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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

On fait quoi avec Alexander Romanov?

Le défenseur du Canadien Alexander Romanov.
Le défenseur du Canadien Alexander Romanov. Photo d’Archives, Martin Chevalier
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Photo portrait de Réjean Tremblay

Réjean Tremblay

2022-03-01T10:00:00Z
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Si vous voulez une réponse claire à toutes vos questions sur la guerre en Ukraine, je vous conseille de lire quelqu’un d’autre.

Parce que les certitudes sont souvent épaisses et créées par la propagande.

Une chose est évidente : la Russie, le pays, l’État, a envahi l’Ukraine. 

On peut discourir sur les raisons politiques derrière cette décision catastrophique, mais ses raisons sont suffisantes à ses yeux pour qu’un président comme Vladimir Poutine prenne le risque de soulever pratiquement toute la planète contre lui.

Les États-Unis ont bombardé Bagdad et envahi l’Irak le 20 mars 2003, mais les réactions ont été minimes comparativement à celles causées par l’invasion de l’Ukraine. Peut-être parce que les Irakiens n’étaient pas blonds et chrétiens et que leur dictateur ne tentait pas d’instaurer une forme de démocratie.

Vous vous rappelez, les Américains cherchaient des armes de destruction massive.

  • Écoutez aussi le segment sportif de Jean-François Baril diffusée chaque jour en direct 6 h 40 via QUB radio :

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QUE FAIRE AVEC LES PERSONNES ?

Cette fois, les réactions sont à la mesure des réseaux sociaux, qui font vivre la guerre en direct. 

Voilà que le Comité international olympique vient de décider de bannir la Russie et les athlètes russes des compétitions paralympiques à venir. Et recommande que les équipes et athlètes russes soient bannis des compétitions internationales.

On est rendu là. 

Le légendaire gardien Vladislav Tretiak.
Le légendaire gardien Vladislav Tretiak. Photo d'archives

Mais alors on fait quoi avec Alexander Romanov, le jeune défenseur du Canadien ? On le renvoie chez lui ? Et Arslanbek Makhmudov et Artur Beterbiev, deux Russes qui ont choisi de s’installer à Montréal, au Québec, et de poursuivre leur vie et leur carrière chez nous ? 

On leur demande de condamner Vladimir Poutine et de porter un t-shirt « I hate Putin ! » ?

Et de se mettre à genoux pour implorer le pardon ? En reniant leur patrie ?

Ma réponse est simple. Alexander Romanov est fier d’être Russe. Il aime sa patrie. C’est un jeune homme bien qui est respectueux avec ses parents et ses proches. Il n’a rien à voir avec cette maudite invasion. 

Il doit déjà être déchiré, inquiet pour ses parents, il sait que le système russe permet de punir ceux qui dévient de la ligne de pensée de l’État.

Alors, on lui fiche la paix. 

Comme on fiche la paix à Ovechkin, à Malkin, à Vasilevskiy ou même à Daniil Medvedev, le nouveau numéro un mondial au tennis, qui tentent de faire gagner leur équipe et qui payent une large partie de leurs impôts aux États-Unis.

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Il y a l’État, il y a les personnes.

RAPPELEZ-VOUS LA SÉRIE DU SIÈCLE

Les plus jeunes n’ont pas vécu la Série du siècle. En 1972, la puissance du bloc communiste et de l’Union soviétique était à son zénith. 

C’était la guerre froide, et quelques années plus tard, l’URSS allait envahir l’Afghanistan. Provoquant le boycottage des Jeux de Moscou, en 1980. Quand les États-Unis ont envahi le même Afghanistan quelques années plus tard, quels Jeux a-t-on boycottés au fait ?

Vladislav Tretiak et Valeri Kharlamov ont débarqué au Forum pour le premier match. Tretiak avait 19 ans. 

Il n’y a rien qu’on n’a pas dit et écrit sur eux. Ils puaient, c’étaient des robots, ils n’avaient pas d’émotions.

Plus tard, Tretiak a raconté qu’il vivait le rêve de sa vie en patinant sur la glace du Forum, la Mecque du hockey.

Les gens l’ont connu et l’ont adoré. 

Personnellement, c’est devenu un ami que je retrouve avec plaisir depuis plus de 40 ans. Il y a trois ans, j’étais dans son bureau à Moscou et il me montrait ses plus beaux souvenirs. Et le CH et Montréal avaient une place d’honneur.

Pourtant, en 1972, c’était un « maudit communiste » comme les autres. Il n’avait pas de cœur, il était méchant et il sentait mauvais.

Tretiak était une bonne personne. 

Son État fonctionnait dans un système politique et économique absurde.

Déjà, on confondait les deux.

Aujourd’hui, Vladislav Tretiak est président de la fédération russe de hockey. Les autorités internationales du hockey vont sans doute bannir ses équipes des grandes compétitions.

Mais ce n’est pas Tretiak la personne qu’on va bannir. C’est le président d’une fédération d’un pays en guerre.

Il y a un prix à payer, mais le prix ne change pas la personne.

LOMACHENKO, GVOZDYK ET LES AUTRES

Mais ce sont les Ukrainiens qui payent le prix ultime de cette invasion. Ce sont parfois des visages inconnus aperçus à la télévision, mais pour nous, chroniqueurs de boxe, ces Ukrainiens, on les connaît. 

Olexander Gvozdyk, celui qui a failli tuer Adonis Stevenson à Québec, on a jasé avec lui le lendemain matin au Bonne-Entente. Et Mathieu Boulay l’a d’ailleurs retrouvé pour le combat contre Artur Beterbiev. Un Ukrainien contre un Russe. Qui se sont fait l’accolade après leur dur combat.

Russ Anber est dans le coin de Lomachenko d’habitude. Aujourd’hui, Lomachenko a rejoint l’armée ukrainienne.

Les États se font la guerre. Les personnes payent toujours le prix.

À part les marchands d’armes.

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