Où vont vos impôts: 373 000$ pour des casques de «réalité étendue» dans les écoles

Gabriel Côté
Signe que les écrans sont toujours les bienvenus dans nos écoles, Québec vient de dépenser près de 373 000$ afin d’acheter des casques de «réalité étendue» pour le réseau scolaire.
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«C’est une autre belle dépense inutile qui ne viendra pas aider concrètement les élèves qui ont besoin de ressources humaines», s’indigne une enseignante en musique de la région de Québec rencontrée par Le Journal, qui a demandé que nous taisions son nom de crainte de subir des représailles.

Appelé à justifier cet achat, le ministère de l’Éducation a plaidé que ces appareils «intéressent de plus en plus les centres de services scolaires» et qu’ils présentent une véritable utilité pédagogique.
«Au bénéfice des élèves, un casque de réalité étendue sert à immerger l'utilisateur dans un monde virtuel ou à simuler un environnement entièrement réel», a affirmé une porte-parole du ministère, Esther Chouinard, en réponse à nos questions.
Éclairer le soleil
Sur le plancher des vaches, cela signifie qu’un professeur de sciences pourrait se servir de ces casques afin de présenter à ses élèves des modèles de cellule en 3D, ou encore pour «simuler des expériences chimiques», illustre Mme Chouinard.
Les enseignants d’histoire pourraient quant à eux se servir de ces dispositifs afin de «voyager dans le temps» – rien de moins! – et de «revivre des événements historiques».
En éducation physique, les casques donneraient l’occasion de réaliser des exercices de danse ou de boxe, et en musique, ils permettraient «d’apprendre un instrument».
Or, chacun voit aisément que rien de tout cela ne nécessite de casque de réalité étendue. C’est un peu comme si nous nous proposions «d’éclairer le soleil», pour reprendre une expression de Sylvain Tesson.
Plusieurs enseignants au secondaire, qui ne veulent pas s’afficher publiquement pour éviter de contrevenir à leur code d’éthique, ont du moins émis des réserves de la sorte.
«C’est au mieux un divertissement. C’est à peu près aussi bon que de passer un film en classe», a soufflé un enseignant d’histoire et géographie de la région de Montréal, sous le couvert de l’anonymat.
«On n’a jamais eu besoin de casque pour apprendre à jouer d’un instrument», dit un autre professeur de musique.
Formation professionnelle
Par ailleurs, une partie des casques – le ministère n’a pas précisé combien d’appareils ont été achetés pour 372 800$ – sont destinés aux programmes de formation professionnelle.
Là, ils serviront aux élèves à répéter des expériences «jusqu’à en maîtriser les gestes ou les postures professionnels appropriés» dans un cadre sécuritaire, a souligné Mme Chouinard.
Rappelons que le gouvernement Legault a également octroyé une subvention de 2 M$ au COlab d’Alma et au Centre de formation professionnelle de Val-d’Or pour mettre au point une dizaine d’outils technologiques destinés aux étudiants.
– Avec la collaboration de Charles Mathieu