Publicité
L'article provient de Le Journal de Montréal
Justice et faits divers

Photos pornographiques hypertruquées dans une école secondaire de Sainte-Thérèse: la police arrête cinq ados

Jusqu’à présent, une dizaine de victimes ont été identifiées

Partager
Photo portrait de Frédérique Giguère

Frédérique Giguère

2024-03-13T10:00:00Z
Partager

La police mène une enquête d’envergure au sein d’une école secondaire de Sainte-Thérèse après la découverte de nombreuses images hypertruquées montrant des adolescents complètement nus, gracieuseté de l’intelligence artificielle.

«C’est tellement banalisé, lance d’emblée le préventionniste-enquêteur Eric Huard, de la Régie intermunicipale de police Thérèse-De Blainville (RIPTB). Les jeunes trouvent ça cocasse et se disent que ce n’est pas grave parce que ce n’est pas une vraie image. Mais c’est tellement bien fait que ça peut avoir des répercussions à vie pour les victimes, qui elles, ne trouvent pas ça drôle du tout.»

Le préventionniste-enquêteur Eric Huard de la Régie intermunicipale de police Thérèse-De Blainville (RIPTB).
Le préventionniste-enquêteur Eric Huard de la Régie intermunicipale de police Thérèse-De Blainville (RIPTB). Ben Pelosse / JdeM

L’enquête, qui a débuté au début février, a permis jusqu’ici d’arrêter cinq adolescents d’une même école secondaire. L’un d’entre eux pourrait éventuellement faire face à des accusations de production de pornographie juvénile puisqu’il a utilisé une application d’hypertrucage (deep fake) afin de créer des images obscènes avec de réels visages.

Jusqu’à présent, la police a pu identifier une dizaine de victimes, autant des garçons que des filles. Elles sont toutes mineures et étudiantes à la même école secondaire que l’auteur des crimes.

Loin de prendre la situation à la légère, la police Thérèse-De Blainville a rencontré toutes les personnes qui se sont partagé les photos, soit une cinquantaine de jeunes.

Publicité

Plusieurs d’entre eux pourraient aussi faire face à des accusations criminelles, soit possession et distribution de pornographie juvénile. Lorsque l’enquête sera terminée, le dossier sera soumis pour analyse au Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).

  • Écoutez l'entrevue avec Me Nada Boumeftah, avocate en droit criminel et pénal, ainsi qu'en protection de la jeunesse au micro d’Alexandre Dubé via QUB :

Sensibilisation par les parents

Mais en attendant, la police urge les parents et les milieux scolaires à en faire davantage pour sensibiliser les adolescents à cette problématique grandissante.

Ils peuvent aussi expliquer à leur enfant de supprimer immédiatement une telle photo qu’il recevrait et de ne surtout pas l’enregistrer ou la partager.

Dans l’idéal, un signalement devrait aussi être fait à la police.

«Pour les jeunes qu’on a rencontrés, c’était l’incompréhension totale, dit l’agent Huard. Ils ne pensaient jamais que c’était aussi grave, encore moins que c’était criminel.»

En effet, le Code criminel prévoit une définition très large de ce qu’est la pornographie juvénile au Canada, si bien que l’hypertrucage peut très bien entrer dans cette définition et l’auteur peut subir les mêmes conséquences que s’il avait partagé une réelle photo nue de sa partenaire mineure.

«C’est ça que les parents doivent faire comprendre à leurs enfants», insiste l’agent Huard.

Publicité
  • Écoutez le segment faits divers avec Maxime Deland via QUB :

Automutilation et suicide

Pour la procureure du DPCP Joanny St-Pierre, qui coordonne le Comité de concertation contre la lutte à l’exploitation sexuelle des enfants sur internet, les impacts sur les victimes lorsqu’une photo est hypertruquée sont les mêmes que ceux vécus lorsqu’une réelle photo intime est distribuée.

Me Joanny St-Pierre, coordonnatrice provinciale du Comité de concertation contre la lutte à l’exploitation sexuelle des enfants sur internet pour le DPCP.
Me Joanny St-Pierre, coordonnatrice provinciale du Comité de concertation contre la lutte à l’exploitation sexuelle des enfants sur internet pour le DPCP. COURTOISIE DPCP

«Ça perdure pour le restant de leurs jours, dit l’avocate. Les victimes vivent une crainte constante que les gens aient vu les photos, que les photos soient toujours en circulation, qu’on les reconnaisse dans la rue, entre autres. Ce n’est pas de leur faute du tout, mais elles vivent toutes de la honte. Les impacts sont majeurs et peuvent aller jusqu’à l’automutilation et le suicide.»

Comme le font leurs homologues ailleurs dans la province, la police Thérèse-De Blainville donne depuis quelques mois des conférences dans les écoles afin de sensibiliser les jeunes à cette problématique.

Si vous avez besoin d’aide :

Vous avez un scoop à nous transmettre?

Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?

Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.

Publicité
Publicité