Des milliards pour 50 minutes en moins entre Montréal et Toronto
Le fédéral ouvre la porte à des segments grande vitesse dans son projet de TGF

Julien McEvoy
Si Ottawa est maintenant ouvert à ajouter des segments à grande vitesse à son projet de train à grande fréquence (TGF) entre Québec et Toronto, rien n’indique que les minutes retranchées au trajet en vaudront la chandelle.
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« Nous sommes ouverts à ce que ce soit encore plus rapide », a dit le ministre des Transports, Omar Alghabra, vendredi matin, au sujet du projet qui entre dans sa phase de demandes de qualification.
Un trajet Montréal-Toronto sur des voies de TGF réservées prendrait 4 h 10 au lieu des 5 h actuelles, estime Ottawa.
Alors que le ministre parlait en 2022 d’une fourchette de 6 à 12 milliards de dollars pour réaliser le projet, il s’est depuis rétracté et ne parle maintenant que « de milliards ».
« Ils ne peuvent pas l’évaluer, car ils ne savent pas où ils s’en vont avec ça. Ils ont retiré le projet à VIA Rail pour le confier au privé », indique Jacques Roy, spécialiste en gestion des transports et logistique à HEC Montréal.
C’était en effet le message du gouvernement Trudeau, vendredi: Ottawa est officiellement à la recherche de promoteurs privés pour mener le projet et espère attirer trois consortiums d’ici l’été.
C’est à eux que reviendra la tâche d’identifier les meilleurs endroits où construire des segments de TGV dans ce projet de construction de 1000 kilomètres de rails, soit 15 fois plus que les 67 kilomètres du Réseau express métropolitain (REM).
« On veut consulter les plus grands cerveaux qu’on a dans le secteur privé ici et ailleurs pour voir ce qu’il se fait de mieux », a affirmé Pablo Rodriguez, le lieutenant québécois du gouvernement qui accompagnait le ministre Alghabra.
« Se tricoter un genre de TGV »
La porte est donc ouverte à ce que le trajet prenne finalement moins de 4 h 10.
« Pour que ça ait du sens sur le plan économique, peut-être qu’un TGF avec des portions TGV pourrait fonctionner, comme l’Acela aux États-Unis », suggère le professeur Roy.
L’Acela est un train Amtrak qui circule entre les gares de Washington et Boston, avec 14 arrêts, dont Philadelphie et New York.
C’est un hybride qui peut rouler jusqu’à 240 km/h.
Le train à grande fréquence prévu par Ottawa atteindrait au maximum 200 km/h, alors que les trains de VIA Rail peuvent monter jusqu’à 120 km/h actuellement.
« C’est une façon de se tricoter un genre de TGV », illustre le spécialiste.
Reste à savoir combien cela va coûter au Canada. Les estimations les plus onéreuses sont de 60 milliards $ pour un TGV complet entre Toronto et Montréal.
Ce que l’on sait, c’est que la tâche de définir les tracés, les projections de rentabilité, de la construction à la tarification, reviendra au privé.
« On a besoin d’un mode de transport ferroviaire pour des raisons écologiques. Mais au prix du projet, mon opinion est qu’on réduirait beaucoup plus les émissions de gaz à effet de serre si on électrifiait les camions lourds que si on faisait un TGV », résume Jacques Roy.
Grande fréquence contre grande vitesse
TGV ENTRE TORONTO ET MONTRÉAL
- Trajet de 2 h 40 à 2 h 50
- Chantier estimé entre 20 et 60 milliards $
TGF ENTRE TORONTO ET MONTRÉAL
- Trajet de 4 h 10
- Chantier estimé à plus de 12 milliards $
TRAJET EN TRAIN MONTRÉAL-QUÉBEC ACTUELLEMENT : 3 H 17
- Trajet en TGF Montréal-Québec : 2 h 50
TRAJET EN TRAIN MONTRÉAL-TORONTO ACTUELLEMENT : 5 H 07
- Trajet en TGF Montréal-Toronto : 4 h 10
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