Radio-Canada contre la diversité


Sophie Durocher
Radio-Canada aime la diversité. Enfin, tant que c’est la diversité ethnique ou la diversité d’orientations sexuelles. Mais Radio-Canada n’aime pas la vraie diversité, c’est-à-dire la diversité d’opinions.
Ça fait des années que je le dis. Mais quand ce sont les Radio-Canadiens eux-mêmes qui le disent, ça a plus de poids.
Cette semaine, un animateur-vedette de CBC a démissionné en dénonçant l’absence de diversité d’opinions à la société d’État. J’ai vraiment eu envie de m’écrier: «Il était temps!»
DES ANIMATEURS MUSELÉS?
Le 8 juillet, on a appris que Travis Dhanraj a démissionné de CBC, qu’il accusait d’être un diffuseur biaisé, où ne règne aucune diversité d’opinions et qui est complètement déséquilibrée dans sa couverture politique. (Je vous laisse deviner de quel bord ça penche...)
Dhanraj affirme qu’il voulait, à son émission, Canada Tonight, recevoir des invités de tous les horizons. Donc autant des conservateurs que des libéraux. Des gens de droite autant que des gens de gauche. Des gens qui vont à contre-courant autant que des gens qui nagent en banc de poissons. «J’ai œuvré pour mettre en valeur les histoires sous-représentées, favoriser l’équilibre politique et défendre les valeurs journalistiques que les Canadiens attendent de leur radiodiffuseur public», a déclaré Dhanraj dans sa lettre de démission.
«Mais ce qui se passe en coulisses à CBC contredit trop souvent ce qui est présenté au public. Diversité de façade, gestes symboliques, un système conçu pour valoriser certaines voix et en minimiser d’autres.»
Et il conclut: «Je me suis battu pour un certain équilibre mais on m’a accusé de partir en croisade.»
C’est quand même assez hilarant. Voilà un diffuseur dont les animateurs sont des militants de gauche. Toujours en train de pencher du même bord. Et ce sont ceux qui tentent de donner la parole à une variété de voix qui se font accuser... d’être des militants!
Vous savez quel a été le tournant pour Dhanraj? Quand il a critiqué ouvertement la décision de la présidente Catherine Tait de défendre les bonus des cadres tout en coupant dans les emplois. Il dit qu’il a été victime de représailles, que CBC a lancé une enquête sur sa prise de position et lui a demandé de signer un accord de non-divulgation, ce qu’il a refusé de faire.
Cet homme a 20 ans de carrière. Il a travaillé pour un tas de médias différents au Canada anglais. C’est un fils d’immigrants de Trinidad, une minorité visible, donc un représentant de la fameuse «diversité» tant vantée par CBC et Radio-Canada.
Mais CBC était plus intéressée par un éventail de couleurs de peau que par un éventail de pensées. Un spectre de genres, mais pas un spectre d’idées.
UN MÉDIA OBJECTIF?
J’ai très hâte qu’un animateur de Rad-Can claque la porte avec fracas en dénonçant l’homogénéité de la pensée chez ce diffuseur qui, je vous le rappelle, est payé avec nos impôts.
Ça fait des années que des commentateurs dénoncent la fausse neutralité de Radio-Canada, de ses animateurs qui ne se cachent même pas pour appuyer les libéraux et mépriser les conservateurs.
Maintenant que Dhanraj a confirmé tout haut ce que beaucoup pensent tout bas, la société d’État est-elle prête pour un vrai examen de conscience?