Plus de 72 000 nouvelles habitations nécessaires chaque année: Montréal devra tripler sa productivité pour s’attaquer à la crise du logement


Félix Desjardins
La crise du logement à Montréal s’est aggravée plus fortement que dans tous les autres grands centres canadiens depuis la pandémie, révèle un nouveau rapport.
Dans la métropole québécoise, entre 2019 et 2024, la croissance annuelle moyenne du prix des habitations était de 10,2%, contre 4,7% entre 2004 et 2019, révèle le document de la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL). Quant aux loyers, ils ont augmenté en moyenne chaque année de 6,8%, comparativement à une hausse annuelle de 2,5% entre 2004 et 2019.
«Selon les tendances actuelles, les problèmes d’abordabilité du logement [à Montréal] s’aggraveront nettement sans une hausse considérable de l’offre, explique-t-on à la SCHL, dans un communiqué. La construction de logements locatifs a été forte ces dernières années, mais elle doit s’accroître et s’accompagner d’une augmentation importante de la construction de logements pour propriétaires-occupants.»
À l’échelle nationale, le Canada devra environ doubler sa productivité en habitation d’ici 2035 pour retrouver le seuil d’abordabilité de 2019. La SCHL estime que de 430 000 à 480 000 nouvelles mises en chantier seront nécessaires chaque année.
De ce nombre, plus de 72 000 logements devront être construits à Montréal annuellement. Actuellement, le nombre annuel projeté de mises en chantier dans la ville d’ici 2035 est d'à peine plus de 23 000.
Corriger le tir
Ces objectifs de productivité seront inatteignables sans une augmentation considérable de la main-d’œuvre, une automatisation accrue du secteur de la construction et une hausse des investissements du secteur privé, ajoute la SCHL.
Afin de définir l’abordabilité, la SCHL utilise un rapport prix-revenu qui tient compte de l’évolution des taux hypothécaires et des dépenses des propriétaires. Ce ratio d’abordabilité a grimpé de 34 à 48% entre 2019 et 2024 à Montréal. Avec un influx suffisant de nouveaux logements, il pourrait retomber à 34% en 2035.
Les prix ont aussi monté en flèche dans le reste du Québec: le coût des habitations a connu une croissance annuelle moyenne de 11,4% entre 2019 et 2024. La SCHL ne prévoit pourtant pas qu’il sera nécessaire de gonfler le nombre de mises en chantier prévu à l’extérieur de Montréal d’ici 2035. Toutefois, la crise du logement dans la métropole aurait des répercussions dans l’ensemble de la province si elle n’est pas réglée.
«Notre objectif [...] est de veiller à ce que les décideurs de tous les ordres de gouvernement et du secteur privé comprennent l’ampleur du défi. Des changements systémiques sont essentiels si nous voulons doubler le rythme de la construction résidentielle au Canada», précise Aled ab Iorwerth, économiste en chef adjoint à la SCHL.
La candidate à la mairie de Montréal et cheffe d'Ensemble Montréal, Soraya Martinez Ferrada, a qualifié de «critique» la crise du logement dans la ville, dans un courriel envoyé au Journal.
«Depuis l’entrée en vigueur de la politique du Règlement pour une métropole mixte par Projet Montréal, c’est dans la métropole québécoise où le problème d’offre de logements se dégrade le plus rapidement au Canada, estime-t-elle. Je m'engage à [abolir le règlement] et à utiliser des incitatifs pour accélérer la construction résidentielle à Montréal et simplifier la bureaucratie. Cela passe aussi par le développement de véritables partenariats financiers, tant avec le milieu privé qu’avec le milieu communautaire», défend-elle.
Le cabinet de la mairesse Valérie Plante n'a pour le moment pas donné suite à la demande du Journal.
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