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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Pourquoi des élus sincères perdent-ils les élections?

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Photo portrait de Maka Kotto

Maka Kotto

2025-05-05T04:00:00Z
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Un siège parlementaire n’est jamais qu’un prêt. Un prêt fait par le peuple, dans un instant de confiance, à une femme ou un homme jugé digne de porter sa voix. Mais quand vient la défaite, même après un travail intègre et acharné, elle laisse un goût amer. L’impression d’avoir été «désélu» sans avoir démérité. Pourquoi?

Cette question, douloureuse mais nécessaire, mérite d’être posée parce qu’il arrive que les élus les plus constants, les plus honnêtes, les plus dévoués soient ceux que l’on congédie. Est-ce une injustice? Une dérive du système? Ou un malentendu entre ce qu’on attend d’un élu... et ce qu’on lui pardonne?

Servir sans s’imposer

Être élu, ce n’est pas imposer ses idées; c’est incarner une vision, tout en demeurant à l’écoute. C’est un équilibre instable entre fidélité à soi-même et ouverture aux autres.

Gouverner, ce n’est pas plaire, c’est proposer. Décider sans écraser. Expliquer sans dominer.

Quand on reste fidèle à cette ligne, qu’on n’a ni trahi ses idéaux ni méprisé ses citoyens, la défaite électorale soulève un vertige plus profond: que vaut la constance quand l’électeur change de cap?

L’inconstance, face cachée de la démocratie

Vous avez élu un tel pour ses convictions, et le congédiez sans qu’il les ait reniées. Est-ce lui qui a manqué à sa tâche? Ou vous qui avez changé de cap? Peut-on blâmer un élu pour avoir été constant, quand l’électorat devient fluctuant?

Ce n’est pas là un reproche, mais un constat: la démocratie est aussi fragile que la mémoire des peuples. Et voter ne devrait pas devenir un acte impulsif, dicté par la fatigue, la peur ou la mode. Élire, ce n’est pas consommer. C’est s’engager, se souvenir, évaluer avec justesse. Sans quoi, même les élus sincères deviennent jetables.

La grandeur politique réside dans cette tension: représenter sans renoncer à penser. Défendre sans imposer. Être fidèle à une ligne tout en gardant l’oreille au sol. Là réside la noblesse du mandat.

Quitter la scène, mais pas la mission

Il y a une noblesse réelle à perdre sans se perdre. Quitter un mandat sans renier ses idéaux.

Le service public ne s’arrête pas aux portes du Parlement. Il se poursuit dans les écoles, les associations, la parole publique. L’essentiel est de rester debout, digne, utile.

Remerciez vos électeurs, même ceux qui vous ont désavoué. Rappelez-vous aussi, sans arrogance ni colère: la constance dans l’intégrité n’est jamais un échec. C’est le plus beau legs qu’un élu puisse laisser à la démocratie.

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