Propriétaire démasquée: un prétendu chum pour mieux évincer ses locataires
Cette proprio a multiplié les fausses déclarations devant la cour pour augmenter le loyer


Francis Pilon
Une propriétaire en Montérégie a frappé un mur ce mois-ci après avoir multiplié les mensonges devant la cour, dont un prétendu conjoint, pour expulser une famille de locataires et augmenter le loyer.
«Toutes ces omissions, hésitations, fausses déclarations viennent entacher grandement la véracité et l’authenticité de son témoignage et démontrent que la propriétaire n’a pas réellement l’intention de reprendre le logement des locataires pour l’habiter, mais qu’elle vise plutôt d’autres fins, vraisemblablement la relocation à un loyer plus élevé», peut-on lire dans un jugement rendu ce mois-ci au Tribunal administratif du logement (TAL).
Lysianne Bibeau, propriétaire d’un duplex à Salaberry-de-Valleyfield, a tenté d’évincer sans succès une famille de son logement en prétendant vouloir y habiter. Ses locataires, Kevin Fraser-Metivier et Valérie Fortin, étaient toutefois convaincus que leur proprio tentait de se débarrasser d’eux pour augmenter le prix de leur loyer.
«Le pire, c’est qu’elle nous avait dit qu’on pouvait dormir tranquille et qu’elle n’avait pas l’intention d’expulser personne quand elle a acheté le duplex en septembre 2022», raconte au Journal Mme Fortin, qui paie 700$ pour un 5 1⁄2 au centre-ville.

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Elle ment même au juge
La propriétaire a d’abord menti à la cour en mentionnant que le duplex où vit la famille était sa seule propriété.
«Finalement, elle indique qu’elle possède trois [autres] immeubles détenus par une compagnie dont elle est actionnaire, en plus de l’immeuble concerné par la reprise», écrit la juge Chantal Boucher.
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Trois semaines avant la demande de reprise du logement en décembre 2022, Lysianne Bibeau a aussi vendu un autre duplex à Salaberry-de-Valleyfield. Elle a faussement avoué être copropriétaire de cette bâtisse avec un prétendu ex-conjoint, dont elle s’est séparée depuis.

«Cependant, l’acte de vente de cet immeuble [...] mentionne qu’elle serait l’unique vendeuse et aucune mention de son conjoint n’y apparaît. Elle rectifie donc son témoignage indiquant qu’elle était effectivement la seule propriétaire de cet immeuble. Ce document démontre également qu’elle était la représentante de la compagnie Les constructions Lojy Inc., soit les acheteurs, dans cette même transaction», note la cour.
La juge rappelle ainsi que Mme Bibeau est la vendeuse et l’acheteuse de cette propriété.
«Questionnée à savoir pourquoi elle n’a pas conservé ce logement pour y habiter au lieu de faire une demande de reprise d’un autre logement à peine trois semaines après la vente de cet immeuble, la locatrice indique que l’hypothèque de cet immeuble était trop élevée», précise le jugement.

Pas sa première fois
Lysianne Bibeau a aussi juré n’avoir jamais eu recours à la reprise d’un logement dans le passé. Or, l’honorable Chantal Boucher lui a rappelé que c’était faux puisqu’elle a expulsé un autre locataire de cette façon en 2022.
«La propriétaire s’est contredite à maintes reprises durant son témoignage rendant tout à fait invraisemblable son projet de reprise», a conclu le Tribunal, qui a rejeté sa demande.

Le proprio a «peur»
Notre représentant a contacté Lysianne Bibeau au bureau de «Les constructions Lojy Inc», compagnie de logements à louer qu’elle possède avec son frère François Bibeau, mais la proprio s’est faite avare de commentaires mardi.
«J’ai pas de commentaires. Je ne suis pas très à l’aise de parler avec des journalistes. J’ai vraiment peur que tout ce que je vais dire puisse revenir [contre moi]», a déclaré Mme Bibeau, en raccrochant rapidement le téléphone.
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