences russes aux États-Unis.
En 2019, au cœur du scandale ukrainien, Rudy Giuliani avait tenté de convaincre Kiev de livrer des informations compromettantes sur Joe Biden et son fils Hunter: cela contribuera à mener le président Trump à l'époque au bord de la destitution.
En 2019, dans une interview au magazine intellectuel des élites The New Yorker, il avait semblé lucide -- et ironique -- sur sa relation avec son mentor: «Je crains qu'il y ait sur ma pierre tombale +Rudy Giuliani a menti pour Trump+. Si c'est le cas, pourquoi m'en soucier? Je serai mort. J'imagine que je pourrai l'expliquer à Saint-Pierre».