Procès civil de Gilbert Rozon: les réactions des victimes décortiquées par une experte
«Il y a plusieurs réactions possibles qui doivent être considérées normales face à un événement anormal», a souligné une professeure spécialisée en violences sexuelles

Camille Payant
Au procès civil opposant neuf femmes à l’ex-magnat de l’humour Gilbert Rozon, une experte a décortiqué lundi les différents témoignages d’agressions sexuelles entendus dans les dernières semaines afin d’expliquer les réactions des victimes alléguées.
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«Aucune femme n’est préparée à être agressée. C’est un événement inattendu, et il y a plusieurs réactions possibles qui doivent être considérées [comme] normales face à un événement anormal», a souligné d’entrée de jeu Karine Baril, professeure au Département de psychoéducation et de psychologie de l’Université du Québec en Outaouais.
Voici quelques-unes de ces réactions relatées lors des témoignages analysés par la spécialiste en violences sexuelles.
Confusion
La très grande majorité des femmes qui poursuivent Gilbert Rozon ont fait part de la confusion vécue au moment de l’agression dont elles auraient été victimes, un phénomène bien documenté selon Karine Baril.
Annick Charette a notamment souligné qu’au moment de l’agression, «[elle] ne comprenait pas pourquoi ça se passait comme ça».

Certaines d’entre elles ont même fait état d’immobilité tonique, «un état catatonique de paralysie dans lequel elles vont se sentir anesthésiées», selon Mme Baril.
«Je me sentais comme une survivante d’un bombardement. Tout était figé, je n’entendais rien», a illustré Danie Frenette.
Dissociation
Cette altération de la conscience est un mécanisme d’adaptation permettant de «rendre tolérable l’intolérable» qui se déclenche surtout lorsque la victime n’a pas pu fuir ou combattre, a expliqué Karine Baril.

Cela a pour effet d’altérer la perception de l’environnement et du temps. Anne-Marie Charrette a par exemple mentionné avoir eu l’impression de voir son sac à dos tomber au ralenti ou avoir dû parcourir un corridor qui lui avait paru très long.
Certaines personnes expérimentent également une amnésie dissociative qui mène à des trous de mémoire plus ou moins grands. C’est pourquoi Annick Charette se rappelait la cage d’oiseaux qui se trouvait à proximité du lit, mais pas tous les détails de son agression, selon Mme Baril.
Trouble de stress post-traumatique
L’agression sexuelle fait partie des événements traumatiques les plus associés au développement d’un trouble de stress post-traumatique (TSPT), aussi connu sous son abréviation anglaise PTSD, a souligné l’experte devant la cour.
Celui-ci peut prendre plusieurs formes, dont l’évitement. Mais les altérations négatives de l’humeur ont été notées chez presque toutes les femmes dans leurs témoignages, qui mentionnaient de la honte, de la culpabilité, de la colère ou du dégoût.
Le TSPT peut mener à de l’hypervigilance, mais aussi à des comportements irréfléchis et destructeurs, comme l’abus de substances ou même le fait de continuer de fréquenter son agresseur, comme ce fut le cas pour la majorité des demanderesses.
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