Procès en France d'un ex-chirurgien pédocriminel: sa sœur dénonce l'inceste sur ses filles et les «mensonges» de l'ex-épouse

AFP
La sœur de l'ancien chirurgien jugé en France pour violences sexuelles sur 299 patients, mineurs pour la plupart, a dénoncé jeudi «la cruauté» et les «mensonges» de l'ex-épouse du médecin, assurant que cette dernière était au courant des agressions sexuelles sur l'une de ses filles.
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Il s'agit de l'une des plus grandes affaires de pédocriminalité jamais jugées en France. Joël Le Scouarnec, 74 ans, encourt une peine maximale de 20 ans de réclusion pour 111 viols et 189 agressions sexuelles, aggravés par le fait qu'il abusait de sa fonction.
Dès le début du quatrième jour du procès à Vannes, dans l'ouest de la France, sa sœur Annie, 72 ans, s'est effondrée en pleurs en évoquant les propos tenus la veille par sa belle-sœur Marie-France.
Cachée sous une perruque, assurant être aphone puis retrouvant sa voix, Marie-France a alterné entre agacement et arrogance devant les questions de la cour criminelle et d'avocats représentant les victimes, niant farouchement avoir jamais connu les penchants pédophiles et actes pédocriminels de son ex-mari.
«C'était insupportable, plein de cruauté envers les victimes (...) plein de mensonges», a dénoncé Annie.
Elle a raconté que la plus jeune de ses deux filles lui avait confié dès octobre 2000 avoir subi des violences sexuelles de la part de Joël Le Scouarnec et qu'elle en avait aussitôt fait part à ce dernier.
Son frère aurait alors tout de suite reconnu les faits. «Oui, c'est vrai et Marie-France est au courant», lui aurait-il déclaré, selon elle. «Je n'aurais jamais assez de toute ma vie pour réparer ce que j'ai fait à (ta fille).»
«Je lui ai dit +faut que tu fasses quelque chose, que tu te fasses soigner+», se rappelle Annie.
Non-dits
Pourquoi n'avez-vous pas déposé plainte? demande la présidente Aude Buresi. «Je ne me suis pas rendu compte que c'était quelqu'un de dangereux (...) J'ai fait des erreurs, mais je n'ai jamais menti», insiste-t-elle.
Et même après une perquisition au domicile de son frère en 2004, quand les gendarmes saisissent tous les ordinateurs après un signalement du FBI sur des téléchargements de contenus pédopornographiques, «je ne fais toujours pas le lien avec le fait qu'il puisse y avoir d'autres victimes», assure Annie.
Pour avoir détenu ces images, Joël Le Scouarnec sera condamné un an plus tard à Vannes à quatre mois de prison avec sursis, sans obligation de soin ni interdiction d'exercer.
«J'ai besoin de savoir comment tu en es arrivé là», dit Annie en s'adressant à son frère. «Est-ce que notre père a eu des gestes sur toi? (...) Dis-moi la vérité!», l'exhorte-t-elle, sans que la présidente ne passe la parole à l'accusé.
Mardi, deux des fils de l'ex-chirurgien avaient dressé le portrait d'une famille hantée par les non-dits et les actes d'un grand-père incestueux.
Arrêté en 2017 pour le viol de sa voisine de six ans, Joël Le Scouarnec avait été condamné en 2020 à 15 ans de prison pour des violences sexuelles commises sur quatre enfants. Parmi eux, les deux filles d'Annie.
Le médecin avait aussi reconnu des violences sexuelles, prescrites, sur une autre nièce.
«Film d'horreur»
«Pénible», «insupportable»... À la sortie de l'audience mercredi soir tard, des avocats avaient déjà dénoncé la posture de Marie-France.
Pour Ophélie (prénom d'emprunt), l'une des victimes, «c'est un film d'horreur»: Marie-France «a complètement anéanti les 299 victimes. Comment peut-on en 2025 dire des propos comme cela? C'est effroyable», fustige la trentenaire.
Après les témoignages ces derniers jours des proches, pour cerner la personnalité de l'accusé, la cour entendra jeudi en fin d'après-midi les enquêteurs ayant permis de découvrir quelque 300 victimes.
Lors d'une perquisition en mai 2017 à Jonzac (ouest), des milliers de pages de «journaux intimes» et quelque 300 000 images pédopornographiques — dont certaines de ses propres fils et d'enfants de leur entourage— avaient été saisies.
Dans ses carnets et fichiers, l'ex-chirurgien y notait le nom, l'âge et l'adresse postale de ses victimes.
Il y décrivait scrupuleusement les sévices pédocriminels qu'il leur infligeait, ce qui a permis aux enquêteurs d'identifier sa multitude de victimes, de 1989 à 2014.