Pourquoi la grappe des bananes ne dépasse-t-elle jamais les 2$ dans nos supermarchés, même en période d’inflation?

Axel Tardieu
Ce fruit exotique, vendu autour de 1,50$/kg tout au long de l’année, cache derrière son coût accessible une histoire troublante d’exploitation et d’ingérence politique. Mais cette ère de bananes bon marché pourrait connaître des changements avec les nouveaux tarifs imposés par l’administration Trump.
Dès la fin du XIXe siècle, des compagnies comme la United Fruit Company (aujourd’hui Chiquita) ont bâti des empires en Amérique centrale grâce à l’expropriation de terres et au recours à une main-d’œuvre quasi esclavagiste. Les grèves étaient réprimées dans la violence.
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En 1954, l’entreprise a même contribué à un coup d’État orchestré par la CIA au Guatemala pour protéger ses intérêts face à une réforme agraire.
Ces conditions ont permis de vendre des bananes dans le monde entier à des prix modiques, ne reflétant pas son véritable coût, même aujourd’hui en période d’inflation.
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Prix d’appel
Ce modèle a permis de maintenir des prix artificiellement bas. «Les épiceries utilisent la stratégie marketing du produit d’appel», explique Sylvain Charlebois, spécialiste de l’industrie agroalimentaire à l’Université Dalhousie.
«Elles la vendent à perte pour attirer une clientèle qui va acheter d’autres produits pour lesquels les marges sont plus élevées.»
«Le prix des bananes est 50% trop bas», estime Alistair Smith de l’organisme Banana Link, qui pointe la responsabilité de la grande distribution. Selon Oxfam, 36% du prix va aux supermarchés, contre à peine 8% pour les ouvriers agricoles.
Des alternatives existent: les labels Fairtrade et Rainforest Alliance tentent d’assurer de meilleures conditions de travail dans les pays producteurs. L’importateur québécois Equifruit affirme qu’un passage à la banane équitable ne coûterait qu’environ 20 sous par semaine ou 10$ par an de plus aux consommateurs.