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L'article provient de Bureau d'enquête

Poursuivi pour 14,6 M$ par un ex-motard, le ripou Benoit Roberge se dit blanc comme neige

Il se défend dans le cadre d'une poursuite judiciaire qui pourrait coûter une fortune à la Ville de Montréal

Benoit Roberge, photographié en août 2022 après que sa conjointe et lui eurent remporté la médaille d’argent dans la catégorie double mixte du tournoi amical de l’Association de pickleball Roussillon, à Saint-Constant en Montérégie.
Benoit Roberge, photographié en août 2022 après que sa conjointe et lui eurent remporté la médaille d’argent dans la catégorie double mixte du tournoi amical de l’Association de pickleball Roussillon, à Saint-Constant en Montérégie. Photo tirée de la page Facebook de l’Association de pickleball Roussillon
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Jean-Louis Fortin, Eric Thibault et Félix Séguin

2023-10-14T04:00:00Z
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L’ex-enquêteur corrompu Benoit Roberge, poursuivi pour plus de 14 M$, se dit blanc comme neige en réponse à une poursuite judiciaire d'un ancien Rock Machine qui pourrait aussi coûter une fortune à la Ville de Montréal.

Faussement condamné pour le meurtre d’un Hells Angels, Tony Duguay réclame un dédommagement totalisant 14,6 millions de dollars à la Ville de Montréal, son service de police et deux de ses enquêteurs dont l’ancien sergent-détective Roberge, dans cette cause débattue à la Cour supérieure qui a été initiée en 2017.

Quelques semaines plus tard, Roberge sortait de prison, lui qui avait reconnu avoir vendu des renseignements au Hells Angels René « Balloune » Charlebois.

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« [Roberge] a effectivement plaidé coupable à des accusations de gangstérisme et d’abus de confiance en mars 2014. Or, ces accusations n’ont aucune connexité avec le présent dossier et ne permettent aucunement de conclure qu’une faute aurait été commise à l’égard du demandeur », arguent les avocats de la Ville et de l’ex-spécialiste de la lutte anti-motards. 

« Pitié, pitié ! »

En décembre 2006, Tony Duguay a été déclaré coupable du meurtre de Normand « Biff » Hamel, l’un des membres fondateurs du chapitre d’élite Nomads des Hells avec leur chef, Maurice « Mom » Boucher, dont il était un vieil ami.

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Hamel avait été froidement abattu en sortant d’une clinique pédiatrique de Laval sous les yeux de son jeune fils et de sa conjointe, le 17 avril 2000. 

Les Hells Angels Normand Hamel (à gauche), Gilles Mathieu (au centre) et Maurice Boucher (à droite), tous membres fondateurs du chapitre Nomads de la bande. Hamel a été assassiné à Laval en avril 2000 en marge de la guerre des motards.
Les Hells Angels Normand Hamel (à gauche), Gilles Mathieu (au centre) et Maurice Boucher (à droite), tous membres fondateurs du chapitre Nomads de la bande. Hamel a été assassiné à Laval en avril 2000 en marge de la guerre des motards. Courtoisie

Le témoignage d’un délateur, qui disait avoir obtenu des confidences de l’accusé alors qu’ils se sont frottés aux Hells durant la guerre des motards, avait convaincu le jury du procès.

  • Écoutez les explications du directeur du Bureau d'Enquête de Québecor, disponible en balado ou en audiovisuel sur la plateforme audio QUB radio.

D’après le délateur Stéphane Beaudry, Duguay s’était même vanté qu’avant de mourir, la victime l’avait supplié de lui laisser la vie sauve en lui répétant : « Pitié, pitié ! »

Le chef des Hells, Maurice « Mom » Boucher, se recueille sur la dépouille de son camarade Normand Hamel, tué par balles le 17 avril 2000.
Le chef des Hells, Maurice « Mom » Boucher, se recueille sur la dépouille de son camarade Normand Hamel, tué par balles le 17 avril 2000. Archives

Volte-face

C’est l’arrestation de Roberge pour avoir coulé des renseignements secrets à Charlebois, puis sa condamnation à huit ans d’incarcération, qui a incité le délateur à faire volte-face.

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En 2014, Beaudry a fini par avouer qu’il s’était parjuré et Duguay a été acquitté par la Cour d’appel du Québec en 2016, dix ans après sa condamnation.

Une photo d’écrou de l’ex-Rock Machine Tony Duguay après son arrestation pour le meurtre du Hells Normand Hamel.
Une photo d’écrou de l’ex-Rock Machine Tony Duguay après son arrestation pour le meurtre du Hells Normand Hamel. Courtoisie

Beaudry s’est dénoncé en enregistrant une déclaration assermentée dans laquelle « il avoue que son témoignage était truffé de mensonges et qu’il l’a livré sous la contrainte et la peur », allègue Duguay dans sa poursuite, en citant le délateur.

Il prétend que Roberge avait « recruté » Beaudry comme délateur, avec un collègue enquêteur, Jean-Pierre Pelletier, par des « tactiques répréhensibles ». Les défendeurs nient ces allégations. 

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Voué à l’échec ?

Selon Duguay, « le témoignage de Roberge devant la Commission des libérations conditionnelles du Canada (CLCC) confirme les pratiques illégales dénoncées par Beaudry ».

« Aucunement », répliquent les avocats de Roberge, qui ajoutent que le recours en justice de Duguay est « voué à l’échec ».

Interrogé devant la CLCC à l’été 2016, Roberge a bel et bien reconnu qu’il avait « triché » dans l’exercice de ses fonctions et même « fait des crimes pour mettre des motards en prison », sans toutefois dévoiler de noms, ni préciser à quels cas il faisait référence.

Le livre de notre Bureau d’enquête paru cette semaine, intitulé Le ripou des Hells, relate en détail le scandale de corruption impliquant Benoit Roberge et le Hells René Charlebois.

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