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L'article provient de Le Journal de Montréal
Affaires

Portefeuille de la Caisse: 33 milliards évaporés

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Photo portrait de Michel Girard

Michel Girard

2022-08-18T09:00:00Z
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La Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) a finalement radié son investissement d’environ 200 millions $ dans Celsius Network, un navet du secteur des cryptomonnaies. 

BOF ! Cela fait partie de la colossale somme de 33,6 milliards de dollars que la Caisse de dépôt et placement a perdue lors du premier semestre de 2022, sur papier on s’entend, à la suite de la sévère correction des marchés financiers. 

Pour « apprécier » à sa juste envergure cette immense « perte sur papier », sachez que c’est à peine 6 milliards de dollars de moins que la gigantesque perte de 39,8 milliards de dollars enregistrée par la Caisse de dépôt en 2008, lors de la crise du papier commercial canadien et celle des « subprimes » américains.  

Cela dit, comme tout est relatif, il faut savoir que la présente perte semestrielle de 33,6 milliards de dollars ne représente qu’un recul de 7,9 % vu l’ampleur de l’actif de la Caisse de dépôt, soit 420 milliards de dollars à la fin de décembre 2021.  

En 2008, la perte de près de 40 milliards de dollars représentait une chute de 25 % alors que l’actif net s’élevait à 155 milliards de dollars à la fin de 2007.   

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Séance d’autocongratulation 

La Caisse a même trouvé le moyen de s’autoféliciter en commentant hier la perte semestrielle de près de 34 milliards $ et de 7,9 %. 

« Durant le pire semestre des 50 dernières années pour les marchés boursiers et obligataires, la CDPQ enregistre un rendement moyen sur six mois de -7,9 %, significativement au-dessus de son portefeuille de référence qui se situe à -10,5 %, indique-t-on dans le communiqué sur les résultats de la Caisse. Sur cinq ans et sur dix ans, les rendements annualisés sont respectivement à 6,1 % et 8,3 %, aussi supérieurs à ceux du portefeuille de référence. » 

Eh oui ! la Caisse de dépôt se vante d’afficher une plus petite perte que celle enregistrée par « son » portefeuille de référence.  

Le grand patron de la Caisse, Charles Emond, en a rajouté en vantant le travail de son équipe de gestionnaires de portefeuille : « Malgré ces turbulences, l’évolution de notre stratégie amorcée dès le début de la pandémie, la saine diversification de nos actifs et la qualité de l’exécution des équipes ont permis au portefeuille global de continuer à faire nettement mieux que son portefeuille de référence. » 

Voici la « performance » de la Caisse dans les grandes catégories d’actif par rapport à celle de « ses » indices de référence, que vous retrouvez entre parenthèses.  

  • Revenu fixe : -13,1 % (-15,1 %) 
  • Actifs réels : +7,9 % (+2,4 %)  
  • Actions : -10,6 % (-11,9 %) 

Dans les documents remis aux médias, la Caisse se vante même d’avoir réalisé lors du premier semestre la « valeur ajoutée la plus élevée depuis 2010 », rien de moins. La Caisse évalue cette « valeur ajoutée » à 11 milliards de dollars !  

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Explication de cette vantardise. Avec son rendement semestriel de -7,9 %, la Caisse a perdu 33,6 milliards $. La Caisse a calculé que c’est 11 milliards de dollars de moins que la perte théorique de 44,6 milliards de dollars pour le portefeuille de référence dont le rendement semestriel est de -10,5 %.  

Voilà d’où vient la supposée « valeur ajoutée » de 11 milliards de dollars que Charles Emond et son équipe de gestionnaires de portefeuille ont réalisée en rapportant un rendement négatif de 7,9 % lors du premier semestre 2022.  

Fait important à noter : quand les gestionnaires de portefeuille, comme ceux de la Caisse, nous rappellent avec insistance qu’ils ont réalisé une « meilleure » performance que leurs portefeuilles de référence, cela laisse présager qu’ils méritent des primes, et ce, même dans le cas d’un rendement de portefeuille négatif. 

REDRESSEMENT  

Depuis le début du deuxième semestre, les marchés boursiers se sont passablement redressés par rapport aux lourdes pertes boursières encourues jusqu’au 30 juin dernier.  

Les grands indices nord-américains (Dow Jones, S&P 500, Nasdaq, S&P/TSX) ont réussi à récupérer jusqu’à présent plus de la moitié de leurs pertes.  

Mais de là à récupérer d’ici la fin de l’année le restant des pertes boursières encourues au premier semestre, il y a loin de la coupe aux lèvres !  

Les pressions inflationnistes, la hausse des taux d’intérêt, les craintes d’un ralentissement économique prononcé... restent omniprésentes.  

Mais rassurons-nous, rendu au 31 décembre prochain, il suffira que Charles Emond et ses gestionnaires de portefeuille battent « leurs » indices de référence pour que la Caisse réalise une « valeur ajoutée » même si elle devait boucler l’année dans le rouge !

 

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