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L'article provient de Le Journal de Montréal
Affaires

Reporter la retraite à 62 ans ferait surtout mal aux plus vulnérables

Photo d'archives, Stevens Leblanc
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Photo portrait de Michel Girard

Michel Girard

2023-02-18T00:30:00Z
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Quelque 2,3 millions de travailleurs québécois, soit près d’un sur deux, ne participent à aucun régime de retraite, même pas à un REER. Cela inclut 1,64 million de travailleurs dont le revenu est sous les 30 000 $ et 428 100 avec un revenu de 30 000 à 50 000 $. Pas de doute que la retraite s’annonce financièrement pénible pour une grande portion de ces gens.

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Si le gouvernement Legault s’entête à reporter de 60 à 62 ans l’âge minimal d’admissibilité à la rente du Régime de rentes du Québec (RRQ), il va financièrement pénaliser beaucoup de monde, dont les gens à faible revenu et ceux à la santé fragile.  

C’est ce qui ressort d’un grand nombre de mémoires qui ont été déposés lors de la consultation publique sur le RRQ que le ministre des Finances, Eric Girard, a tenue dans le but de réformer le régime populaire.  

Ainsi, si vous faites partie des gens à faible revenu ou à la santé fragile, vous avez grandement intérêt à commencer à retirer vos prestations du RRQ le plus tôt possible, c’est-à-dire dès que vous avez atteint l’âge d’admissibilité à la rente de retraite du RRQ, à savoir 60 ans.  

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La rente sera moins généreuse, car elle sera amputée, et ce, à raison de 7,2 % par année qui précède l’atteinte de 65 ans. En 2023, par exemple, au lieu d’avoir accès à une rente « maximale » de 15 679 $ à 65 ans, la personne de 60 ans pouvait retirer 10 035 $, donc 5644 $ de moins.  

Précision importante : dans le cas des gens à faible revenu, la rente du RRQ est nettement inférieure à ces montants. 

Mettons qu’une personne à faible revenu avait droit à la moitié de la rente maximale, soit 7840 $ par année à partir de ses 65 ans, si elle décidait d’encaisser sa rente à compter de 60 ans, elle encaisserait 5018 $.  

Si elle attendait deux années de plus, soit à 62 ans, la rente serait un peu plus généreuse. Mais quand votre revenu est faible, il est évident que vous avez besoin de la moindre source de revenus pour pouvoir survivre financièrement. Attendre n’est pas une option pour ces gens. 

Doublement pénalisés

Autre important facteur dont il faut tenir compte : si la personne au revenu faible attend l’âge de ses 65 ans pour commercer à encaisser sa rente du RRQ, elle va se faire pénaliser par le gouvernement fédéral.  

Il faut savoir que les gens à faible revenu de 65 ans et plus ont droit au SRG (supplément de revenu garanti), lequel s’élève présentement à 12 324 $ l’an.   

Le problème ? La rente du RRQ, dans le cas d’une personne célibataire, aura pour effet de réduire le montant du SRG de 50 cents par dollar de revenu du RRQ. Concrètement, plus le rentier à faible revenu reporte l’accès à sa rente du RRQ, plus sa rente va se faire gruger par le fédéral.  

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Cela revient à dire que sa rente du RRQ sera « imposée » au taux d’imposition de 50 %, soit un taux plus élevé que les contribuables les plus riches.  

Toute rente du RRQ encaissée avant de commencer à recevoir le SRG à 65 ans ne sera donc pas pénalisée.  

Santé fragile

Et concernant les gens qui ont des problèmes de santé, en quoi est-il avantageux de commencer à percevoir ses prestations du RRQ à partir de 60 ans ?  

Le proverbe « un tiens vaut mieux que deux tu l’auras » fait ici office de bon conseil. Quand notre espérance de vie est écourtée par la maladie, on a avantage à encaisser sa rente du RRQ au plus sacrant.    

Compte tenu des conséquences financières que le report de 60 à 62 ans de l’admissibilité à la rente du RRQ aura sur ces deux vulnérables groupes de retraités, les pauvres et les gens à la santé fragile, le gouvernement Legault doit renoncer à cette proposition et ainsi conserver le statu quo.  

Les gens resteront ainsi libres de choisir de commencer à retirer leurs prestations du RRQ à partir de 60 ans ou un peu plus tard.  

Mais, les biens nantis...

Attendre le plus longtemps possible avant de commencer à percevoir ses prestations du Régime de rentes du Québec (RRQ), c’est financièrement une bonne affaire quand on a les moyens de se le permettre et qu’on est en bonne santé !  

Pourquoi ? Parce que vous allez bénéficier d’une intéressante bonification de la rente, soit de 8,4 % par année pour chacune des cinq années suivant vos 64 ans, ce qui représente une bonification potentielle de 42 %.  

Cette année, par exemple, la rente annuelle maximale à 65 ans est actuellement de 15 679 dollars. La personne qui a attendu d’avoir 70 ans pour commencer à retirer sa rente recevra 22 264 $, soit 6585 $ de plus. Et ce surplus lui sera versé chaque année jusqu’à son décès.  

Par ailleurs, que le gouvernement veuille reporter de 70 à 75 ans l’âge maximal du début des prestations du RRQ, cela répondra sans doute aux intérêts financiers des retraités bien nantis et en santé.  

Ils bénéficieraient d’une autre alléchante bonification de leurs rentes.

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