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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

Quand des patrons veulent laisser les travailleurs sur leur faim

Sébastien St-Jean / Agence QMI
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François Enault, 1er vice-président de la CSN

2025-07-18T04:00:00Z
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Dans une récente lettre ouverte, la présidente par intérim du Conseil du Patronat du Québec lance une énième salve contre les syndicats. Appelant d’une main à renouveler le dialogue social avec les organisations syndicales, elle dénigre de l’autre les revendications de milliers de travailleuses et de travailleurs pour obtenir de meilleures conditions de travail. 

Étrangement, cette missive parait au lendemain où la CSN vient de retirer le tapis sous le pied du milieu patronal. Depuis des mois, l’Institut économique de Montréal, des chroniqueurs et même le ministre du Travail martèlent sur toutes les tribunes que le Québec serait le champion des grèves.

Il n’en est rien. Le chiffre évoqué frôlait d’ailleurs le ridicule. En 2024, il y aurait eu 759 grèves au Québec. En réalité, il y en a eu 208... C’est pourtant cette donnée qui a servi d’argument principal au ministre Jean Boulet pour justifier l’adoption de son projet de loi 89 inconstitutionnel qui fait tant plaisir aux employeurs en restreignant le droit de grève.

Inflation

Si plusieurs conflits de travail ont lieu dans les dernières années, c’est que des milliers de travailleurs ont vu leur pouvoir d’achat diminué en raison de l’inflation. Au cœur de plusieurs négociations vient donc la question du partage des profits. Les négociations syndicales permettent hier comme aujourd’hui de réduire les inégalités sociales.

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Qu’en est-il de la responsabilité des employeurs? Quand des salariés font le choix difficile d’exercer la grève, ce n’est pas de gaieté de cœur. Quand on regarde de près les conflits récents, on fait souvent face à des négociations qui durent depuis des mois ou encore à des employeurs inflexibles qui restent campés sur leur position.

Comme si ce n’était pas suffisant, Marie-Claude Perreault utilise l’exemple du lock-out déclenché par Héroux-Devtek pour appuyer ses dires. Depuis une semaine, ces plus de 100 salariés ont été jeté à la rue par leur employeur. Tout ça après avoir exercé une seule journée de grève.

Le nœud du conflit est le rattrapage salarial. Ces travailleurs accusent un retard de 8 $ l’heure par rapport à leurs collègues du même employeur dans une usine de Longueuil et de 14 $ l’heure par rapport à Safran, une entreprise du même secteur. Dans le secteur aéronautique, ces salariés ont des salaires bien en deçà de la moyenne, ce qui nuit au recrutement et à la rétention. J’ose espérer que ce sont des questions qui préoccupent les employeurs.

Guerre commerciale

La guerre commerciale qui nous oppose à notre voisin du Sud explique finalement pourquoi il faudrait dénoncer les demandes des travailleurs. Au moment où les menaces de tarifs pèsent sur nos épaules, la seule voie serait d’offrir une main d’œuvre docile, à en croire le Conseil du Patronat.

Les politiques de l’administration Trump inquiètent et ébranlent le Québec. Ici comme ailleurs, la montée d’une droite dure s’accompagne d’attaques contre le filet social et les droits des travailleurs.

Et si une autre voie était possible? Pour la CSN, la guerre commerciale est un moment pour réfléchir au Québec qu’on veut.

Le Québec de l’avenir, on le veut au diapason des besoins des travailleurs. On le voit fier de consolider ses services publics et de bâtir une économie verte qui crée des emplois durables. On le voit surtout comme une occasion de mettre enfin le néolibéralisme là où il aurait toujours dû rester : dans les poubelles.

François Enault

1er vice-président de la CSN

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