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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Quelques hôtels fameux de La Havane

L’hôtel Nacional de La Havane.
L’hôtel Nacional de La Havane. Photo ADOBE STOCK
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Photo portrait de Jacques Lanctôt

Jacques Lanctôt

2025-09-20T04:00:00Z
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Ce n’est pas le plus moderne, ni le plus haut, ni le plus confortable, ni le plus luxueux, ni le plus high-tech, mais c’est le plus créole, le plus noble, le plus majestueux, le plus connu de La Havane et de tout Cuba. Il s’agit de l’hôtel Nacional, et si un jour vous visitez cette ville merveilleuse, ne manquez pas de faire un détour par le quartier Vedado pour admirer ce joyau classé patrimoine national.

Ce petit bijou de La Havane, qui combine différents styles architecturaux, est érigé face à la mer et au fameux Malecon – ce front de mer qui accueille amoureux, musiciens, promeneurs esseulés et pêcheurs à la ligne – et construit sur un promontoire qui domine la baie havanaise. Une position stratégique qui permettait la défense de la ville contre les incursions de pirates dans un autre siècle. D’ailleurs, si vous vous promenez dans son magnifique jardin côté mer, vous pourrez encore admirer sa batterie de canons espagnols et ses tranchées converties en petit musée sur la crise des missiles d’octobre 1962.

Tout au long de son existence – le Nacional a ouvert ses portes le 30 décembre 1930 –, cet hôtel a hébergé des personnalités aussi diverses que le roi d’Angleterre Édouard VII, Ava Gardner, Frank Sinatra, Graham Greene, Gabriel García Márquez, Robert Redford, Benicio del Toro, Steven Spielberg, l’écrivain cubain Alejo Carpentier, Jean-Paul Sartre, l’actrice mexicaine María Félix, le chanteur mexicain Jorge Negrete, Pierre Cardin, Nat King Cole, etc. Et j’ajouterais, en toute modestie, notre petit groupe du FLQ durant notre exil cubain, parmi d’autres révolutionnaires et guérilleros d’Amérique latine, dans les années 1970. Il y a même une «galerie de la renommée», où l’on peut admirer des photos de ces gens célèbres.

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Plusieurs événements, certains tragiques, d’autres peu honorables, y ont eu lieu. On raconte qu’en 1934, un président de la République a prêté serment dans la chambre 412, qui était éclairée à la chandelle parce qu’on y avait coupé l’alimentation électrique. Il ne sera président que six heures. Un an auparavant, en 1933, 400 officiers de l’armée qui venaient d’être destitués et qui s’étaient réfugiés dans l’hôtel y ont été délogés à coups de canon. En décembre 1946, Lucky Luciano, le chef de la mafia, y convoqua une grande réunion pour discuter de projets de casinos et autres maisons de jeux à Cuba.

Ses nombreuses salles de conférence servent à convoquer aussi bien des amateurs de cinéma que de jazz ou de foires touristiques. Vous y dégusterez un des meilleurs mojitos de La Havane, confortablement installés dans un des fauteuils qui bordent le jardin côté cour, face à la mer, ou dégusterez une langouste grillée sur charbon de bois dans le restaurant du jardin. Et si vous voulez profiter de la piscine, il ne vous en coûtera que quelques dollars pour y passer une agréable journée.

Si l’hôtel Nacional est le plus somptueux et le plus créole, l’hôtel Inglaterra est certes le plus ancien de Cuba. Il a été inauguré un 23 décembre 1875 et il peut, lui aussi, se vanter d’avoir hébergé d’illustres personnalités, du jeune Winston Churchill venu y célébrer ses 21 ans (il n’était pas encore premier ministre) au grand ténor italien Enrico Caruso en passant par l’actrice française Sarah Bernhardt, qui vécut dans ses murs une passion fulgurante avec Luis Mazzantini, un fameux toréador espagnol. On raconte qu’alors que le toréador était en train de fumer sur la terrasse de l’hôtel, elle l’aurait abordé en lui demandant de lui apprendre à fumer... mais pas en public, car c’était mal vu pour une femme (ce «mal vu» dura jusqu’aux années 60 et même 70, rappelez-vous). Les cours durèrent une semaine, à raison d’une nuit dans la chambre de l’actrice et d’une nuit dans la chambre du toréador.

La cuisine de l’Inglaterra avait une excellente réputation. La grande bourgeoisie venait s’y restaurer assidûment, et l’argenterie était à l’honneur pour le service sur place. On pouvait aussi y commander un buffet, à l’occasion de fêtes et d’anniversaires, qu’on livrait à domicile. Aujourd’hui encore, cet hôtel attire de nombreux touristes en raison de son emplacement, près du Capitolio et face au Parque central. Tous les jours, une flotte de voitures anciennes décapotables, de différentes couleurs, y est stationnée pour offrir aux touristes une balade dans les rues de la capitale dont ils se souviendront longtemps.

D’autres hôtels ont aussi hébergé des personnalités diverses du monde littéraire et artistique ainsi que de la mafia, comme le Florida, le Capri, Ambos Mundos, le Riviera, le Colina, le Presidente, le Victoria, etc. J’y reviendrai.

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