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L'article provient de Le Journal de Montréal
Affaires

Pas de répit pour les endettés: la Banque du Canada va encore augmenter le taux directeur

Le gouverneur de la Banque du Canada Tiff Macklem annoncera mercredi une hausse du taux directeur qui pourrait être de 0,75  %.
Le gouverneur de la Banque du Canada Tiff Macklem annoncera mercredi une hausse du taux directeur qui pourrait être de 0,75  %. Photo d'archives, REUTERS
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Photo portrait de David Descôteaux

David Descôteaux

2022-10-26T00:00:00Z
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La Banque du Canada hausse mercredi – pour la sixième fois de l’année – son taux directeur. Pendant que les consommateurs souffrent, les banques en profitent.

Les consommateurs devront payer davantage pour leurs hypothèques et leurs marges de crédit. Le taux directeur de la Banque du Canada augmentera, ce mercredi, entre 0,5 et 0,75 point de pourcentage, selon les experts, ce qui l’amènera à près de 4%. Du jamais-vu depuis la crise financière de 2008.

Pour plusieurs endettés, cette hausse sera la paille qui brise le dos du chameau. «C’est clair!» dit Jean-Philippe Saumure, conseiller principal chez Equifax Canada. «Le nombre de consommateurs qui ont manqué au moins un paiement sur leurs dettes est en hausse de 100 000 par rapport au même trimestre de 2021. Et ce chiffre, c’était avant la hausse de 0,75% du début de septembre», précise-t-il.  

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Pendant la COVID, les ménages ont moins dépensé et ont profité des programmes du gouvernement, ce qui a eu pour effet de diminuer leur niveau d’endettement. Pendant cette période, l’endettement moyen sur les marges de crédit hypothécaire est passé de plus de 70 000$ à près de 66 000$ au pays, dit Jean-Philippe Saumure. 

«Mais depuis un an, un nombre record de cartes de crédit ont été mises sur le marché et les limites de marges de crédit accordées par les institutions financières battent des records. On s’attend à ce que d’ici 2023, les taux de délinquance reviennent au niveau d’avant la pandémie et continuent à augmenter», dit-il. 

Les PME aussi vont y goûter

Pour un ménage, un prêt hypothécaire de 300 000$ à un taux d’intérêt de 1,5% au début de 2022 exigeait des versements de 1200$ par mois. Aujourd’hui, après cinq hausses de taux, ce même versement est de 1660$, calcule Stéphane Bruyère, courtier hypothécaire pour les Architectes hypothécaires. «Si on ajoute la hausse de demain, en supposant trois quarts de point, ça monte à 1787$, donc un versement qui a augmenté de 587$ par mois. En moins d’un an!» 

Il ne faut pas négliger l’impact sur les PME, selon lui. Les marges d’entreprises, qui varient aussi avec le taux directeur, avoisinent autour de 10% aujourd’hui. «Et mercredi, moi je risque d’être à 10,75%. Les entreprises vont faire quoi si elles veulent innover ou investir? C’est tout le paquebot de l’économie canadienne qui bouge avec les taux d’intérêt, pas juste les individus», souligne-t-il. 

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Les banques en profitent

Les hausses de taux d’intérêt profitent au moins à un groupe: les banques. «Le passif des banques, ce sont les dépôts financiers, comme les comptes chèque ou épargne de vous et moi. Mais on ne reçoit que des miettes en intérêts! Peu importe le mouvement du taux directeur, le taux payé par les banques aux créditeurs, c’est-à-dire nous, reste pas mal le même», explique Valeri Sokolovski, professeur de finance à HEC Montréal. «De l’autre côté, les hypothèques et les marges de crédit augmentent dès le lendemain. Une hausse de 1% du taux d’intérêt, c’est une hausse de 1% de profit pour les banques», dit-il. 

La hausse du taux directeur peut toutefois augmenter le coût de financement des banques, notamment dans le cas des prêts interbancaires, précise-t-il. 

UNE ANNÉE DE HAUSSES

 

Freeland rejette les critiques envers la Banque

La ministre des Finances Chrystia Freeland s’est portée à la défense de la Banque du Canada, mardi. Elle a réitéré l’indépendance de celle-ci et souligné qu’il était vital que cette institution demeure à l’abri des influences politiques.

La Banque tente d’enrayer l’inflation. Son but est de contrôler les prix et stabiliser le pouvoir d’achat du dollar. C’est pourquoi elle y est allée de six hausses du taux d’intérêt en 2022, estime la ministre.  

Pluie de critiques

Les conservateurs critiquent depuis plusieurs mois la Banque du Canada, notamment son programme d’achat d’obligations d’État. Ils tiennent la Banque comme principale responsable de la montée de l’inflation au Canada, la qualifiant de « guichet automatique » pour le gouvernement.  

Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh a aussi récemment accusé la Banque d’avoir en partie provoqué la « récession imminente » en usant de « mesures trop agressives ». 

Les deux chefs ratent la cible, selon le professeur adjoint de finance à HEC Montréal Valeri Sokolovski. « L’inflation est globale. 

Toutes les banques centrales ont augmenté l’offre de monnaie. Ils ont imprimé beaucoup d’argent et c’est difficile, voire impossible, pour une seule banque centrale de contrôler l’inflation globale », estime-t-il.

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