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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Restrictions budgétaires en éducation: le gouvernement caquiste a oublié d’aimer nos enfants et ceux qui les éduquent

Photo d’archives, Agence QMI
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Photo portrait de Shophika Vaithyanathasarma

Shophika Vaithyanathasarma

2025-06-20T13:29:55Z
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«On essaye de voir un peu plus loin que notre nez», lançait le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, au micro de Patrick Masbourian pour défendre le projet chouchou du gouvernement caquiste, le troisième lien. Mais à quand une vision aussi passionnée, ambitieuse et véritablement tournée vers l’avenir lorsqu’il est question d’éducation?

Voir loin, ce n’est pas construire des ponts ou élargir des routes à tout prix. Voir loin, c’est investir dans nos écoles, protéger l’humain avant le béton, et comprendre que le véritable avenir du Québec se construit dans chaque salle de classe.

Cette semaine, l’éducation subit une véritable attaque sous couvert de «saine gestion».

L’austérité étouffe l’espoir

Le gouvernement parle joliment d’une «limitation associée à la croissance» du personnel scolaire. Autrement dit, il reconnaît enfin que les écoles étaient déjà surchargées, mais plutôt que d’agir pour régler le problème, il annonce tranquillement qu’on limitera désormais les moyens d’y répondre. Résultat concret? On continuera de demander à des enseignants de faire l’équivalent de 120% d’une tâche normale, et on comptera sur deux professionnels pour effectuer le travail qui en nécessiterait plutôt cinq.

Tout cela, alors même qu’il y a déjà 732 postes de professionnels vacants dans le réseau. Et bientôt, on aura les mêmes chiffres alarmants du côté des enseignants.

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Le ministre Drainville nous demande constamment de souligner les bons coups pour valoriser l’enseignement. J’aurais pu vous raconter une de ces belles histoires: celle d’une enseignante à Québec qui, par son dévouement constant, a réussi à tisser un lien précieux avec un élève, lui donnant ainsi la confiance nécessaire pour persévérer. Et croyez-moi, ces histoires, elles existent tous les jours dans nos écoles. Mais aujourd’hui, je fais le choix conscient de ne pas vous raconter cette histoire-là. Pourquoi? Parce qu’il faut enfin nommer clairement ce qui menace précisément ces histoires: les compressions budgétaires répétées qui affaiblissent notre réseau public.

Souligner les bons coups

Le ministre Drainville répète que le budget de l’éducation a augmenté de 58% depuis 2018. Il rappelle aussi que le Plan québécois des infrastructures (2025-2035) est passé de 9 à 23,5 milliards de dollars. Il nous rappelle le financement de 54 millions $ sur trois ans à Alloprof pour créer AlloFrançais. Ces initiatives sont positives, mais elles ne doivent pas servir d’excuse ou de diversion face à la réalité de notre système éducatif.

Et les mesures qu’on présente comme temporaires deviennent, peu à peu, la nouvelle norme. En cinq ans, on est passé de 450 à 2100 modules. L’ajout massif de classes modulaires dans les écoles du Québec n’est qu’un autre symptôme d’un problème systémique qui s’aggrave.

Ces chiffres deviennent vidés de sens lorsqu’on comprend que les écoles publiques vivent une forme de rationnement organisé. Ce qu’il faut surtout, c’est une véritable vision d’ensemble, cohérente, stable et durable. Quelle est notre vision pour nos écoles, comment assurer une amélioration constante, comment offrir enfin une stabilité à nos jeunes et aux professionnels qui les soutiennent au quotidien? Actuellement, rien ne permet d’entrevoir une telle vision.

Si on souhaite véritablement valoriser l’éducation, attirer et garder la relève, la solution coûteuse certes, mais rentable à long terme est: il faut cesser immédiatement les compressions déguisées, soutenir adéquatement les équipes-écoles, investir sérieusement dans les ressources humaines. Sans cela, les belles histoires de réussite de nos élèves qu’on aime tant célébrer vont disparaître, écrasées sous le poids d’un réseau affaibli et sous-financé. L’avenir de nos jeunes mérite mieux qu’un système d’éducation constamment au bord du gouffre.

Shophika Vaithyanathasarma
PhD Student in Curriculum & Instruction, Boston College
M.A Sciences de l’éducation, Université de Montréal

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