[EN IMAGES] 2500 camionneurs manifestent: des kilomètres de file et une heure de pointe cauchemardesque à Québec

Vincent Desbiens
Environ 2500 camionneurs de partout dans la province ont paralysé le réseau routier de Québec, mercredi, pour s’opposer aux changements apportés dans la gestion des octrois de contrats d’infrastructure par le gouvernement.
Les poids lourds ont lentement défilé sur les autoroutes et les artères municipales de Québec, causant d’impressionnantes files de véhicules de plusieurs dizaines de kilomètres.

Des milliers d’automobilistes qui ont eu le malheur d’emprunter le même trajet que celui des camionneurs ont été coincés durant d’interminables minutes, voire des heures.
«C’est pare-chocs à pare-chocs, soutient Nicholas Lavergne, un travailleur de Québec qui a été coincé durant près d’une heure sur le pont Pierre-Laporte, depuis Lévis. Je pense revenir chez nous au moins une heure plus tard que d’habitude», souligne-t-il.

Pour sa part, le Centre de services scolaire des Navigateurs a averti, sur les réseaux sociaux, que «des retards sont à prévoir dans la majorité des parcours d’autobus scolaires», en fin d’après-midi.

Mouvement de masse
«Il y a eu un gros mouvement à travers le Québec, parce que nos travailleurs sont inquiets. Ça touche directement leur gagne-pain. Le gouvernement a biffé unilatéralement une clause qui existait depuis 15 ans de ses devis et on ne comprend pas pourquoi», explique le directeur général de l’Association nationale des camionneurs artisans inc., Gaétan Légaré, soulignant qu’environ la moitié de ses 5200 membres ont pris part à l’événement.

Les camionneurs ont respecté un tracé bien défini. Ils ont formé de très longues files d’attente sur le pont Pierre-Laporte, l’autoroute Charest, l’avenue Saint-Sacrement, l’autoroute Laurentienne et le boulevard Wilfrid-Hamel durant tout l’après-midi.
Concurrence déloyale
La décision de la Société québécoise des infrastructures de retirer la clause qui l’obligeait à embaucher des travailleurs locaux du camionnage en vrac sur ses chantiers a été «la goutte qui a fait déborder le vase» pour les conducteurs-entrepreneurs.

«Sans cette clause-là, on peut faire venir des camions de Montréal pour un chantier en Gaspésie pendant que nos camionneurs locaux se cherchent du travail. Ça n’a aucun sens», peste M. Légaré, qui espère que la manifestation de mercredi va inciter le gouvernement à s’asseoir et discuter.
Comme leur directeur général, de nombreux membres de l’ANCAI rencontrés par Le Journal pendant la journée ne voient pas d’un bon œil le projet de loi 62 du ministre des Infrastructures, Jonatan Julien, qui, selon certains, «ouvre la porte grande ouverte» à la collusion et à la concurrence déloyale.

«On est aussi des contribuables et ça nous inquiète qu’ils ouvrent la porte à de grosses entreprises privées [pour des contrats de gré à gré], parce qu’on s’expose à la corruption et la collusion. C’est le gouvernement qui établit nos tarifs à l’heure et on doit montrer patte blanche chaque année. Les entrepreneurs privés, eux, décident de leurs tarifs», fait valoir Jocelyn Giguère, un vétéran de l’industrie originaire de Québec.

Pas un klaxon
Aucun klaxon n’a résonné au cours de la journée et la protestation s’est déroulée dans le calme, en collaboration avec le Service de police de la Ville de Québec et la Sûreté du Québec. Le SPVQ affirme que « la manifestation s’est déroulée avec un minimum de répercussions sur la population et les commerçants. »

«On n’a rien contre la Ville de Québec, qui est exemplaire dans son octroi de contrats de camionnage, poursuit le président des Transporteurs de vrac Chauveau-Québec, Gaétan Gariépy. On n’est pas venus brasser ou déranger. C’est malheureux, mais c’était le moyen qu’on a identifié pour faire réagir le gouvernement.»
Des réactions mitigées dans le trafic
«Il y a eu beaucoup d’affluence mais c’est ordonné et il y a des voies réservées avec des policiers.»
– Laurence Gaspard, superviseur des paramédics de la CTAQ
«C’était très difficile. Les clients sont fâchés, mais ce n’est pas notre faute. La journée n’a pas été payante.»
– Hamdi Brigui, propriétaire de Taxi Yallo
«Les camionneurs sont payés à l’heure la plupart du temps. Après les assurances, le carburant, la mécanique, il ne reste pas grand-chose. C’est dommage d'avoir créé tout ce trafic, mais c’est ça en 2025.»
– Yannick Michaud

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