Première année de Bruno Marchand: le maire a été «cynique» sur le tramway, croit Claude Villeneuve
Il savait que ses promesses étaient irréalistes en campagne électorale, croit le chef de l'opposition à l'hôtel de ville de Québec


Jean-Luc Lavallée
Le chef de l’opposition à l’hôtel de ville, Claude Villeneuve, accuse le maire Bruno Marchand d’avoir fait une campagne «cynique», il y a un an, en promettant des améliorations au projet de tramway tout en sachant qu’il ne les réaliserait pas.
Appelé à dresser le bilan de la première année au pouvoir de Bruno Marchand, le chef de Québec d’abord ne mâche pas ses mots en entrevue.
Il lui reproche surtout de ne pas avoir livré ce qu’il a promis, notamment sur le tramway. C’est ce qui a fait la différence dans l’urne, clame-t-il.
«Si ses engagements de campagne avaient été ce qu’il annonce présentement, il n’aurait pas été élu», largue-t-il, rappelant que le nouveau maire a franchi la ligne d’arrivée avec une courte majorité de 739 voix.
«J’en connais des gens qui ont voté pour lui en pensant qu’il n’y aurait peut-être pas de tramway ou qu’il n’y aurait pas de fils [électriques dans les airs] ou de dalle de béton. Il a eu cet effet-là. À la limite, je pense même qu’au moment de faire ces promesses-là, il le savait qu’il ne les réaliserait pas», avance Claude Villeneuve.
«Je pense qu’il a été cynique là-dessus, ajoute-t-il. Ce sont des trucs de vieux politiciens. Quand Bruno Marchand parle de faire de la politique autrement, je prends ça avec un gros grain de sel. C’est surtout un spin.»
«Avant ses sorties plus critiques sur le tramway, je sais qu’il y a des gens de son équipe qui ont appelé des groupes pro-tramway pour leur dire: “Là, on va faire une sortie que vous n’allez pas aimer mais on vous rassure, on est pour le tramway, ne vous en faites pas”», raconte-t-il.
Un copié-collé de ses adversaires?
Paradoxalement, le maire est en train de réaliser le programme d’Équipe Marie-Josée Savard, soutient M. Villeneuve, qui dit l’appuyer «19 fois sur 20» lors des séances du conseil municipal.
«Sur bien des affaires, c’est un peu dur de le dénoncer parce qu’il est en train de faire ce que nous, on promettait. On va le voir dans son nouveau budget. Plus ça va aller, plus la ville va lui ressembler. Ce dont je ne démords pas, c’est que ce qu’il est en train de livrer comme mandat, ce n’est pas ce qu’il avait annoncé comme candidat», martèle-t-il.
Le chef de l’opposition juge par ailleurs que le maire a l’épiderme trop sensible à la critique et qu’il n’aime pas admettre ses erreurs.
«Si tu ne veux pas te faire critiquer, tu ne devrais peut-être pas aller en politique mais jouer à la pétanque.»
Mercier critique aussi son bilan

Le chef de Québec 21, Éric Ralph Mercier, croit également que Bruno Marchand n’aurait probablement pas été élu à la tête de la Ville s’il n’avait pas fait des promesses sur le tramway qu’il n’a pas été en mesure de tenir.
«Ça lui a permis d’accéder à la mairie de Québec. Ses plus fortes promesses n’ont pas été réalisées sur les fils [électriques] et la plateforme de béton. Il n’a pas respecté ses engagements. L’explosion des coûts, c’est une autre chose. On ne sait pas où on s’en va», critique-t-il.
Il déplore aussi la hausse de taxes de 2,5% annoncée pour les commerçants, alors que Bruno Marchand avait promis de les diminuer, ainsi que l’absence d’un plan clair pour lutter contre l’itinérance.
«Il a créé un comité de cinq personnes pour répondre aux enjeux mais il n’y a pas de plan établi encore après un an. Il devrait lui-même s’impliquer personnellement. Si j’étais maire, c’est ce que je ferais. Mais les solutions sont plutôt lentes à arriver.»
«On a l’impression d’une gestion au jour le jour, qu’il est toujours en apprentissage et que c’est l’administration qui mène», ajoute M. Mercier.
Un maire plus respectueux
L'ex-chef de Québec 21, Jean-François Gosselin, souligne néanmoins le changement de ton à l’hôtel de ville depuis que Bruno Marchand a succédé à Régis Labeaume.
«Pour moi, c’est wow! Il est beaucoup plus respectueux, il n’y a pas d’intimidation. Il y a un nouveau dynamisme à l’hôtel de ville. Il nous a tendu la main et nous a quand même fait confiance en me nommant sur des comités d’importance, même si je suis dans l’opposition», affirme-t-il.
Smith s'interroge toujours sur la vision du maire

La conseillère de Transition Québec, Jackie Smith, n’a pas été impressionnée par la première année au pouvoir de Bruno Marchand. Si elle salue le changement de ton à l’hôtel de ville et sa combativité pour livrer le projet de tramway, elle retient davantage de mauvais coups.
Elle déplore son inaction dans la lutte contre l’itinérance ou la crise du logement et elle lui reproche sa prise de position tardive sur le nickel ainsi que le «flou» qu’il entretient sur le troisième lien.
«M. Marchand a fait des beaux discours sur plusieurs sujets pendant un an mais quand on tombe dans les actions concrètes, ça laisse vraiment à désirer.»
Elle s’interroge encore sur sa vision à long terme. «C’est un homme complètement indécis qui suit le vent de l’opinion publique. La grande question: "Qui est Bruno Marchand et qu’est-ce qu’il veut faire avec la Ville?" Après un an, je ne peux pas vous le dire.»
Dussault et Gosselin lui lancent des fleurs

Jean-François Gosselin et Bianca Dussault, les deux ex-élus de Québec 21 devenus indépendants en septembre, ont quant à eux bien peu de critiques à formuler à l’endroit du nouveau maire.
Bien qu’ils ne soient pas toujours d’accord avec lui – surtout sur le tramway –, ils se réjouissent de sa collaboration exceptionnelle et de celle des élus de son parti dans leurs arrondissements.
«C’est le jour et la nuit» par rapport à l’administration Labeaume, insiste M. Gosselin, qui a hérité d’un siège de membre «associé» au comité exécutif, malgré son rôle dans l’opposition.
«J’étais quand même son adversaire à la mairie. On a le droit de ne pas être d’accord et de poser des questions. Ça demeure très respectueux», confie M. Gosselin.
«C’est vraiment quelqu’un de rassembleur. Tu sens qu’il est sincère quand il te parle», ajoute Mme Dussault, malgré leurs «divergences d’opinions.»
Il a été avalé par la machine administrative, dit Mélançon

Le conseiller indépendant Stevens Mélançon est très critique lui aussi quant aux promesses électorales brisées par rapport au tramway et la baisse des taxes commerciales.
Selon lui, Bruno Marchand n’a pas encore été capable de faire sa marque et il a été «avalé» par la machine administrative en raison de son inexpérience en politique.
Il dit avoir très hâte de voir son premier vrai budget.
«Je suis mitigé sur la première année de son mandat. D’un côté, il essaie d’amener une nouvelle dynamique à l’hôtel de ville mais force est d’admettre que jusqu’à présent, je ne vois pas grand changement. On parle mais on ne livre pas. Je laisse quand même la chance au coureur. C’est difficile la première année. Il est en train d’assimiler tout ça et c’est compréhensible. Il ne pouvait pas faire de miracles à la première année.»
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