Violence verbale: offensive pour ramener le civisme à l’école secondaire
L’école Louis-Jacques-Casault à Montmagny mise sur l’enseignement de la politesse de base et la communication positive


Daphnée Dion-Viens
Confrontée à une hausse de la violence verbale, une école secondaire de Chaudière-Appalaches a pris les grands moyens pour ramener davantage de civisme et de respect entre ses murs, en misant notamment sur l’enseignement des formules de politesse comme «bonjour» et «merci».
Il y a deux ans, l’équipe de l’école secondaire Louis-Jacques-Casault, à Montmagny, a «levé la main» pour participer à un projet de recherche visant à favoriser le bien-être des élèves et prévenir la violence «parce que ça répondait à un besoin», indique son directeur, Patrick Gagnon.
Le personnel avait remarqué une augmentation des écarts de langage, de l’impolitesse et de l’intimidation au fil des ans, accompagnée d’une hausse des propos racistes, homophobes et misogynes.
«Ils ont l’insulte entre eux facile. C’est tellement rendu dans leur langage que des fois on leur parle et ils nous le disent», lance l’éducatrice spécialisée Stéphanie Frégeau, qui a parfois droit à un «ta yeule» de la part d’élèves.
Une réalité que l’on retrouve dans plusieurs écoles secondaires, où la communication et la violence verbale est «un des enjeux qui revient le plus souvent», affirme François Bowen, professeur à l’Université de Montréal qui accompagne plusieurs établissements dans le cadre de ce projet.
«C’est un problème important, parce qu’il en cache plusieurs autres. Les gens sont parfois un peu démunis, ils ne savent pas de quel bord prendre ça», ajoute-t-il.
Enseigner la politesse
L’idée de créer une charte du civisme et de la communication positive, proposée par l’équipe de chercheurs, a rapidement fait son chemin au sein de l’équipe-école de Montmagny, qui mise sur cet outil notamment pour enseigner les formules de politesse de base, comme dire «bonjour», «s’il vous plaît» et «merci» (voir détails plus bas).
Quelques minutes avant la rencontre avec Le Journal, l’éducatrice spécialisée Stéphanie Frégeau venait tout juste de rappeler à une élève qu’elle avait beaucoup plus de chances d’obtenir une réponse positive à une demande si elle est formulée de façon courtoise plutôt que de lancer «j’peux-tu aller pisser?» à un prof pendant son cours.
Ce rappel des règles de politesse vaut aussi pour les adultes, ajoute Patrick Gagnon. «La charte, ce n’est pas juste pour les élèves, c’est pour l’école», dit-il.
Dans le cadre de cette démarche, les membres du personnel ont d’ailleurs aussi décidé de miser sur de petits gestes qui font toute la différence au quotidien, comme saluer chacun des élèves qui franchit la porte de la classe à chaque période.
Le civisme, «l’affaire de tous»
La charte mise aussi sur la résolution de conflit, qui passe par l’identification des émotions exprimées dans le respect. Présentés aux élèves à la mi-mars, ces principes seront enseignés au cours des prochains mois. Tous les membres du personnel sont appelés à y contribuer.
«Il faut que ce soit l’affaire de tous», affirme M. Gagnon. Des élèves jouant le rôle de «pairs influenceurs» devraient aussi être mis à contribution.
La charte donne «un levier» pour intervenir auprès des élèves», se réjouit l’enseignante Vanessa Pedneault. «On dirait que ça officialise les choses», dit-elle.
Il ne faut pas se gêner pour enseigner les bons comportements, même si on les prend parfois pour acquis, ajoute Mme Pedneault, qui donne l’exemple d’un atelier réalisé récemment dans son cours de Culture et citoyenneté québécoise, où les élèves devaient se consulter pour en arriver à une réponse d’équipe.
«Il a fallu que j’arrête pour leur dire que se consulter, c’est discuter ensemble pour arriver à une réponse commune. Ce n’est pas la personne qui parle le plus fort qui va parler pour le groupe», raconte-t-elle.
«Comme enseignant, on a envie parfois d’être intolérant et de se dire voyons donc, me semble que ce n’est pas compliqué. Mais à partir du moment où je l’ai expliqué, le problème s’est résolu de lui-même.»
Cette démarche a fait l’objet de consultation auprès d’élèves, qui trouv
Cette charte a été fait l’objet de consultation auprès d’élèves, qui voient la pertinence d’être plus respectueux envers les adultes, mais aussi envers leurs amis. « C’est quelque chose qu’on devrait apprendre un peu plus et améliorer», lance Rodrigo P. Ramirez, un élève de cinquième secondaire.
L’ABC du civisme à l’école
Voici quelques éléments de la Charte de civisme et de communication positive de l’école secondaire Louis-Jacques-Casault :
Rappel des formules de civilité pour entrer en contact
- Bonjour
- Désolé ou je m’excuse
- S’il vous plaît
- Merci
- Au revoir, bye, à demain
Pourquoi?
Pour maximiser les chances d’obtenir une réponse positive
Pour des amitiés et relations sociales saines
Pour un climat positif
Comment résoudre un conflit ou un problème?
- Prendre une pause, rester calme pour réfléchir et retrouver mes idées.
- Identifier ce que je ressens (émotions) pour expliquer mon problème et communiquer clairement avec le «je».
- Écouter activement l’autre personne pour trouver un terrain d’entente
- Décider d’une solution (compromis) pour la mettre en action.
Il n’y a pas de sanction spécifique reliée à la charte, qui mise sur les attitudes à développer plutôt que celles à proscrire.
Le code de vie des élèves s’applique en cas de manquements, notamment ceux liés à la violence verbale.
Incivilités à l’école... de quoi parle-t-on?
Écart de langage
- Niveau de langue inadéquat à l’école ou inapproprié à la personne
- «M’dame, j’peux-tu aller pisser?»
Impolitesse
- Verbale: sacres et vulgarités, sarcasmes et moqueries
- Non verbale: attitude arrogante et insolente, mépris
Violence verbale
- Insultes et menaces dont l’intention ou le résultat est de blesser ou de dénigrer
Source : Éric Morissette, Caroline Levasseur et François Bowen, Université de Montréal
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