Quoi faire si on n’a plus les preuves de paiement d’hypothèque?

Emmanuelle Gril
Un lecteur qui a acheté sa résidence il y a 47 ans n’a plus les preuves de paiement d’hypothèque. Que devrait-il faire?
L’un de nos lecteurs nous a écrit pour nous soumettre son cas. Pour simplifier, mentionnons que lorsqu’il a acheté sa résidence à l’époque, il a assumé le prêt hypothécaire du vendeur, car il ne restait que peu à payer et le taux d’intérêt était intéressant. Il a aussi contracté une hypothèque à son nom pour compléter la somme requise pour l’achat de la propriété.
Aujourd’hui, notre lecteur souhaite léguer sa maison aux membres de sa famille à son décès. Or, en cherchant dans ses documents, il a constaté qu’il ne trouve aucune trace de preuves indiquant qu’il a bel et bien payé les deux prêts hypothécaires. Il se demande ce qu’il adviendra si ses héritiers décident de vendre la propriété et que l’acheteur potentiel souhaite obtenir des titres clairs et sans ambiguïté. Comment procéder?
L’effet du temps
Me Isabelle Couturier, notaire, Équipe Couturier Hotte Notaires à Terrebonne, a pris connaissance de la question de notre lecteur. Elle souligne que ce dernier ne devrait pas s’inquiéter. «En effet, selon les articles 2799 et 3058 du Code civil du Québec, lorsqu’une hypothèque immobilière a plus de 30 ans, elle n’est plus applicable. Cela signifie qu’elle s’est éteinte par l’écoulement du temps», explique-t-elle. C’est ce que l’on appelle la péremption trentenaire, en d’autres termes, elle est éteinte, car 30 ans se sont écoulés depuis son inscription ou après l’inscription d’un avis qui lui donne effet ou la renouvelle.
Me Couturier mentionne qu’il y a deux écoles de pensée. «Soit le notaire décide de laisser les choses telles, ou bien il pourrait vouloir obtenir une radiation. Cette radiation peut s’obtenir par dépôt de la preuve de péremption ou de façon usuelle par la signature du créancier, cette dernière pourrait être plus ardue», précise-t-elle.
Elle ajoute toutefois que la tendance actuelle est plutôt de laisser les choses en l’état, et que le notaire va simplement indiquer dans l’acte de vente de la propriété que celle-ci est libre d’hypothèques. «Il n’est pas nécessaire de porter à la fois une ceinture et des bretelles! La radiation par l’effet du passage du temps est suffisante», affirme-t-elle.
• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission d’Isabelle Maréchal, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
Précisons qu’au Registre foncier du Québec, les notaires peuvent consulter toutes les transactions relatives à un immeuble depuis la création du registre, en 1841. Lorsqu’il effectue une recherche de titre sur un bien immobilier, le notaire remonte habituellement jusqu’au 1er janvier 1964 pour tout ce qui concerne le transfert de propriété (vente, donation, cession), et même jusqu’à la création du cadastre lorsqu’il est question de servitude, un droit de passage par exemple.
Un travail minutieux
La notaire rappelle que contrairement à ce que l’on pourrait croire vu de l’extérieur, le travail du notaire sur un dossier d’achat de bungalow par exemple, même très simple, nécessitera de 10 à 15 heures. Il doit en effet vérifier que tous les titres et autres documents du vendeur sont en règle et s’assurer que les taxes municipales et scolaires sont à jour. Il doit aussi réclamer les états de compte au créancier et préparer l’acte de radiation.
Puis il rédigera l’acte de vente et l’acte d’hypothèque en se basant sur les conditions indiquées dans l’offre de vente et sur les instructions du créancier. Ensuite, il recevra les montants d’argent (mise de fonds et financement hypothécaire) dans son compte en fidéicommis.
Après la signature de l’acte d’hypothèque et de l’acte de vente, le rôle du notaire ne s’arrête pas là. Il doit aussi publier ces actes au registre foncier, émettre les chèques pour rembourser le créancier hypothécaire et enfin envoyer la quittance pour signature.
«Ces démarches peuvent souvent être plus complexes, dans le cas d’une copropriété notamment. Ces dernières années, on a aussi assisté à un allongement de certains délais, par exemple pour obtenir le solde du vendeur auprès de l’institution financière. Cela peut prendre jusqu’à sept jours alors que l’on parlait plutôt d’un ou deux jours autrefois», dit-elle.
CONSEILS
- Si vous comptez acheter une propriété, ne vous y prenez pas au dernier moment pour contacter le notaire. Ce dernier aura besoin d’un délai d’au moins deux semaines avant la transaction, temps nécessaire pour effectuer les démarches requises.
- Certains moments de l’année sont plus occupés que d’autres pour les notaires, notamment le printemps, en raison des nombreux achats de propriétés mais aussi des refinancements hypothécaires.
- La période des vacances de la construction est celle durant laquelle de nombreux notaires ferment leur bureau. Si vous comptez acheter une propriété à ce moment-là, assurez-vous d’avoir réservé votre notaire.