Opération iranienne pour enlever une journaliste à Brooklyn


Luc Laliberté
Son nom ne vous est peut-être pas familier, mais Masih Alinejad retient l’attention aux États-Unis et sur la scène internationale. La journaliste, écrivaine et militante est très critique de son pays d’origine.
Déjà, en août 2020, elle dénonçait dans les pages du Washington Post des tentatives du gouvernement iranien pour la kidnapper. Des membres de sa famille ont été régulièrement menacés et harcelés. On a également fait circuler des images retouchées de la journaliste, qu’on montrait menottée et portant le hijab devant un tribunal iranien.
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Les menaces et les fausses rumeurs ont été acheminées par Twitter sans que les responsables de la plateforme interviennent. Depuis qu’elle a fui l’Iran en 2009, Alinejad n’a jamais cessé d’être la voix de ceux qui ne peuvent ouvertement dénoncer les pratiques de leur gouvernement, particulièrement les femmes iraniennes.
Hier, c’est par l’intermédiaire de procureurs de Manhattan que nous apprenions que le FBI avait déjoué un complot visant à enlever la journaliste. Son nom se serait alors ajouté à une liste de plus en plus longue de citoyens iraniens exilés qui sont disparus mystérieusement. L’un d’entre eux a plus tard été exécuté, alors qu’un autre est actuellement derrière les barreaux.
Les procureurs ont identifié quatre responsables de la tentative d’enlèvement, mais il est peu probable qu'ils aient un jour à répondre de leurs actions devant un tribunal américain. Le complot n’en est pas moins réel et l'on prévoyait de la sortir des États-Unis pour la ramener en Iran.
Le plan envisagé prévoyait une sortie de Booklyn à l’aide de petites embarcations rapides avant de transiter sur un plus gros navire et de se diriger vers le Venezuela, pays qui entretient toujours des relations amicales avec l’Iran.
Cet incident vient ajouter aux tensions existantes entre l’Iran et les États-Unis. La journaliste, évidemment ébranlée par le sérieux et la minutie du complot, bénéficie actuellement d'une protection policière.
Cette histoire prend pour le moment une tournure positive pour l’activiste, mais elle a ravivé en moi le souvenir du terrible destin de la journaliste irano-canadienne Zahra Kazemi, morte en détention en Iran en 2003. Torturée, elle serait morte d’une hémorragie due à un coup à la tête.
Après de longues procédures, en Iran comme au Canada, personne n’a payé le prix, même si l’histoire a reçu une attention médiatique internationale.
En lisant cette histoire, en apprenant les détails de l’opération ou en me remémorant la mort de Mme Kazemi, je n’ai pu m’empêcher de penser à ceux et celles qui, écœurés des mesures sanitaires, crient ici à la dictature ou à une dérive humanitaire. Alinejad vient d’échapper de peu à une tentative d’enlèvement organisée par un véritable régime tyrannique pour avoir osé s’exprimer haut et fort contre les dirigeants.