Projet de loi sur le partage des données médicales: Québec ouvre la porte aux pharmaceutiques pour la recherche

Patrick Bellerose
Québec revient à la charge avec sa volonté de faciliter le partage des données médicales. La modification est essentielle au futur Dossier santé numérique, mais facilitera aussi la recherche pour les géants pharmaceutiques.
• À lire aussi: Le projet d’identité numérique bloqué par le manque de transparence du ministère
• À lire aussi: Cyberattaque: l’Australie accuse des pirates russes du vol de données médicales
Le ministre de la Cybersécurité et du Numérique, Éric Caire, a déposé le projet de loi 3, similaire au projet de loi 19 présenté par son collègue de la Santé en décembre dernier.
La nouvelle approche permettra de partager les données d’un patient entre les établissements, tant pour le professionnel de la santé que pour l’utilisateur.
«Je pense qu’il est important de rappeler aux citoyens que plusieurs de ces règles-là ont été mises en place dans les années 1980-1990», a plaidé le ministre de la Santé, Christian Dubé.
Son ministère souhaite lancer l’an prochain deux projets pilotes pour le Dossier santé numérique, qui doit donner accès aux données médicales des Québécois en quelques clics via Internet.
Nouveauté par rapport à la précédente mouture, Québec a prévu la possibilité de bloquer certaines informations qu’un patient ne souhaite pas partager avec l’ensemble des intervenants qui consultent son dossier.
Cette nouvelle fonction pourrait être utile, par exemple, dans le cas d’une personne victime de violence conjugale.
Pharmaceutiques
En parallèle, le projet de loi permettra aussi de rendre disponibles les informations médicales à des entreprises pharmaceutiques, comme Pfizer, sous la supervision d’un centre d’accès pour la recherche et après l’approbation d’un comité éthique.
Les usagers pourront aussi refuser que leurs données personnelles soient utilisées.
«Le secteur de la recherche a besoin pour innover, pour développer des nouvelles technologies, des nouveaux protocoles de soins, des nouveaux médicaments, de ces données-là», a commenté le ministre Caire mercredi.
Pas question, toutefois, de faire payer un fabricant de médicaments en échange d’un accès aux données pour la recherche. Une telle transaction est interdite par le projet de loi 95.
«Donc, c’est interdit, pour l’État, de commercialiser les données. Par contre, je suis absolument convaincu que notre collègue, le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie [NDLR : Pierre Fitzgibbon] saura s’entendre avec Pfizer – si tant est que les protocoles de recherche susmentionnés remplissaient les conditions que je vous ai mentionnées – saurait s’assurer qu’il y aurait au Québec des retombées économiques, entre autres», a déclaré Éric Caire.
Ça pourrait passer par la production des médicaments au Québec, par exemple.
En août 2020, le ministre Fitzgibbon avait causé la polémique en déclarant vouloir vendre des données de santé des Québécois pour attirer des compagnies pharmaceutiques.
Après le point de presse, le cabinet de M. Dubé a précisé que «la seule avenue possible pour travailler avec une entreprise, comme Pfizer, serait d’avoir un projet de recherche, c’est tout.»
«Il n’y a pas d’entente globale possible, ce serait à la pièce», affirme son attaché de presse.
- Écoutez l'entrevue avec Éric Caire, ministre de la Cybersécurité et du Numérique sur QUB radio :
Vous avez des informations à nous communiquer à propos de cette histoire?
Vous avez un scoop qui pourrait intéresser nos lecteurs?
Écrivez-nous à l'adresse ou appelez-nous directement au 1 800-63SCOOP.