Nouvelle règle de civisme à l’école: des profs obligés de se vouvoyer entre eux


Geneviève Lajoie
Il n’y a pas que les élèves qui seront obligés de vouvoyer leurs enseignants en signe de respect. Des profs doivent déjà utiliser la deuxième personne du pluriel pour s’adresser à leurs collègues de travail, question de donner l’exemple aux enfants.
Dès janvier prochain, le vouvoiement sera la norme dans les écoles du Québec. Le gouvernement Legault en avait fait une de ses priorités en éducation.
Avant de passer au ministère de l’Environnement, Bernard Drainville a fait adopter un règlement qui forcera les jeunes Québécois à vouvoyer le personnel scolaire, sous peine de sanctions pouvant aller de l’avertissement à l’expulsion. L’emploi des titres «monsieur» et «madame» sera aussi obligatoire lorsqu’ils s’adresseront aux adultes de l’école.
L’implantation de cette règle de civisme a d’ailleurs déjà commencé dans certaines écoles primaires et secondaires.
Des modèles pour les jeunes
C’est le cas dans les établissements du Centre de services scolaire des Navigateurs, sur la Rive-Sud de Québec, où les enseignants doivent servir de modèle aux enfants depuis la rentrée scolaire.
«[Ça] se fait essentiellement par modelage, donc par observation. Devant les élèves, les adultes se vouvoient entre eux et impriment ainsi le modèle», précise la porte-parole, Louise Boisvert. «C’est la pratique en vigueur, pour donner l’exemple évidemment.»
Cette dernière souligne qu’une «période transitoire» est nécessaire pour l’instauration de cette nouvelle façon de faire qui a été intégrée dans les règles de vie des établissements.
«Adultes et élèves, tout le monde apprend plus ou moins au même rythme et en même temps, même si cette pratique existait déjà à divers endroits et depuis longtemps», insiste la coordonnatrice du service des communications.
Et le vouvoiement entre profs ne semble «pas poser de problème» jusqu’ici. «On est très à l’aise avec ça», soutient le président du Syndicat de l’enseignement des Deux Rives, Martin Hogue.

Ce qui «chatouille» davantage les enseignants du coin, c’est l’utilisation obligatoire de la deuxième personne du pluriel chez les plus petits du préscolaire et du premier cycle du primaire, qui s'avère plus difficile.
L’implantation varie d’une région à l’autre
Le vouvoiement pour les élèves est déjà en vigueur aussi dans la majorité des écoles du CSS du Val-des-Cerfs à Granby. Les établissements voulaient laisser le temps aux jeunes de s’approprier «graduellement» cette nouvelle politique.
L’utilisation de la deuxième personne du pluriel entre les profs est toutefois à la discrétion de chacune des écoles qui demeurent responsables de la mise en place du vouvoiement.
Au Centre de services scolaire de Montréal, on planche actuellement sur les modalités d’application de cette nouvelle règle qui n’a pas encore été implantée. Le porte-parole Alain Perron ne cache pas qu’il s’agit d’un changement qui nécessitera de l’adaptation «pour tout le monde».
«À l’instar de ce que nous avons fait pour l’interdiction des cellulaires, nous allons accompagner nos établissements tout en veillant à ce que la transition se fasse de manière claire et harmonieuse pour les élèves», a-t-il fait valoir.
Mais déjà, le vouvoiement imposé aux jeunes fait grincer des dents chez certains enseignants montréalais, qui «trouvent ça carrément ridicule» et sont réticents à l’appliquer. «Ça risque de créer quelques frictions à l’interne» entre ceux qui exigeront l'utilisation de la deuxième personne du pluriel et les récalcitrants, confie un prof, sous le couvert de l’anonymat.
Nouvelle règle du vouvoiement imposée aux élèves à compter de janvier
- Vouvoyer le personnel de l’école.
- Utiliser le titre de «madame» ou de «monsieur» pour s’adresser au personnel de l’école.
Sanctions possibles en cas de non-respect de la règle par un élève
- avertissement
- réflexion écrite
- retenue
- suspension
- expulsion
Les sanctions sont déterminées en fonction de la nature, de la gravité, de la fréquence et de la récurrence des manquements, selon une approche graduelle
Source: «Règlement sur les règles de conduite au primaire et au secondaire»
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