Qu’attend-on pour réviser le programme d’univers social au primaire?

Collectif de signataires
En 2013, la consultation pour le renforcement de l’enseignement de l’histoire nationale a donné lieu, en 2016, à une révision du programme du secondaire. Pour le primaire, pour le cours d’histoire, de géographie et d’éducation à la citoyenneté, l’Univers social (US), on attend toujours!
Alors que le ministère de l’Éducation a réalisé une veille sur le programme d’US du primaire, nous lui demandons de le réviser. Cela devient urgent.
Au premier cycle du primaire, le programme actuel (amenant les élèves à s’approprier les concepts de temps, d’espace et de société) est pertinent sauf qu’aucun temps d’enseignement n’est prescrit! Pour les 2e et le 3e cycles où l’enseignement est obligatoire, le programme fait carrément obstacle aux apprentissages des élèves. La trame historique est calquée sur celle que l’on retrouvera au secondaire. Elle débute avec les années 1500.
Non-sens didactique
Or, comment comprendre que l’étude des contenus les plus anciens et les plus éloignés de la réalité des enfants soit prescrite pour les plus jeunes d’entre eux (8-10 ans), et que les années plus «récentes» (les années 1980!) soient réservées aux plus grands (de 6e année)? C’est un non-sens didactique! Il importe de respecter leurs capacités d’entendement.
Pour la géographie, c’est aussi problématique. On prescrit l’étude de territoires passés. Or la géographie est une science du présent! On ne procure pas l’occasion de développer une bonne compréhension des territoires qui composent le Québec d’aujourd’hui. Alors qu’on devrait susciter le raisonnement des élèves sur des questions importantes pour leur collectivité.
D’autres raisons militent en faveur de la révision du programme d’US dont la quasi-absence de personnages féminins ou de ceux issus des Premiers peuples ou de l’immigration; la présence de termes considérés comme péjoratifs ou non-scientifiques (les «Amérindiens»); et tel que mentionné précédemment, la redondance avec le cours d’histoire nationale du secondaire.
Pertinence
Bref, il importe de redéfinir de manière pragmatique les visées du programme d’histoire et de géographie au primaire afin que se constitue un bagage culturel commun et que se réalise une véritable formation au raisonnement sur la vie en société, en prise sur les réalités passées et présentes du Québec. Entretemps, sans cette révision cruciale et sans plus d’heures qui lui soient allouées, le programme existe, certes, mais il est peu enseigné. Et lorsqu’il l’est, il prend trop souvent la forme d’une transmission de connaissances factuelles au sujet d’un passé qui demeure abstrait, procurant peu d’occasions que cela fasse sens pour les élèves, au risque de véhiculer des stéréotypes.
Actualiser le programme d’US au primaire conduirait à redonner à l’histoire et à la géographie leur pertinence, et à créer de nouvelles opportunités pour que les jeunes saisissent leur ancrage dans leur environnement régional et se projettent dans l’avenir comme membres d’une communauté locale et nationale. Ainsi, nous pourrons mieux les former à comprendre le parcours et les enjeux auxquels font face la société au sein de laquelle ils sont appelés à évoluer, et à faire évoluer.
- Marie-Claude Larouche, professeure titulaire, UQTR
- Pierre-Luc Fillion, professeur adjoint, Université Laval
- Catinca Adriana Stan, professeure agrégée, Université Laval, didacticiens de l’univers social
Et 18 collègues signataires:
- Vincent Boutonnet, directeur et professeur, Université du Québec en Outaouais
- Marie-Hélène Brunet, professeure, Université d’Ottawa
- Émile Caron, étudiant au doctorat, Université de Montréal
- Marc-André Éthier, professeur, Université de Montréal
- Geneviève Goulet, enseignante au secondaire, École Horizon Jeunesse
- Jean-Louis Jadoulle, professeur, Université TÉLUQ
- Margot Kaszap, professeure retraitée, Université Laval
- Audrey Lamontagne, technicienne de recherche et chargée de cours, Université de Montréal
- Dany Larouche, enseignant au secondaire, École secondaire l’Odyssée Lafontaine
- David Lefrançois, professeur, Université du Québec en Outaouais
- Virginie Martel, professeure, Université du Québec à Rimouski
- Ismaila Mbodj, enseignant chercheur, Université cheikh anta diop de dakar
- Daniel Moreau, professeur, Université de Sherbrooke
- Laurence Murray-Dugré, conseillère pédagogique et chargée de cours, Université du Québec à Trois-Rivières
- Michel P. Trudeau, chargé de cours, Université Laval
- Anne-Marie Paquet, étudiante au doctorat et chargée de cours, Université Laval
- Kevin Péloquin, professeur, Université de Montréal
- Gabriel Viens, enseignant au primaire, CSS Val-des-Cerfs