Obligatoire dès le 1er janvier: une nouvelle étiquette pour identifier les produits transformés comprenant trop de sucre, de sodium ou de gras saturés

Félix Desjardins
Dans un élan «quelque peu retardataire», selon une nutritionniste, Santé Canada obligera sous peu l’industrie alimentaire à afficher un symbole sur les produits transformés comprenant trop de gras saturés, de sucre ou de sodium.
Bien que cette nouvelle règlementation entre seulement en vigueur à compter du 1er janvier 2026, les emballages de plusieurs articles affichent déjà cette nouvelle étiquette austère sur les tablettes. Selon une étude publiée par l’Université Laval en mai dernier, pas moins de 60% des aliments transformés les plus vendus au Québec seront assortis du logo à la loupe dès le Nouvel An, à moins d’avoir changé leur composition nutritionnelle.
Le prix, critère numéro 1

Nutritionniste, autrice et conférencière, Stéphanie Côté voit cette décision du gouvernement fédéral d’un bon œil, mais ne croit pas qu’elle aura un effet transformateur sur les habitudes de consommation des Canadiens.
«On ne se fera pas d’accroires: ça ne va pas devenir un critère décisif pour tout le monde, tranche-t-elle. Le coût est le facteur déterminant pour la majorité des gens. Mais ce nouvel affichage peut aider les gens à comparer deux produits similaires dans une même catégorie et dans une même fourchette de prix.»

On peut avancer que la mission de Santé Canada comporte deux volets. D’un côté, on incite les consommateurs à limiter l'achat d’aliments susceptibles d’augmenter les risques pour leur santé. De l’autre, on encourage certains joueurs de l’industrie à revoir leurs recettes pour éviter de devoir apposer un symbole qui déclare ostensiblement que leurs produits sont mauvais pour la santé.

Mme Côté y voit toutefois une occasion pour des compagnies de faire du «nutriblanchiment», une stratégie marketing qui consiste à vendre des produits malsains dans un emballage qui nous laisse croire le contraire.
«Certains fabricants pourraient décider d’utiliser des édulcorants, plutôt que du sucre, pour ne pas avoir à afficher l’étiquette, explique-t-elle. Ça ne rend pas l’aliment meilleur pour la santé.»
Aller plus loin que l'étiquette

L’utilité de l’étiquette, enchaîne la titulaire d’une maitrise en nutrition sportive, est de servir de drapeau rouge quand vient le moment de passer à la caisse. «Si on se rend compte que la majorité des aliments qu’on a dans notre panier affiche cette étiquette, on peut se remettre en question», précise-t-elle.
Même si un produit ne dépasse pas le seuil établi pour une teneur élevée en sodium, gras saturés ou sucres, il peut être en réalité moins bénéfique pour la santé qu’un produit qui doit afficher le nouveau logo. Mme Côté donne l’exemple d’une barre tendre aux noix et aux fruits séchés, qui serait plus nutritive qu’un comparable moins sucré.

«Il faut regarder l’aliment dans son ensemble, explique-t-elle. Est-ce qu’il comprend des fibres, des protéines, des vitamines? Il ne faut pas prendre ce logo pour du cash et catégoriser les aliments en “bon” ou “mauvais”».
Pour la suite, Stéphanie Côté juge qu'une volonté politique sera nécessaire pour améliorer les habitudes alimentaires des Canadiens, acculés par la hausse fulgurante du prix du panier d'épicerie.
«C'est une chose, l'éducation, mais on ne peut pas juste taper sur les doigts du consommateur et lui montrer quels aliments moins consommer, conclut-elle. D'un point de vue politique, il y a encore du travail à faire pour faciliter l'accès aux aliments sains. C'est une chose, l'éducation, mais il y a encore beaucoup de déserts alimentaires et les prix n'arrêtent pas d'augmenter.»