Qatar 2022: la Croatie surprend le Brésil en quart de finale


Dave Lévesque
DOHA, Qatar | Le Brésil savait que c’était une mauvaise idée de se rendre en prolongation contre la Croatie et il en a payé le prix, subissant l’élimination en quart de finale lors de la séance de tirs au but remportée 4 à 2 par les Croates. Le score était égal, 1 à 1 après 120 minutes de jeu.
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Les Croates ont marqué à chacun de leurs quatre essais. Rodrygo a été arrêté par Dominik Livakovic dès le premier tir des Brésiliens. Après deux buts de ceux-ci, Marquinhos devait toucher les cordages pour garder les espoirs brésiliens en vie. Il a frappé le poteau.
Les Croates se sont mis à courir en direction de leur gardien, héros du match.
C’était pourtant clair que le Brésil devait éviter la prolongation face à la bande de Luka Modric. Celle-ci venait de remporter un second match de suite aux tirs au but, elle avait fait le coup au Japon en huitièmes de finale.
C’était par ailleurs la cinquième fois lors de leurs six derniers matchs à élimination directe que les Croates avaient besoin de la prolongation. Les Croates se sont rendus quatre fois aux tirs au but à la Coupe du monde, ils ont toujours gagné.

Livakovic brillant
Dominik Livakovic a connu un match du tonnerre avec 11 arrêts, un sommet dans un seul match à cette Coupe du monde.
Il s’est mis à se distinguer en seconde demie, quand les joueurs en jaune ont commencé à s’approcher un peu plus de son filet.
Un arrêt du bout du pied, un autre du talon face à Neymar, un arrêt sur Lucas Paqueta (deux fois plutôt qu’une) ou encore une sortie face à Neymar. Et il a stoppé Casemiro à bout portant dans les arrêts de jeu de la prolongation pour maintenir l’égalité.
Le gardien croate a gardé ses coéquipiers dans le coup pendant qu’ils encaissaient la pression brésilienne qui augmentait.
Parce que la Croatie est comme ça. Elle essaie de garder le milieu de terrain fermé le plus longtemps possible. Et quand ça commence à s’ouvrir, elle se replie en essayant de ne pas casser en attendant d’avoir une chance de remonter le terrain.

Buts tardifs
Le Brésil pensait que c’était dans la poche après un moment de grâce de Neymar dans le temps ajouté de la première période de prolongation (105 +1). Le Brésil brisait enfin l’égalité de 0 à 0.
La star du Paris Saint-Germain a foncé au but en flottant presque, tout en effectuant deux passes vers des coéquipiers qui lui ont rapidement remis le ballon chaque fois. Il s’est ainsi retrouvé seul devant Dominik Livakovic, qu’il a battu d’un tir haut. Et c’est ce que ça prenait parce que le gardien croate a été brillant.
Mais les Croates sont persistants, entêtés, résilients. Ils ont attaqué le filet d’Allison jusqu’à ce que Bruno Petkovic parvienne à créer l’égalité 1 à 1 à la 117e minute.
On dit ça comme ça, mais un but contre la Croatie, c’est aussi ce que le Canada a marqué. Et en temps régulier en plus. Oui, les comparaisons s’arrêtent là.

Deux styles
Ce quart de finale a mis en opposition deux styles complètement différents.
D’un côté, on avait les Brésiliens, des artistes désinvoltes, et de l’autre, les Croates, des gars qui mettent leurs bottes de travail et qui partent à l’usine avec leur thermos chaque matin.
Les Brésiliens dansent avec le ballon, font dans la dentelle, jouent pour que ce soit joli.
Les Croates visent plus l’efficacité. Ils se salissent les mains en se mettant sur le chemin de l’adversaire pour voler autant de ballons qu’ils le peuvent.
Ils sont patients, ils visent la partie d’échecs, la guerre d’usure, en attendant que l’adversaire commette une erreur qui leur débloquera un accès au filet adverse.
Mais derrière ce côté col bleu se cache un jeu extrêmement intelligent en milieu de terrain, où les Croates savent flairer les tendances adverses pour les utiliser à leur avantage.
Les Croates, durs, mais chauvins

Les Croates sont des durs et ils sont peut-être aussi un peu chauvins.
« Pour une seconde Coupe du monde consécutive, nous sommes en demi-finale. Les joueurs ont été de véritables guerriers, seuls les Croates peuvent faire ça », a lancé le sélectionneur Zlatko Dalic.
« C’est une des plus belles victoires [de cette équipe]. Les gars ont été solides tactiquement, on a concédé un but et nous sommes revenus », a-t-il ajouté.
C’était en fin de compte une ode à la force de caractère de son équipe et il n’est pas le seul à croire que c’est le principal trait de caractère des Croates.
Élevés en combattants
Le héros du match, Dominik Livakovic, a parlé de la façon dont les Croates sont élevés pour expliquer leur réussite dans les moments plus compliqués. Il faut dire que la vie n’a pas toujours été facile dans les Balkans.
« Nous sommes expérimentés, nous grandissions comme des combattants », a-t-il dit au sujet de leur succès lors des tirs au but.
Leur principale qualité est surtout de s’accrocher jusqu’à la fin, ce qui a justement donné un but à la 117e minute.
« Nous sommes des guerriers, nous avons laissé notre cœur sur le terrain. Nous y allons un match à la fois et on verra où ça va nous mener. »
Résilience
Les Croates ont été patients, méthodiques et ils n’ont surtout pas baissé les bras quand Neymar a marqué à la fin de la première période de prolongation.
« Nous avons une grande force de caractère et nous n’abandonnons jamais, a insisté Zlatko Dalic. On savait que plus le match avançait, plus nos chances de l’emporter s’amélioraient. »
Et le sélectionneur croate a eu un autre élan de chauvinisme en parlant du travail de ses milieux de terrain contre le jeu plus stylisé des Brésiliens.
« Je l’ai dit à maintes reprises, la Croatie a le meilleur milieu de terrain au monde. Nos joueurs ont conservé le ballon et ils ont surtout bloqué nos adversaires. »
« Quant à Luka Modric, il a été notre meneur, il a joué 120 minutes, il n’a jamais paru fatigué et il a joué sans fléchir. Quand je l’ai sélectionné pour cette Coupe du monde, les gens le pensaient trop vieux, mais il a démontré qu’il est l’un des meilleurs joueurs au monde. »
Neymar n’a pas tiré
Le sélectionneur brésilien, Tite, s’est fait attendre très longtemps après le match et il avait pas mal moins le goût de danser que lors du match contre la Corée du Sud.
L’air sérieux, il a dû expliquer pourquoi Neymar ne s’est pas présenté au point de pénalty lors de la séance de tirs au but.
« Comme le cinquième lancer est celui qui est décisif, je voulais un joueur qui était prêt mentalement. »
Il n’avait visiblement pas envie de se faire défier par les médias et a répondu avec un air frondeur à toutes les questions qui étaient reliées à la façon dont son équipe a joué. Un journaliste brésilien a osé dire que ses hommes ont manqué d’organisation, il s’est fait rabrouer.
« Je ne suis pas d’accord pour dire que nous étions désorganisés. Nous avons imposé une pression élevée sur leur défense. »