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L'article provient de Le Journal de Montréal
Affaires

Réplique à Donald Trump: pas toujours facile de savoir si un produit est vraiment canadien

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Gabriel Côté

2025-02-04T05:00:00Z
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Tourner le dos aux produits américains à l’épicerie est plus facile à dire qu’à faire, alors que la provenance des aliments est souvent mal indiquée dans les rayons et sur les emballages.

Depuis quelques jours, les allées d’épicerie ont pris des airs de sites archéologiques. Penchés devant les étalages, bien des clients déterminés à éviter tout ce qui provient des États-Unis prennent le soin de lire attentivement toutes les étiquettes, dans une surprenante immobilité.

«Pourquoi les supermarchés n’identifient pas de façon évidente ce qui vient des États-Unis? s’interroge Claude Lefebvre, croisé par Le Journal dans une épicerie de Longueuil, en train de vérifier l’étiquette des bananes bio. Ça nous épargnerait d’avoir à vérifier chaque fois... parce que ce n’est pas toujours évident», déplore-t-il.

«Voyons, ça vient d’où ça ?» pestait un autre homme dans la cinquantaine que Le Journal a surpris dans une épicerie de Québec.

De fait, le défi est de taille, car certaines denrées donnent faussement l’impression de venir d’ici.

Rester aux aguets

C’est le cas, pour ne donner qu’un exemple, de plusieurs produits de marque Le Choix du Président ou Sans nom, qui sont la propriété de Loblaw, une entreprise canadienne.

Ce gruau de marque canadienne provient des États-Unis.
Ce gruau de marque canadienne provient des États-Unis.

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«Pour ces produits, c’est difficile de savoir ça a été fait où exactement et qui est derrière ça, reconnaît le professeur d’économie appliqué Maurice Doyon. C’est un peu obscur, et ça n’aide pas à faire des choix, c’est certain.»

Le ketchup, le gruau, les céréales, les vinaigrettes, plusieurs variétés de biscuits, certains produits nettoyants, le maïs soufflé, le mélange à crêpes et même le macaroni au fromage s’avèrent tous, après un examen minutieux de chaque boîte, provenir des États-Unis.

Ces vinaigrettes Le Choix du Président sont de marque canadienne, mais elles viennent des États-Unis.
Ces vinaigrettes Le Choix du Président sont de marque canadienne, mais elles viennent des États-Unis.

La provenance d’autres articles, comme des sauces ou des repas congelés, n’est quant à elle pas précisée sur l’emballage.

Enfin, certains produits disposent d’une certification canadienne attestant qu’ils sont bel et bien biologiques, même si, en réalité, ils viennent d’ailleurs. La présence d’une feuille d’érable sur l’emballage est susceptible de tromper la vigilance des consommateurs inattentifs.

Ce ketchup de marque canadienne vient des États-Unis.
Ce ketchup de marque canadienne vient des États-Unis.
Un panier 100% canadien, c’est possible?

Dans ce contexte, est-il possible de n’acheter que des produits canadiens à l’épicerie? «Ça dépend du niveau d’engagement qu’on peut prendre», songe M. Doyon.

«Il y a certains produits qui ne peuvent tout simplement pas venir d’ici, comme le jus d’orange. Si j’en ai absolument besoin, je peux favoriser une entreprise québécoise ou canadienne qui est impliquée dans le jus d’orange, mais ça ne changera pas le fait que les oranges ne poussent pas chez nous.», explique-t-il.

«Mais y a-t-il moyen de savoir d’où provient le concentré d’orange, que ce soit de la Floride ou de l’Espagne? Cette information-là n’est pas facile à obtenir, et ce n’est pas en allant faire son marché qu’on va la trouver», ajoute l’économiste.

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Des épiciers au front

Le désir des consommateurs d’acheter des produits locaux a d’ailleurs encouragé certains épiciers à identifier clairement les produits canadiens et québécois, pour inciter à l’achat local alors que plane toujours la menace de tarifs douaniers sur divers produits imposés par les États-Unis.

«En fin de semaine, on a remarqué que les gens regardaient beaucoup les étiquettes, et on a eu une vingtaine de demandes pour que ce soit mieux identifié dans la journée de dimanche seulement, alors on a eu cette idée-là», souligne le propriétaire du IGA Extra Famille Viau, Alexandre Viau.

Maurice Doyon estime que ce genre d’initiative risque de provoquer une vague, et que d’autres épiciers vont eux aussi mieux identifier la provenance de leurs produits.

«Il va y avoir une pression auprès des distributeurs pour améliorer la quantité d’information disponible, notamment à savoir si c’est un produit américain ou non, prévoit l’économiste. Si un détaillant le fait, les autres vont embarquer.»

Avec la collaboration de Louis-Philippe Messier

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