Possession d’armes à feu prohibées: il évite la prison grâce à une nouvelle loi des libéraux

Valérie Gonthier | Journal de Montréal
Un jeune homme qui a été condamné pour trafic de drogue et possession d’armes prohibées chargées a évité de durs moments en prison grâce à la nouvelle loi des libéraux qui élimine les peines minimales pour certains crimes par armes à feu.
Keinley Jasson Racine Marc a été arrêté à la suite d’une perquisition à sa résidence à l’été 2020. Les policiers y ont trouvé de la MDMA, de la cocaïne, des méthamphétamines et du cannabis.
Mais, ils y ont aussi découvert deux armes à feu, un Glock et un Taurus noir, dissimulées dans des sacs à main pour homme. L’un de ces sacs contenait des cartes d’identité à son nom. Les policiers ont aussi trouvé deux chargeurs prohibés, l’un contenant 30 cartouches et l’autre 12. Le maximum est de 10 cartouches pour une arme de poing.
Au total, les policiers ont récupéré 72 munitions.
Considérant la montée de la violence armée à Montréal, la Couronne demandait une peine d’emprisonnement totale de quatre ans pour les infractions en matière de stupéfiants et pour celles pour les armes à feu prohibées.
Réhabilitation
L’accusé maintenant âgé de 24 ans, de son côté, demandait la clémence du Tribunal, suggérant une peine à purger à domicile, afin de lui permettre de « poursuivre sa réhabilitation ».

Son avocat a d’ailleurs présenté au juge le projet de loi C-5 du gouvernement de Justin Trudeau, en vigueur depuis moins d’un mois, qui abroge les peines minimales pour des crimes par armes à feu. Cela vise notamment à diminuer la surreprésentation des communautés autochtones et des minorités visibles dans les prisons canadiennes.
Ainsi, si l’emprisonnement dans la collectivité était auparavant interdit pour ce genre d’infraction, cette peine est accessible depuis C-5.
Et le juge Vanchestein a privilégié cette avenue afin de cibler la réhabilitation sociale de l’accusé, ce qui l’aidera à réintégrer la société et ainsi ne plus récidiver, a-t-il écrit dans un jugement rendu récemment.
Erreur de parcours
Le passage de l’accusé devant les Tribunaux serait en effet une erreur de parcours, a-t-il dit. Travaillant pour une compagnie d’achat et de revente de véhicules d’occasion, il a vu ses activités cesser complètement dès mars 2020, en raison de la pandémie.
C’est en cherchant une source de revenus pour faire vivre sa conjointe et son jeune enfant qu’il s’est tourné vers la vente de drogue.
Pour ce qui est des armes, il a expliqué que ce n’était pas du tout lié à ses activités illicites, mais plutôt pour se protéger. Il disait avoir été victime de harcèlement et de menaces, de graffitis sur sa résidence et sur sa voiture. Sa conjointe se serait même fait agresser dans la rue.
C’est par la suite qu’il a dit avoir eu la « mauvaise idée » d’acheter des armes.
Il n’en voulait qu’une seule mais le vendeur lui disait que c’était deux ou rien. Il dit avoir payé 1000$ pour les armes, les dispositifs et les munitions.
Il a assuré au Tribunal ne jamais les avoir utilisées, qu’il les conservait chez lui qu’au cas où il se faisait attaquer par un intrus.
Pas une solution
Le juge Érick Vanchestein a émis un doute quant aux réelles motivations de l’accusé de se procurer deux armes. Il considère qu’il n’a pas été « complètement sincère et transparent » à ce sujet.
Même si le magistrat s’est dit sensible au fait que l’accusé est méfiant des policiers et qu’il a déjà été victime de racisme, il insiste : se procurer une arme n’est pas une solution.
Et considérant l’augmentation des événements par arme à feu à Montréal depuis deux ans, il faut mettre l’accent sur la dénonciation et la dissuasion, a-t-il dit. Par contre, il a aussi tenu compte que depuis son arrestation, Keinley Jasson Racine Marc s’est repris en main. Il évalue même son risque de récidive à faible.
« Le Tribunal considère que ces objectifs doivent être considérés en ciblant également la réhabilitation sociale et la conscientisation de sa responsabilité chez l’accusé », a écrit le juge.
Keinley Jasson Racine Marc a ainsi écopé d’une peine globale de deux ans moins un jour à purger chez lui, assortie à une probation de trois ans.
La Couronne a fait savoir qu’elle analyse la décision afin de déterminer si elle porte la cause en appel.