Nouveaux tarifs de Trump: faut-il le croire?

Francis Gosselin
Alors qu’on croyait que les négociations commerciales entre le Canada et les États-Unis étaient sur le point de se clore, Donald Trump a choisi d’envoyer l’une de ses ridicules lettres à Mark Carney, menaçant le Canada de tarifs de 35%.
Si vous avez de la difficulté à suivre, c’est tout à fait normal.
Même l’entourage du président est perplexe.
Certains affirment même que le président lui-même ne suit plus tout à fait ses propres élucubrations.
Crédibilité zéro
Cette nouvelle attaque vient remplacer ou s’ajouter, ce n’est pas très clair, aux menaces du 1er février – vous vous rappelez, le fentanyl et les hordes d’immigrants illégaux provenant du Canada?
On dira ce qu’on veut, l’imagination de Trump est fertile.
Ces premiers tarifs ont été en partie levés, mais le 12 mars, d’autres sont entrés en vigueur, notamment sur l’acier et l’aluminium.
Le 7 mars, Donald Trump a menacé l’industrie laitière et du bois d’œuvre de tarifs de 250%. Rendu là, 300% ou 1000% ou 1 000 000%, c’est du pareil au même: quand on multiplie par 3,5 le prix d’un bien, c’est qu’on l’interdit carrément d’entrer.
La précision avec laquelle Trump invente ces chiffres est un indice qui dévoile le peu de crédibilité du personnage et de la démarche.
Un cas à part, un pays comme les autres
Puis, le 2 avril, ridicule «jour de la libération» qui ne passera à l’histoire que pour la démence du calcul qui a mené aux «contre-tarifs», le Canada a été... épargné!
Temporairement, il faut croire, puisque malgré le départ précipité du président lors du sommet du G7, les deux pays ont convenu de la date butoir du 21 juillet.
Cela n’a pas empêché le Donald, le 27 juin, d’annoncer la fin unilatérale des négociations en raison de la taxe sur les services numériques.
Cela nous amène à la lettre reçue hier.
Une énième façon pour Trump d’attirer sur lui l’attention des médias, de provoquer inutilement les Canadiens et de jeter du sable dans l’engrenage d’une relation qui, pourtant, est mutuellement bénéfique.
Le Canada est tantôt partenaire privilégié, tantôt relégué au rang de pays en développement, recevant de vulgaires lettres comme on enverrait une mise en demeure à son voisin.
Beaucoup de bruit pour rien
Il est très peu probable que Trump assène des tarifs de 35% à l’ensemble des exportations canadiennes. Le pétrole et l’électricité seront assurément exemptés; de même, le Canada fournit près de 50% de l’aluminium utilisé aux États-Unis et les tarifs déjà en place (25%) sont très impopulaires au sud de la frontière.
Ces lettres, c’est du bruit. De la provocation vaine. Il n’y a rien à voir là-dedans autre qu’une opération de communication bâclée.
Le moment viendra, toutefois, où le Canada devra réagir. Il est sage d’attendre la date limite du 21 juillet et de voir si une entente est prise. Mais après?
L’abus a assez duré. Les contre-tarifs sont une mauvaise idée et ne fonctionnent pas. Ils pénalisent indûment les Canadiens. À l’inverse, des tarifs à l’exportation sur le gaz, le pétrole, l’électricité ou la potasse auraient en revanche l’avantage de faire réagir la population américaine et, en conséquence, l’homme orange.
Face au délire d’un vieil homme qui a perdu le nord, le Canada doit rester calme, mais ferme. Répondre de manière ciblée, tout en renforçant ses alliances.
Le mot d’ordre: «TACO» – Trump Always Chickens Out. Nous sommes face à un président incertain et peureux. Tout ceci aura une fin, et elle se rapproche.