Puissant témoignage de la victime d’un viol survenu il y a plus de 30 ans
Son bourreau aurait été retrouvé sans vie avant la fin des procédures judiciaires


Dominique Lelièvre
La victime d’un sordide viol survenu il y a plus de 30 ans à Québec a courageusement tenu à lever le voile sur son identité et à prendre la parole, lundi, après qu’il eut été révélé comme un coup de théâtre que l’accusé serait décédé avant de recevoir sa peine.
En liberté pendant les procédures, Dany Lévesque, 50 ans, était attendu lundi à son audience pour les représentations sur la peine. Il a reconnu l’été dernier avoir agressé sexuellement Sarah Boudreault en s’introduisant dans son appartement au beau milieu de la nuit, le 9 juillet 1994.
Toutefois, devant son absence, l’audience a pris une tournure inattendue quand il a été révélé que des policiers l'ont découvert à son domicile. «On l’a retrouvé sans vie», a affirmé son avocat. La Couronne espère déposer vendredi des documents «officiels» pour clore le dossier.
Le tribunal a accédé à deux demandes de la victime, soit de lever l’ordonnance de non-publication sur son identité et de prendre la parole malgré tout sur les conséquences du crime.
Faits à glacer le sang
«Je te remets la noirceur et je reprends ma lumière», a déclaré Mme Boudreault en lisant une lettre qu'elle avait préparée et adressée à son agresseur, «fière» de pouvoir reprendre 30 ans plus tard sa dignité «et surtout» sa liberté.

Lévesque avait 19 ans et elle 20 lorsque cette histoire à glacer le sang, qui n’est pas sans rappeler certains faits de l’affaire Marc-André Grenon, s’est produite.
Alors étudiante au conservatoire de musique, elle s’était couchée en laissant la porte déverrouillée de son appartement, car son conjoint devait rentrer plus tard.
Lévesque en a profité pour entrer dans l’intimité de celle qui serait devenue son «fantasme» après l’avoir aperçue dans un restaurant.
Il est monté à sa chambre, l’a menacée avec un couteau sur sa gorge, l’a forcée à lui faire une fellation, l’a traitée de «pute», a essayé de l’étouffer avec son pénis. Il y a eu pénétrations et éjaculation.
«J’ai alors vécu le deuil de qui j’étais à 20 ans. Je me suis sentie morte», a raconté la femme, lundi, soutenue par de nombreux proches émus.
Retrouvé 29 ans plus tard
Choc post-traumatique, peur viscérale d’être retrouvée par son agresseur, hypervigilance, anxieuse à l’idée même de s’endormir: elle a décrit 29 années de souffrances jusqu’au jour où Dany Lévesque a finalement été arrêté, en décembre 2023.
C’est grâce à de nouvelles méthodes d’analyse génétique, non disponibles à l'époque, et après qu’elle eut relancé la police qu’il a été retrouvé.
«Je comprends plus que jamais que ce n’est pas à nous, survivantes et survivants d’agression sexuelle, de porter cette honte», a insisté Sarah Boudreault, en s’adressant aux médias après l’audience.
«Les 30 dernières années ont été une forme d’emprisonnement pour vous [...]. C’est maintenant à vous de vivre votre liberté, de la créer, de la savourer, et je vous souhaite bonne chance», a affirmé le juge Sébastien Proulx.
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