Pascale Déry avait raison


Joseph Facal
Pour comprendre une question complexe, il faut souvent revenir en arrière et élargir le cadrage avant de refaire la mise au point.
À la fin de 2024, au plus fort du conflit entre Israël et le Hamas, les tensions sont vives sur plusieurs de nos campus, surtout ceux des universités McGill et Concordia et des cégeps Dawson et Vanier.
La ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry, s’inquiète particulièrement pour la sécurité physique et psychologique de certains étudiants, surtout dans les deux cégeps.
Situation
Déjà ici, une première difficulté surgit pour la ministre.
Si elle intervient, ne serait-ce que pour poser des questions et avoir l’heure juste, plusieurs hurleront à l’ingérence.
Si elle n’intervient pas, d’autres lui reprocheront d’être négligente et de ne pas assumer ses responsabilités.
Elle choisit de poser des questions aux deux directions, puis commande une enquête.
Plus de 800 enseignants signent alors une pétition réclamant la démission de la ministre.
Ils soutiennent que l’enquête est «politique dans ses motivations» et qu’elle attaque la liberté académique.
L'un des instigateurs de la pétition rappelle lourdement que Mme Déry a siégé jadis sur le conseil d’administration du Centre des affaires israéliennes et juives (CIJA).
«C’est, dit-il, l’éléphant dans la pièce. On se demande si elle est au service du bien commun ou si elle porte l’uniforme du CIJA.»
D’autres textes, dont un qui a été signé également par de très nombreuses personnes, se portent plutôt à la défense de la ministre.
Ceux-là circuleront beaucoup moins dans nos médias.
Le rapport d’enquête commandé par la ministre, qui porte spécifiquement sur les cégeps Dawson et Vanier, vient de sortir.
C’est une lecture qui vous secoue le keffieh.
La situation y est effectivement préoccupante, et la ministre Déry a eu raison de demander qu’on y fasse la lumière.
Les salles de prière, qui ne sont pas interdites dans les cégeps (il le faudrait), ne sont pas que des lieux de recueillement spirituel, elles tendent aussi à devenir des foyers de prosélytisme politico-religieux.
Celle pour les musulmans du Collège Vanier comprend un lavabo pour les ablutions et un séparateur entre les hommes et les femmes.
Les fêtes religieuses servent à justifier des absences et influencent les dates des examens.
Les choix de conférenciers alimentent les tensions entre professeurs.
Une association étudiante vend des autocollants «Long live the intifada».
• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission de Richard Martineau, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
Et ainsi de suite.
Les cégeps, il est important de le rappeler, n’ont pas le même statut légal que les universités, qui ont un degré d’autonomie de très loin supérieur.
Agir
À l’évidence, il faut resserrer la loi sur la laïcité, baliser la liberté académique dans les établissements collégiaux, et revoir les dispositions sur l’accréditation et le financement des associations étudiantes.
Quand un gouvernement mérite d’être blâmé, il ne faut pas se gêner.
Quand il agit comme il se doit, comme ici, il faut également le souligner.
Sur un tout autre sujet, l’affaire Khelif, je vous invite à lire mon texte dans Faites la différence.
Cette chronique sera de retour le 15 juillet.