Pas le droit à l’erreur


José Théodore
C’est toujours rassurant d’entendre le directeur général du Canadien, Kent Hughes. J’aime sa façon de penser et notamment de prôner la patience avec les jeunes. Mais, quoi qu’il décide au prochain repêchage, il n’a pas le droit de se tromper.
Hughes se retrouve dans une situation unique, celle d’avoir le premier choix de l’encan amateur à son baptême comme dirigeant et dans sa ville, en plus. Parfois, il y a unanimité parmi les recruteurs sur celui qui est le meilleur espoir, mais ce n’est pas le cas cette année, personne ne voyant un Sidney Crosby ou un Connor McDavid dans la classe de 2022.
Hughes et son équipe de recruteurs devront donc faire preuve d’une grande perspicacité : ce que fera le DG jeudi et vendredi le suivra tout au long de son règne, qu’il repêche ou qu’il transige.
En présumant que le Canadien parlera au premier rang, il est difficile, pour l’instant, de déterminer lequel des trois meilleurs espoirs aura la plus belle carrière. Mais que le CH capture l’Ontarien Shane Wright, l’Américain Logan Cooley ou le Slovaque Juraj Slafkovsky, l’heureux élu devra être un joueur d’impact, à défaut d’être un joueur de concession.
Évidemment, lorsqu’une équipe finit au dernier rang, comme ce fut le cas du Tricolore la saison dernière, on peut s’attendre à ce que le meilleur espoir au monde fasse ses classes professionnelles avec elle dès son premier camp d’entraînement, et c’est ce que j’espère, mais attention !
Je suis 100 % d’accord avec Hughes de ne faire de la place à ce jeune que lorsqu’il sera prêt, car ce que l’on veut, c’est celui qui sera le meilleur à 22, 23 ou 24 ans. On doit faire ce qui est le mieux pour le développement de l’athlète et je ne déchirerais pas ma chemise si jamais on le retournait dans les rangs juniors ou mineurs au mois d’octobre.
Kotkaniemi, Caufield et Ribeiro
On ne doit surtout pas répéter l’erreur commise avec Jesperi Kotkaniemi. On aurait dû écouter l’ancien capitaine du Canadien Saku Koivu et faire retourner « K.K. » en Finlande à sa saison de 18 ans. On connaît l’histoire. Il a eu un bon camp d’entraînement et on a précipité les choses en le gardant à Montréal, mais ce fut une grave erreur.
J’ai appris, il y a longtemps, qu’il ne fallait pas trop se fier à ce qu’on voit au camp, où le niveau de jeu atteint à peine les 80 % d’un match régulier.
Ça me rappelle ce que mon ancien coéquipier Mike Ribeiro m’avait dit à propos de son deuxième camp avec le CH en 1999. Il avait 19 ans. Il avait impressionné dans les matchs préparatoires, mais, une fois la campagne entamée, il m’a confié qu’il s’était rendu compte qu’il n’était pas prêt.
On a vu sensiblement la même chose avec Cole Caufield en début de saison, mais il s’est ajusté dans la seconde moitié du calendrier après l’arrivée de Martin St-Louis derrière le banc.
La pression de Montréal
La pression était lourde sur ses épaules et ce sera la même chose sur celles du premier choix du CH la saison prochaine, car Montréal, c’est Montréal.
Même si on a appris à mettre des bémols avec les Kotkaniemi et Caufield, croyez-moi, si le choix de Hughes ne marque pas à ses cinq premières parties, le jeune en entendra parler et il sera sous les projecteurs. Évidemment, cette pression viendra davantage des médias et du public que de l’organisation.
À ce sujet, j’ai bien aimé les commentaires de Vincent Lecavalier qui avait été comparé à Michael Jordan par le propriétaire de l’époque du Lightning de Tampa Bay après son repêchage en 1998. Lecavalier a rappelé, lundi, combien Jacques Demers l’avait aidé à mettre de côté cette comparaison malhabile.
Le week-end promet d’être intéressant.
-Propos recueillis par Gilles Moffet
Entrefilets
Vincent Lecavalier
C’était un peu étrange de voir Vincent Lecavalier devant tous ces logos du Canadien et aux côtés de Kent Hughes. Ce dernier doit un peu sa carrière à l’ancien hockeyeur qui fut son premier gros client. Visiblement, Lecavalier a la confiance du DG, et je ne serais pas surpris de le voir gagner du galon dans l’organisation. Vincent est une bonne tête de hockey ; s’il y en a un qui connaît la pression d’être le premier choix, c’est bien lui.
Les entrevues
Nous n’avons pas appris grand-chose lors du point de presse de lundi, mais c’était quand même un bel exercice de communications de la part du Canadien. On sait que Vincent Lecavalier a parlé avec Shane Wright pour mieux connaître son état d’esprit. Ce genre d’entrevue est toujours utile. J’ajouterais cependant que les entrevues les plus révélatrices sont celles avec les coéquipiers et les entraîneurs des candidats. Ce sont eux qui vous révéleront si c’est un gars d’équipe, un leader, quelqu’un qui sait se distinguer dans les moments importants, un acharné dans les entraînements, bref tous ces petits détails qui font qu’un joueur atteindra son plein potentiel et s’améliorera de saison en saison, comme Brad Marchand, que Hughes a cité en exemple.
Jeff Petry et Carey Price
On n’a pas appris grand-chose dans les dossiers de Jeff Petry et de Carey Price, à l’exception que les Petry attendent un quatrième enfant. Kent Hughes n’écarte pas la possibilité qu’il revienne à Montréal, mais, comme il veut libérer de l’espace sur la masse salariale, je m’attends à ce que le défenseur soit échangé. Dans le cas de Price, on présume qu’une autre intervention chirurgicale n’est pas nécessaire et on verra comment il se sentira au camp d’entraînement.