Pour une alliance québécoise de la boxe professionnelle

Jean-Charles Lajoie
Le monde de la boxe vit depuis une décennie des transformations majeures, et pas pour le mieux.
Le noble art a perdu de son lustre peu à peu après que cette industrie eut été longtemps dominée par quelques gros diffuseurs et autres promoteurs nord-américains sans scrupules tels HBO, ESPN, Top Rank et Don King.
C’était l’âge d’or de la boxe. Les meilleurs espoirs européens rêvaient de boxer en Amérique. Le mythique Boardwalk d’Atlantic City t’accueillait sur son ring : tu étais devenu quelqu’un dans la boxe. Tu faisais les frais d’un des trois combats principaux au MGM Grand de Las Vegas : c’était la consécration.
Puis, il y eut la venue en grande pompe du fantôme Al Haymon. Cet obscur personnage de l’ombre, avare de ses apparitions publiques, a notamment décidé qu’un annonceur maison était superflu sur un ring. Haymon devait révolutionner la boxe terrestre.
Cette tentative de prise de contrôle de toute une industrie, ce coup de force supporté par un puit sans fonds de capitaux a échoué. La résistance s’est organisée. Top Rank et Golden Boy ont tôt fait de s’adresser aux tribunaux en invoquant le Mohamed Ali Reform Act selon lequel un gérant de boxe ne puisse pas aussi servir en qualité de promoteur.
Haymon a revu sa stratégie de mise à mort de toute compétition sur son territoire, non sans avoir permis des années fastes au promoteur québécois Yvon Michel, qui a fait la promotion de certaines de ses cartes. Adonis Stevenson a bénéficié des bourses hors normes offertes par Premier Boxing Champions.
Concurrence au lieu de monopole
Les vieux sages ont toujours soutenu qu’une compétition, peu importe sa forme, était saine. L’arrivée des Nordiques a permis une rapide sortie de marasme du Canadien au début des années 1980. Les partisans ont gagné.
L’arrivée de TVA Sports a forcé RDS à investir dans son offre de contenu. Les consommateurs abonnés des deux chaînes ont été mieux servis et le sont encore davantage aujourd’hui. Je m’explique très mal que des hommes d’affaires aguerris ne tentent pas de créer une alliance québécoise de la boxe professionnelle.
Les magnats d’Arabie saoudite ne sont plus une lubie, ils sont les nouveaux Al Haymon, les dominants, ceux qui ont le pouvoir d’offrir les meilleures bourses. Ils font travailler les boxeurs dans les meilleures conditions de l’histoire à ce jour. Riyad est le nouveau Las Vegas.
Cela laisse peu de place au Québec. Révolue la capacité de vendre 15 000 billets pour un gala attirant les grands réseaux américains.
Il nous reste Eye of the Tiger Management, New Era Sports and Entertainement et GYM. Je réitère mon souhait d’amateur de boxe : que ces gens travaillent ensemble. Séparément, ils sont tous trop petits. Ensemble, ils pourront créer une série de boxe québécoise de développement. Celle-ci offrirait 26 cartes par année dans le réseau des casinos, six galas intermédiaires dans des arénas de hockey junior et quatre grands événements : deux au Centre Vidéotron et autant à Montréal-Laval.
Il y aurait des boxeurs signés localement et pour lesquels chaque promoteur conserverait les droits à l’international, des finales à saveur locale, entre 80 000 et 90 000 billets à vendre annuellement, une entreprise locale structurée et encadrée qui ferait l’envie des diffuseurs traditionnels et des plateformes alternatives.
Qui gagnerait ? Le public !