Publicité
L'article provient de TVA Nouvelles
Société

Plus de 10 000 personnes vivent en situation d’itinérance au Québec, révèle un rapport très attendu

Leur nombre a augmenté de 44% depuis 2018

Partager
Photo portrait de Jean-Louis Fortin

Jean-Louis Fortin

2023-09-13T21:00:00Z
2023-09-14T12:03:10Z
Partager

Le nombre de personnes en situation d’itinérance a explosé au Québec. Plus de 10 000 personnes vivent désormais cette triste réalité, selon un important rapport du ministère de la Santé qui sera rendu public jeudi et dont Le Journal a obtenu copie.

Ce grand dénombrement était très attendu, compte tenu des campements qui poussent de plus en plus à Montréal et à Québec, mais aussi en Outaouais, à Sherbrooke et à Saint-Jérôme. Il a été effectué sur le terrain dans 13 régions de la province dans la nuit du 11 au 12 octobre 2022, grâce à des centaines de bénévoles et d’intervenants.

Personnes en situation d'itinérance visible au Québec
Personnes ayant passé la nuit dans un organisme d'hébergement, un lieu extérieur, un établissement de détention ou un quartier cellulaire de poste de police, entre 2018 et 2022
Région 2018 2022 Variation (%)
Saguenay—Lac-Saint-Jean 129 163 +26 %
Capitale-Nationale 535 726 +36 %
Mauricie—Centre-du-Québec 296 358 +21 %
Estrie 420 636 +51 %
Montréal 3119 4152 +33 %
Outaouais 145 534 +268 %
Chaudière-Appalaches 243 281 +16 %
Laval 169 179 +6 %
Lanaudière 209 283 +35 %
Laurentides 185 387 +109 %
Montérégie 281 555 +98 %
TOTAL 5731 8254 +44 %
Source : Ministère du la Santé et des Services Sociaux
Publicité

Et les résultats sont troublants. Lorsqu’on compare les données avec les dernières disponibles, récoltées en 2018, on constate une augmentation de 44 % du nombre de personnes en situation d’itinérance au Québec. 

Un millier de Montréalais supplémentaires sont désormais dans la rue, soit une augmentation de 33 %. Dans la capitale nationale, l’augmentation est de 36 %. 

Déplorable en régions

Mais les hausses les plus importantes, toutes proportions gardées, sont dans les régions. Le nombre de personnes en situation d’itinérance a presque triplé en Outaouais, et a plus que doublé dans les Laurentides.

La mairesse de Gatineau France Bélisle a d’ailleurs récemment lancé un cri du cœur au plus récent sommet de l’Union des municipalités du Québec, après qu’une jeune femme de 18 ans a accouché seule dans un boisé. Elle a demandé plus d’aide du gouvernement Legault.

  • Écoutez l'édito d’Alexandre Dubé à l'émission de Benoit Dutrizac via QUB radio :

Parmi les raisons qui expliquent l’augmentation de l’itinérance, les auteurs de cette grande étude citent « la pénurie de logements abordables ». 

« La proportion des appartements [locatifs] qui sont abordables pour les ménages est très faible. À Gatineau, par exemple, le taux d’inoccupation était de 0,8 % en 2022 et uniquement 8 % des logements disponibles étaient considérés comme abordables pour les ménages à plus faible revenu », peut-on lire.

Publicité

La pandémie de COVID-19 a également eu un impact, observent les spécialistes. 

Femmes et Autochtones

Le nombre de sans-abri est probablement sous-estimé : « les équipes d’enquêtrices et d’enquêteurs n’ont sans doute pas trouvé durant leur sillonnage toutes les personnes admissibles au cours de la soirée du dénombrement », écrivent les auteurs du rapport de 374 pages.

Les experts du ministère soulignent aussi le lien entre les violences faites aux femmes et l’itinérance.

« les violences fragilisent rapidement les conditions de vie des femmes qui les subissent », peut-on lire. Les femmes qui n’ont pas de toit « sont plus jeunes, sont plus souvent des personnes immigrantes et ont plus souvent des enfants à charge », indiquent les auteurs.

D’autres constats déjà identifiés lors du dénombrement de 2018, comme la surreprésentation des personnes autochtones, se répètent cette fois-ci. Les Autochtones sont plus nombreux à « avoir passé l’année entière en situation d’itinérance, donc à se trouver en situation d’itinérance à long terme », peut-on lire. 

Cette semaine, lors d’une mêlée de presse à l’Assemblée nationale, le ministre responsable des Services sociaux, Lionel Carmant, a estimé que le portrait qui sera dévoilé aujourd’hui est « réaliste », sans avancer de chiffres.

Publicité

« Ce qu’on veut, c’est créer de la concertation entre les municipalités, les organismes communautaires et les établissements partout à travers le Québec. Il y a des endroits que ça se passe très bien, d’autres [où] on doit améliorer les choses », a-t-il fait valoir mardi.  

GENRE DES PERSONNES EN SITUATION D’ITINÉRANCE

Femmes : 29 %

  • Elles sont globalement plus jeunes que les hommes en situation d’itinérance
  • 23 % ont vécu leur premier épisode d’itinérance dans la dernière année

Hommes : 67 %

  • 40 % d’entre eux ont 50 ans et plus
  • 34 % ont vécu leur premier épisode d’itinérance il y a au moins 10 ans.

Diversité de genre : 4 %

 

Expulsés de leur logement

Comment une personne se retrouve-t-elle en situation d’itinérance ? « La raison la plus souvent indiquée est l’expulsion d’un logement, avec environ 23 % des personnes en situation d’itinérance l’ayant nommée », explique le rapport ministériel. 

23 % itinérants mentionnent une expulsion de leur logement

Parmi les 967 personnes ayant mentionné cette raison, elles mentionnent que c'était en raison :

  • d’un loyer non payé : 53 %
  • d’une plainte (par exemple animal/bruit/dommages) : 17 %
  • de la vente ou de la rénovation du bâtiment : 15 %
  • de l’emménagement du ou de la propriétaire : 5 %

Mieux qu’ailleurs

Le Québec compte désormais 120 personnes en situation d’itinérance pour 100 000 habitants.

C’est un peu mieux que les chiffres observés récemment dans d’autres provinces canadiennes comme l’Ontario (139), l’Alberta (228) et la Colombie-Britannique (189).

À l’opposé, la Finlande, elle, ne compte que 20 personnes en situation d’itinérance pour 100 000 habitants, selon une étude réalisée dans ce pays en 2022.

 

Méthodologie

Pour son analyse comparative, le ministère de la Santé et des Services sociaux inclut les « personnes ayant passé la nuit dans un organisme d’hébergement, un lieu extérieur, un établissement de détention ou un quartier cellulaire de poste de police ». L’Abitibi-Témiscamingue et la Côte-Nord ne sont pas comptabilisées dans l’exercice comparatif, car il n’existe pas de données dans ces régions pour 2018. Les chiffres de 2022 ont dû être ajustés pour pouvoir les comparer à ceux de 2018, qui avaient été recueillis de façon différente.

Vous avez un scoop à nous transmettre?

Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?

Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.

Publicité
Publicité