Plus d’un milliard de litres d’eaux usées dans le fleuve en raison de l’été pluvieux

Les fortes pluies de cet été ont forcé la Ville de Montréal à rejeter des quantités phénoménales d’eaux usées directement dans le fleuve Saint-Laurent, soit presque autant que pendant une année complète.  

À lui seul, l’intense orage du 13 juillet a forcé le déversement de 325 millions de litres d’eaux usées, soit l’équivalent de 150 piscines olympiques remplies d’un mélange d’eau de pluie et de rejets d’égouts.

Ce jour-là, 88 mm de pluie sont tombés sur la métropole en l’espace de deux heures, ce qui excède la capacité des égouts. De nombreux citoyens ont d’ailleurs vu leur logement inondé. 

«Quand il y a un débordement comme ça, c’est l’ensemble de tous les déchets qui se retrouvent dans le fleuve et qui finissent par s’accumuler dans des petites baies un peu partout. Sur le long terme, c’est dommageable, mais il n’y a pas de choc sur le coup», explique le directeur général de la Fondation Rivières, André Bélanger. 

Une étude rendue publique fin juillet faisait état de contamination fréquente du fleuve par des coliformes fécaux, qui proviennent souvent des eaux usées de la région montréalaise.

Pluie et travaux

Au total, 1,39 milliard de litres d’eau ont été envoyés sans traitement dans le fleuve Saint-Laurent en juin et juillet. C’est presque autant que les rejets de toute l’année 2021. 

Les fortes précipitations ainsi que des travaux à l’usine d’épuration font en sorte que Montréal est en voie de connaître une deuxième année exceptionnelle de suite, avec déjà près de 4,35 milliards de litres d’eau déversés.

Volume d’eaux usées débordé à Montréal

2021: 1,78 milliard de litres, près d’une fois le volume du Stade olympique

2022: 5,79 milliards de litres, soit 3,1 fois le volume du Stade olympique

2023*: 4,35 milliards de litres, soit 2,33 fois le volume du Stade olympique

*Janvier à juillet

En 2015, le fameux flushgate avait projeté 4,9 milliards de litres de rejets sanitaires sans traitement dans le fleuve. Ce volume n’était toutefois pas dilué dans de l’eau de pluie. 

De plus en plus fréquent

Ce qui est inquiétant, c’est que ces pluies torrentielles se multiplient en raison des changements climatiques, soutient André Bélanger.

Encore ce jeudi, Ottawa recevait près de 50 mm de pluie en une heure. 

«Au Québec, tous les modèles prédisent des pluies de plus en plus abondantes, rappelle M. Bélanger. Ce qu’on vit là, ça va devenir la norme.»

Pour limiter les déversements, des millions de dollars ont été investis dans des ouvrages de rétention d’une capacité de 100 millions de litres et dans des infrastructures vertes drainantes, rappelle la Ville de Montréal.

«Pour 2021-2022 seulement, 6 parcs résilients ont été réalisés alors que 21 autres sont prévus pour 2023-2024», souligne le porte-parole Hugo Bourgoin. 

Mais selon André Bélanger, il faut trouver des «projets phares» qui aideront à drainer les quartiers les plus bétonnés. 

«À Montréal, il y a le discours, mais au niveau de l’action c’est difficile, se désole-t-il. On est encore aux projets-pilotes. On est encore à l’établissement de saillies de trottoir.»

Il suggère par exemple de faire des «jardins de pluie», c’est-à-dire des endroits qui s’inondent volontairement en cas de fortes précipitations, au Parc olympique ou au Quartier des spectacles.  

«Le Quartier des spectacles ça pourrait être inondé le temps que ça s’écoule tranquillement. On ne va pas voir un spectacle quand il pleut des cordes de toute façon», soutient-il.