Rebecca Makonnen ne pense pas écrire à nouveau

Le Québec la regarde à la télévision et l’écoute à la radio depuis l’an 2000. De jeune femme qui rencontre les grands noms de la scène musicale internationale à MusiquePlus jusqu’à l’animatrice d’expérience tenant la barre d’émissions radiophoniques abordant des sujets culturels et sociaux, Rebecca Makonnen a toujours su partager son enthousiasme pour la découverte de personnes extraordinaires. Elle a récemment publié Dans mon sang, un livre d’autofiction qui remonte le fil de ses origines, en particulier celles de sa mère, Québécoise, et de son père, Éthiopien. Nous l’avons rencontrée afin de discuter avec elle du parcours qui l’a menée vers sa quête identitaire.
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Les jeunes d’aujourd’hui peuvent difficilement comprendre à quel point MusiquePlus, c’était énorme, au Québec, à la fin des années 1990 et au début 2000. C’est là que vous avez commencé votre carrière, devant les caméras, à 20 ans! Qu’est-ce que ça vous fait de repenser à cette période de votre vie, près de 20 ans plus tard?
J’étais vraiment de la génération MusiquePlus. Dès mon retour de l’école, en rentrant à la maison, je faisais mes devoirs en regardant des vidéoclips! Je me disais, en voyant les VJ: «Ç’a vraiment l’air le fun de faire ce métier, de poser des questions à des artistes!» J’ai donc vraiment été chanceuse, à ce moment-là dans ma vie, de savoir ce que je voulais faire plus tard, c’est-à-dire tendre un micro et poser des questions! À 19 ans, j’ai tenté ma chance pour devenir VJ à mon tour. J’y ai travaillé hors d’ondes pendant une année et demie avant d’avoir ma chance devant les caméras. Par la suite, j’ai eu l’emploi le plus plaisant qui soit pour passer le début de ma vingtaine. L’industrie de la musique n’était pas encore en crise et j’ai donc pu faire des voyages à Londres, à Los Angeles, à Paris et à maints autres endroits dans le monde pour aller à la rencontre des plus grands noms, comme U2, Pearl Jam, Coldplay, Gwen Stefani, Metallica, les Red Hot Chilly Peppers... C’était vraiment un privilège, un milieu incroyable pour apprendre le métier, souvent en parlant anglais, sans filet et en direct! Le fait d’être parfaitement bilingue m’a beaucoup aidée. Je remercie ma mère de m’avoir envoyée l’été chez ma tante, en Nouvelle-Écosse, pour apprendre à parler l’anglais...
Par la suite, vous avez eu une carrière d’animatrice à la radio, surtout à Radio-Canada. Comment s’est faite cette transition de passer des projecteurs de la télévision à un média, disons, moins glamour et imagé?
C’est René Homier-Roy qui m’a ouvert cette porte, en me demandant d’être chroniqueuse culturelle à son émission quotidienne C’est bien meilleur le matin. À cette époque, j’étais super naïve. Je me demandais comment c’était possible de raconter des choses de manière intéressante sans avoir recours aux images. J’avais encore un apprentissage à faire. J’ai finalement compris que la radio, c’est vraiment un média de proximité. Avec le temps, j’ai développé une relation d’amour avec la radio. Ça a quelque chose de magique. C’est en animant l’émission On dira ce qu’on voudra (de 2016 à 2022), où je discutais de sujets sérieux avec des personnes importantes, que j’ai commencé à me sentir... utile! Avoir des discussions sur les sujets de la culture et de la société avec des gens qui ont un impact, sans nécessairement passer par le showbiz, je trouve ça super intéressant. Aujourd’hui, avoir de grands entretiens avec des acteurs de changement, je trouve ça fascinant, ça me comble. Une heure de discussion, aller au fond des choses avec une seule personne, ça n’existe plus vraiment à la télé, mais la radio permet de le faire.
Vous avez cette passion pour la découverte des autres. Or, avec votre tout premier livre, Dans mon sang, le sujet de votre exploration a été votre propre famille. Dans un style qui ressemble à un récit enlevant qui contient des surprises et des rebondissements, vous partagez avec les lecteurs vos réflexions, on dirait presque en temps réel, lors de votre quête personnelle concernant vos origines et celles de vos parents. Comment ce projet est-il né?
C’était lors des funérailles de ma mère, en novembre 2011. On a rendu hommage à son vécu. Un ami est venu me voir, après la cérémonie, pour me dire à quel point il était impressionné par la vie qu’elle a menée, par son autonomie. Il a trouvé ça remarquable, ce qu’elle a fait, entre autres de quitter son Nouveau-Brunswick natal pour aller vivre avec mon père en Éthiopie, un pays où elle ne connaissait personne. Ce témoignage a allumé une petite étincelle en moi. Je me suis dit: «Hé, c’est vrai que ce n’est pas banal!» J’avais beaucoup de peine à l’époque, avec le décès de ma mère, et mon père était aussi décédé depuis plusieurs années... Ça m’a pris beaucoup de temps, je devais trouver du courage pour enfin me donner la permission d’aller à la découverte de leur passé. On l’oublie facilement, mais nos parents ont eu des vies avant de nous avoir, et ce vécu a une influence indéniable sur ce que nous devenons par la suite. Mes parents étaient des gens remarquables. Je m’ennuie constamment d’eux. En racontant leur histoire en 225 pages, c’était comme une manière de les faire revivre. Pour moi, c’était thérapeutique à 100 %. Depuis la sortie du livre, des gens de milieux complètement différents du mien m’ont dit à quel point mon récit les a touchés. La famille, l’enfance, la vérité, l’empathie, la responsabilisation, ce sont les thèmes principaux du livre. Ils sont profondément humains et ça touche tout le monde.
Comment avez-vous trouvé cette expérience d’écriture?
Je ne suis pas écrivaine ni romancière, alors trouver les bons mots pour décrire les bonnes émotions, c’était pénible! Tout le processus m’a pris environ deux ans. J’étais plongée dans ma quête de vérité. J’ai appris plein de choses et j’ai écrit pour amener les gens avec moi. C’était super intimidant, mais je suis très heureuse de l’avoir fait. Or je ne pense pas écrire à nouveau bientôt, car j’ai tout donné!
Dans mon sang, de Rebecca Makonnen, est publié aux éditions Libre Expression.