Entente de 100M$ entre Ottawa et Google pour le journalisme
Raphaël Pirro
Après des mois de dures négociations, le gouvernement Trudeau est parvenu à arracher une entente à Google, qui versera pas moins de 100 millions $ aux médias du pays chaque année.
«Ça fait des mois qu’on tient tête pour démontrer qu’on doit appuyer le journalisme local, le journalisme indépendant et le travail que font les médias dans notre démocratie. Ç’a pas été facile», s’est réjoui Justin Trudeau mercredi.
Le montant de 100 millions $ sera indexé à l’inflation et versé annuellement à un collectif qui rassemblera l’ensemble des médias admissibles. Ce collectif déterminera au moment opportun de quelle manière seront coupées les parts du gâteau.
Cette nouvelle devrait donner une bouffée d’oxygène au gouvernement, Google ayant récemment menacé de marcher sur les traces de Meta en bloquant le contenu journalistique de son moteur de recherche et de ses autres produits.
«C’est vraiment historique et quelque chose de nouveau qui est introduit dans le monde. Beaucoup pensaient d’ailleurs qu’on n’y arriverait pas [...]», a lancé la ministre du Patrimoine, Pascale St-Onge, qui pilote le dossier depuis le mois de juillet.
Meta «abdique»
La bonne entente n’est toutefois pas au rendez-vous avec l’autre poids lourd visé par la Loi sur les nouvelles en ligne, Meta, qui a éliminé les nouvelles de ses plateformes Facebook, Instagram et Threads en août.
Dans un courriel, un porte-parole de la multinationale a expliqué que la seule manière de se conformer à la Loi était de retirer les nouvelles de sa plateforme, puisque «contrairement aux moteurs de recherche [comme Google], nous ne puisons pas de manière proactive des nouvelles sur l'internet pour les intégrer dans le fil d'actualité de nos utilisateurs».
M. Trudeau a accusé la multinationale d’avoir «complètement abdiqué à ses responsabilités en tant que géant du web».
Écoutez l’expert en commercialisation et en technologies et coanimateur du balado Prends pas ça pour du cash réagir à la nouvelle, disponible en balado ou en audiovisuel.
Une craque dans le mur
Plutôt prudent, le chef du Bloc Québécois, Yves-François Blanchet, s’est tout de même dit «content» d’un résultat dans lequel le parti «se reconnaît quand même».
Le chef adjoint du NPD, Alexandre Boulerice, a salué un «pas dans la bonne direction». «Ça vient peut-être ajouter de la pression sur Facebook, parce que là, s’il y a une entente avec Google, ça veut dire que le mur des géants du web vient de craquer.»
La Fédération professionnelle des journalistes du Québec a souligné une «excellente nouvelle» pour le milieu, qui «souffre de la domination presque totale des géants du web dans le marché publicitaire au Canada».
«Toute la pression est maintenant sur Meta, qui a l’occasion de montrer qu’il peut être un bon citoyen corporatif au Québec et au Canada», a poursuivi le président Éric-Pierre Champagne sur X.
Des questions en suspens
Les détails de l’entente émergeront au cours des prochaines semaines et des prochains mois. Une version finale des règlements de la Loi est attendue avant le 19 décembre, date d’entrée en vigueur de la loi C-18 sur les nouvelles en ligne.
Pour l’instant, il est impossible de savoir si oui ou non Radio-Canada/CBC pourrait avoir sa part de la cagnotte, la société d’État étant déjà presque entièrement financée par le public. «Je peux dire qu’on a considéré très sérieusement les commentaires concernant notre diffuseur public», a dit la ministre St-Onge.
Cette dernière a indiqué que le gouvernement se gardait le droit de renégocier l’entente si jamais une autre entente plus avantageuse émergeait ailleurs dans le monde.
À voir aussi:
Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?
Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.