Pelchat pousse le bouchon trop loin, mais il y a de pires menaces pour notre «garde-manger»


Antoine Robitaille
Quand j’ai pris connaissance des difficultés de Mario Pelchat avec la Commission de protection du territoire agricole (CPTAQ), j’étais dubitatif.
Si le chanteur veut donner des spectacles à côté de ses vignes, quel est le problème? Accueillir des réceptions de mariage? Vendre des produits du terroir? Pourquoi pas?
Mais la CPTAQ a dit «niet». Le dossier s’est rapidement politisé.
D’Amours
Après avoir pris le parti de son ami Pelchat, l’ancienne ministre Sylvie D’Amours et députée caquiste de Mirabel s’est ravisée... et même fendue d’une sortie pour dire qu’il devrait «respecter la loi».
«Quand ton chiffre d’affaires ne provient pas majoritairement de ton agriculture, tu n’es pas à la bonne place», a-t-elle déclaré au Journal, craignant que cela ne mette en péril «notre garde-manger».
Mal lui en prit. Le chanteur lui a répondu de manière véhémente sur les réseaux sociaux, lui reprochant d’avoir «déformé les faits»; l’accusant d’être «en conflit d’intérêts évident», puisqu’elle et son conjoint «possèdent eux-mêmes un vignoble à Saint-Joseph-du-Lac, à quelques kilomètres du nôtre».
Le chef conservateur Éric Duhaime – en campagne dans Arthabaska – soutient Pelchat sans condition. Il compte déposer aujourd’hui une plainte contre D’Amours au Commissaire à l’éthique! La députée, en 2018, avait dû vendre ses parts dans le vignoble de son mari à la suite d’une décision défavorable du Commissaire.
Des règles à respecter
Qui a raison? Même si on peut trouver la décision de la CPTAQ pointilleuse, les deux commissaires (Grignon et Lupien) y démontrent clairement que Pelchat est allé beaucoup trop loin: une salle de 250 places plutôt que les 100 autorisées. Un restaurant de 80 places. On est devant un projet de restaurant-spectacle.
Charles-Félix Ross est de cet avis. Ce directeur général de l’Union des producteurs agricoles (UPA), joint hier, l’avait d’ailleurs formulé «respectueusement» sur Facebook, dans les commentaires sous la lettre de Pelchat. En moins de deux, il était bloqué et son mot avait été supprimé, raconte-t-il. «L’UPA n’est certainement pas contre l’agrotourisme!» Elle applaudit que la CPTAQ accepte 75% des demandes. Mais il y a des règles à respecter. «M. Pelchat les connaissait et a choisi de les ignorer.» Il note que des salles de spectacle, «il y en a en masse et plusieurs ont du mal à arriver». Ross est éloquent aussi lorsqu’il souligne que la zone agricole, qui ne représente que 4% de notre territoire, est «ultrapressurisée». Il faut veiller au grain.
Mais le gouvernement fait bien pire que Pelchat. Vous vous souvenez du terminal méthanier de Rabaska? Le gouvernement Charest avait adopté un décret pour faire fi d’une décision défavorable de la CPTAQ. Le gouvernement Legault fit de même pour un projet de Google. Et compte le refaire si un Rabaska 2.0 est lancé.
C’est là que je pleure dans la pluie avec Pelchat! Au moins, lui cultive quelque chose dont il tire un produit agricole! Un compromis est-il vraiment impossible?